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L’enquête s’étale sur seize pages. Elle n’offre pas de révélations fracassantes, mais propose une mise à nu circonstanciée, et solidement étayée, du fonctionnement « d’une instance pourrie de l’intérieur par des années de tripatouillages ». Une instance qui n’est autre que la Fédération internationale de football (FIFA), que l’hebdomadaire France Football (édition du 29 janvier) épingle lors d’un dossier consacré à l’attribution au Qatar de la Coupe du monde 2022. Un choix qui cacherait corruption et arrangements, et qui pourrait être la goutte d’eau faisant déborder le vase marécageux où trempe la FIFA.
GRONDONA, TEXEIRA… ET SARKOZY
Le Qatar se serait ainsi appuyé sur de puissants relais, comme le président de la Fédération asiatique Mohammed Bin Hammam, définitivement radié à vie en décembre dernier, le président de la Fédération argentine et vice-président de la FIFA Julio Grondona ou l’ex-président de la Fédération brésilienne (CBF) Ricardo Texeira, qui a démissionné en mars du comité de la FIFA et de la CBF sur fond d’accusations de corruption.
L’hebdomadaire évoque également « une réunion secrète » au Palais de l’Elysée, le 23 novembre 2010, une dizaine de jours avant le vote de la FIFA, entre le président de la République Nicolas Sarkozy, le prince du Qatar, Tamin bin Hamad al-Thani, Michel Platini, président de l’UEFA, et Sébastien Bazin, représentant de Colony Capital, à l’époque propriétaire du PSG. « Au cours de cette réunion, écrit le journal, il a tour à tour été question du rachat du PSG par les Qataris (devenu effectif en juin 2011), d’une montée de leur actionnariat au sein du groupe Lagardère, de la création d’une chaîne de sport (la future BeIn sport) pour concurrencer Canal + – que Sarkozy voulait fragiliser -, le tout en échange d’une promesse : que Platini (président de l’UEFA) ne donne pas sa voix aux Etats-Unis, comme il l’avait envisagé, mais au Qatar ».
Un récit contre lequel s’est élevé Michel Platini. « Croire que mon choix se serait porté sur Qatar 2022 en échange d’arrangements entre l’Etat français et le Qatar n’est que pure spéculation et n’engage que ceux qui écrivent ces mensonges, a assuré le Français dans un communiqué transmis mardi à l’AFP. Je ne m’interdis pas d’attaquer en justice toute personne qui mettra en doute mon intégrité dans ce vote ». « J’ai fait mon choix en toute indépendance, en suivant une logique simple (…) : l’ouverture à des pays qui n’ont encore jamais organisé de grands événements sportifs. (…) Dans le même souci de transparence, c’est moi qui avais également révélé aux médias que quelques semaines avant le vote j’avais été convié par Nicolas Sarkozy à un dîner », précise encore Platini après avoir rappelé qu’il avait en toute « transparence » révélé lui-même son vote.
« LES PLUS HAUTS STANDARDS D’ÉTHIQUE »
Interrogés par France Football, les organisateurs du Mondial 2022 ont déclaré : « Nous avons obtenu l’organisation du Mondial 2022 en respectant du début à la fin les plus hauts standards d’éthique et de morale, tels qu’ils étaient définis dans les règlements et le cahier des charges ». La FIFA se refuse de son côté à tout commentaire, préférant rappeler que sa commission d’éthique avait affirmé jeudi dernier qu’elle avait « l’intention de mener une enquête approfondie » sur les « allégations concernant des événements survenus dans le cadre de la procédure d’attribution des Coupes du monde 2018 (à la Russie) et 2022″.
Une commission d’éthique qui pourrait bénéficier de la nomination à sa tête, le 12 juillet 2012, de l’Américain Michael Garcia, ancien procureur fédéral, spécialisé, entre autres, dans les questions de criminalité financière, et vice-président d’Interpol pour l’Amérique de 2003 à 2006. La présence de Michael Garcia représente, selon France Football, « une petite révolution rendue nécessaire par une succession de constats accablants. » En attendant la grande ?