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Ce vendredi, la Cour internationale de Justice (CIJ) s’est prononcée en faveur d’un cessez-le-feu immédiat des combats dans la bande de Gaza. Une décision juridique contraignante qu’Israël pourrait ne pas respecter.

Suzy Wolfarth

Israël doit “arrêter immédiatement son offensive militaire” à Gaza, a déclaré ce vendredi la Cour internationale de justice (CIJ). La plus haute juridiction des Nations unies, située à La Haye, s’est ainsi prononcée en faveur d’un cessez-le-feu immédiat de l’opération israélienne dans la bande de Gaza, par treize voix contre deux. La Cour demande également l’arrêt de “toute autre action menée dans le gouvernorat de Rafah qui serait susceptible d’infliger au groupe des Palestiniens de Gaza des conditions d’existence capables d’entraîner sa destruction physique ou partielle”. Cette ordonnance fait suite à la plainte déposée le 10 mai par l’Afrique du Sud, qui a dénoncé, lors des audiences de la semaine passée, le “génocide” qui serait, selon elle, commis par les troupes israéliennes .

La décision de la Cour “est sans précédent pour l’État hébreu”, explique Olivier Corten, spécialiste du droit international et professeur à l’ULB. En effet, un arrêt de la juridiction onusienne ne peut être rendu qu’avec le consentement des États impliqués, aval qu’Israël se refuse pour l’instant à donner. Pour autant, “l’État hébreu est signataire de la Convention contre le génocide de 1948, ce qui permet à la Cour de pouvoir le juger suite à la demande de l’Afrique du Sud”. C’est notamment dans le cadre de cette convention qu’une première plainte avait été déposée par Pretoria le 29 décembre 2023. La Cour n’avait alors pas ordonné explicitement un cessez-le-feu mais reconnaissait un risque plausible de génocide par l’État d’Israël.

Israël nie un risque existentiel pour la “population civile palestinienne

La décision de la Cour internationale de Justice marque donc un tournant dans l’histoire du conflit israélo-palestinien. Aussitôt après l’annonce, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a annoncé réunir plusieurs ministres de son gouvernement pour “consultation”. Dans un communiqué commun du ministère des Affaires étrangères et du Conseil de la sécurité nationale, Israël a par la suite affirmé que l’opération militaire à Rafah ne posait aucun risque existentiel pour la “population civile palestinienne”. Reste à savoir si le gouvernement israélien acceptera de se plier à l’ordonnance car “pour le gouvernement israélien, le fait de ne pas se plier cette fois encore au droit international ne fait qu’ajouter un petit grain de sable à une poignée déjà bien consistante”, estime M. Corten.

En effet, les ordonnances de la CIJ sont juridiquement contraignantes mais elle n’a aucun moyen de les faire respecter. En réaction au refus israélien, le Conseil de sécurité de l’Onu peut être saisi, mais “on imagine bien que les États-Unis opposeraient alors leur veto”. Pour autant, les actions contre Israël devant les tribunaux internationaux pourraient renforcer encore davantage l’isolement d’Israël vis-à-vis de la communauté internationale et de ses alliés. De fait, cette décision intervient quelques jours après que le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a demandé des mandats d’arrêt contre le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou ainsi que son ministre de la défense Yoav Gallant pour des crimes présumés commis dans la bande de Gaza.

Faire respecter le droit international

La potentielle rebuffade israélienne pourrait donc “sûrement encourager davantage d’États à prendre des mesures pour faire respecter le droit international”, ajoute Olivier Corten. Ce mercredi, la Norvège, l’Espagne et l’Irlande -trois pays européens- ont d’ailleurs annoncé la reconnaissance d’un État palestinien à compter du 28 mai. En réaction à l’annonce de la CIJ, la Belgique a pour sa part demandé “l’application immédiate de la décision”, comme l’a déclaré la ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, sur X.

La @CIJ_ICJ ordonne à Israël d’arrêter son offensive militaire à Rafah. La 🇧🇪 demande l’application immédiate de la décision.

La violence et la souffrance humaine à Gaza doivent cesser.

Nous demandons un cessez-le-feu, la libération des otages et des négociations pour 2 États.— Hadja Lahbib (@hadjalahbib) May 24, 2024

La Libre