Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne devaient examiner, ces 22 et 23 mars à Dublin, « toutes les conséquences de la levée de l’embargo » sur la fourniture d’armes aux forces de l’opposition syrienne. Le président français François Hollande et le premier ministre britannique David Cameron avaient pris les devants, la semaine dernière, en réclamant la fin de cet embargo. À leurs yeux, la passivité occidentale devant les souffrances infligées aux Syriens (un million de réfugiés et des millions de déplacés, 70 000 victimes selon l’Onu) encourage la brutalité du régime Assad qui emploie tous les moyens pour mater la rébellion commencée en mars 2011.
Sans doute justifiées sur le plan moral, ces livraisons d’armes présentent des risques énormes, surtout que Hollande etCameron n’ont aucune stratégie, sauf un souci humanitaire, en dehors de toute légalité internationale : l’Onu n’a pas reconnu l’opposition, ni autorisé d’intervention extérieure à son profit. La France, le Royaume-Uni et les États-Unis fournissent déjà, discrètement, une assistance logistique et technique auxopposants, mais la livraison d’armes déclencherait un engrenage dangereux conduisant à armer lesdjihadistes. Prendre ce risque serait fou.Le régime Assad tente d’instrumentaliser à son profit cette poussée inquiétante des islamistes radicaux. C’est de bonne guerre. Mais cette présence djihadiste reste une réalité qui va peser lourd dans l’après-Assad. Personne ne peut garantir que les armes livrées aux forces démocrates ou laïques resteront bien entre leurs mains. L’opposition syrienne est divisée, partagée entre des politiques et des groupes militaires, au sein desquels les djihadistes ont renforcé leur emprise. Ils feront tout pour s’emparer de ces armes, de gré ou de force. Sauf à engager des hommes sur le terrain pour contrôler directement leur destination et leur emploi — une option très difficile à tenir dans la durée —, ces armes pourraient aller équiper des combattants hostiles aux Français et aux Britanniques sur d’autres théâtres. Au Sahel, par exemple… Quelle responsabilité porteraient alors François Hollande et David Cameron !
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