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par Edouard Husson

TTU – des régiments français seraient en route pour la Roumanie, avant d’aller à Odessa

The main symbol of the city is protected in Odessa on Wednesday March 9, 2022, a port city on the Black Sea in southern Ukraine, as the city prepares to battle advancing Russia army. (Ukraine Armed Forces/EYEPRESS) Photo via Newscom/eyepress113307/EPN/Newscom/SIPA/2203091303

C’est une information livrée par un groupe de résistants russes actifs à Odessa. Soixante combattants français sont arrivés à Odessa ces derniers jours. Ils sont décrits comme des « mercenaires ». Faute d’avoir obtenu un soutien à l’envoi officiel de troupes en Ukraine, Emmanuel Macron continuerait donc à faire envoyer clandestinement des soldats français en Ukraine, hors de tout vote du Parlement.

C’est une information qui est prise au sérieux par le journaliste brésilien Pepe Escobar, l’un des hommes les mieux informés des affaires géopolitiques:

Une soixantaine de mercenaires francophones sont arrivés dans le port d’Odessa à bord de trois bateaux, a déclaré à Sputnik un groupe clandestin pro-russe.

« Les arrivants étaient armés, équipés… Ces militaires étrangers sont dispersés dans la ville, essayant de ne pas quitter leur lieu de résidence et évitant généralement tout contact avec la population locale par tous les moyens possibles », a déclaré le groupe clandestin.@rocknrollgeopolitics, canal Telegram de Pepe Escobar

Des soldats camouflés?

Comme nous l’avons déjà indiqué dans Le Courrier, il y a depuis longtemps des « mercenaires » français en Ukraine. Et Simplicius a fait récemment un point exhastif sur son blog.

Depuis le début de la guerre, il y a quelques centaines de soldats français camouflés sous l’étiquette de volontaires ou celles de mercenaires: ce sont vraisemblablement des troupes spéciales. Ajoutons-y des conseillers militaires, des officiers instructeurs. Nous avons aussi fait état à plusieurs reprises de blessés et de tués discrètement rapatriés en France.

La nouveauté: les médias russes éventent la nouvelle

La nouveauté n’est donc pas dans l’arrivée plausible de soixante soldats français mais dans la rapidité avec laquelle les médias russes en parlent.

Depuis le début de la guerre d’Ukraine, il y a des grappes de combattants français. Nous sommes dans une zone grise dont, habituellement, on ne parle jamais. Des troupes spéciales, des mercenaires, des conseillers, des soutiens logistiques etc… En théorie, tout passe par le CEMA, le Ched d’Etat-Major des Armées. Mais il y a aussi le Service Action de la DGSE. Et puis allez-savoir, avec Macron: c’est tellement tentant, quand on se prend pour Jupiter, de court-circuiter les décisions avec son état-major particulier.

La guerre, ancienne et moderne, ne s’est jamais jouée seulement sur les champs de bataille. C’est comme un iceberg: les livres d’histoire nous donnent 10% de ce qui a déterminé le cours d’une guerre. 90% restent inconnus, sauf des acteurs, qui n’ont jamais écrit ce qu’ils ont fait.

Macron est un enfant de la communication moderne. Et comme il est persuadé d’être plus fort que les autres, il communique de manière intempestive. Les déclarations sur l’envoi de soldats français, c’est la volonté vaniteuse d’officialiser ce qui ne devrait pas l’être.

La guerre psychologique des Russes

Moscou a très bien compris ce qu’il pouvait tirer de l’ego macronien: à partir du moment où le président français ne respecte plus la distinction entre ce qu’on peut dire publiquement et ce qui relève des canaux discrets entre gouvernements ou entre services de renseignement, il s’agit de mettre sous pression la France, pour en faire le maillon faible de la coalition adverse.

Comme me l’indiquait ce matin un militaire bon connaisseur de ces questions: on est dans la guerre psychologique. En médiatisant le sujet, les Russes entendent mettre l’armée et le gouvernement français sous pression. Les 60 « mercenaires » sont désormais exposés et ils deviennent une cible prioritaire pour l’armée russe ou les mouvements de résistants pro-russes d’Ukraine qui luttent clandestinement contre le régime de Zelensky.

Ajoutons que l’identification de ces « mercenaires » vient sans doute d’un manque de professionnalisme de ceux qui ont conçu cette infiltration: les hommes étaient identifiables à leur uniforme; on les a entendu parler français etc….

Le même expert me disait ce matin: si on ne veut pas les condamner à une mort quasi-certaine, il faut les exfiltrer rapidement et les redéployer ailleurs. Mais ceux qui n’ont pas su les faire entrer secrètement sauraient-ils les faire sortir discrètement?

Le Courrier des Stratèges