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Interview au Parisien : parue ce dimanche à 2 semaines des élections municipales qui seront l’occasion d’ouvrir les yeux du gouvenement.

 

Pensez-vous, comme Alain Juppé, que c’est « le foutoir le plus incroyable » au sein du gouvernement ?

C’est le désordre total. Moins de 2 ans après son élection, le président est largement décrédibilisé. Le Premier ministre est à bout de souffle, disqualifié par ses reculs successifs.

Jean-Marc Ayrault a pourtant dit dans nos colonnes qu’il n’était « ni usé, ni fatigué »…

Que voulez-vous qu’il dise d’autre ? Je le comprends… il se bat. Mais il n’a plus d’autorité sur sa majorité et il doit faire avec un Président flou. J’ai tenu cinq ans à Matignon, prioritairement parce j’avais le plein soutien des parlementaires. Je tenais ma majorité.

Le remaniement se fait trop attendre ?

Depuis des mois je plaide pour une initiative forte de la part du Président. Davantage qu’un remaniement, c’est un vrai infléchissement de sa politique qu’il devrait assumer. Plus il tarde, plus il enfonce le pays dans la dépression. Il faut utiliser les élections municipales pour lui ouvrir les yeux et provoquer un choc utile à la France.

 

Et comment jugez-vous Manuel Valls ?

Je suis sévère. Il a fait de l’hyperactivité, de l’exploitation des faits divers et des polémiques, le paravent de son inefficacité. Le décalage entre son exposition médiatique et son bilan est immense. La lutte contre l’insécurité et la délinquance est un combat global très difficile, qui exige mesure, humilité et réalisme. En se servant de ce ministère comme d’un tremplin politique, Manuel Valls contribue à discréditer l’action publique.

 

C’est ce qu’avait fait Nicolas Sarkozy quand il était à Beauvau…

Les temps changent. Les Français sont moins dupes et beaucoup plus critiques qu’avant à l’égard de ces comportements. Manuel Valls est en train de se brûler les ailes en essayant d’imiter Nicolas Sarkozy qui lui avait de vrais résultats.

 

On a appris cette semaine que le ministère de l’Intérieur aurait utilisé une étudiante russe pour espionner le collectif de la Manif pour tous….

C’est une affaire qui me choque  beaucoup et sur laquelle je demande au ministre de l’intérieur de faire très vite toute la lumière ! Des éléments laissent à penser que le gouvernement est allé au-delà des principes républicains pour essayer de contrer des mouvements pacifistes. Si cette affaire est vraie, elle est scandaleuse sur le plan des libertés publiques.

 

Qu’allez-vous faire ?

Si les choses ne sont pas clarifiées rapidement, je suis décidé à demander la constitution d’une commission d’enquête parlementaire.

 

Nous sommes à deux semaines des municipales, l’UMP est-elle en capacité de gagner ce scrutin ?

Je pense que le résultat de ces élections sera positif pour la droite et le centre. Ce que je constate sur le terrain c’est un besoin d’alternance, un rejet massif de la politique conduite, une mobilisation forte de nos électeurs et une démobilisation importante des électeurs de gauche.

 

Mais les accusations de surfacturation de Copé, les écoutes de Patrick Buisson, celles de Nicolas Sarkozy… Toutes ces affaires ne vont-elles pas avoir un effet démobilisateur sur vos électeurs ?

J’espère que non. Il nous reste 2 semaines pour battre la campagne et faire bloc derrière nos candidats. Rien ne doit venir interférer le mouvement en leur faveur. C’est la raison pour laquelle que je me garde bien pour le moment de commenter les polémiques touchant notre famille politique.

 

Et concernant les enregistrements de Buisson ?

C’est répugnant ! Jusqu’à maintenant, je me suis toujours tenu à l’écart de ces gens-là. Les méthodes qu’ils pratiquent et les discours qu’ils tiennent font du mal à la démocratie et vont à l’encontre des valeurs que je défends. Aujourd’hui se tenir à l’écart n’est plus suffisant. Il faut les combattre. Ces gens-là n’ont rien à faire dans une famille politique comme la notre.

 

Sarkozy a été aveuglé par l’intelligence de Buisson ?

Je ne peux pas vous répondre. Je ne le connais pas. Je l’ai croisé une fois, à la fin de la campagne présidentielle, lors d’une réunion où il expliquait pourquoi on allait gagner…!

 

Vous dites que ces affaires n’auront pas d’impact, mais dans les meetings, les électeurs de droite se disent écœurés…

Nous sommes tous écœurés par ces affaires, mais je pense que pour la majorité des électeurs, le choix se fera en fonction des personnalités et des enjeux locaux, en réponse à l’action gouvernementale désastreuse et à l’oppression fiscale insupportable. La colère est générale et profonde. La France se radicalise dangereusement. Je crois au sens des responsabilités des électeurs de droite et du centre. J’invite les Français à manifester leur colère dans ce scrutin, en choisissant l’opposition plutôt que le vote extrême ou l’abstention.

 

En cas de défaite de l’UMP aux municipales, qui en portera la responsabilité ? Copé, le président du parti ?

Je le répète, je pense que nous allons gagner ces élections. Cela ne devra pas nous dispenser de nous interroger et pour certains de s’expliquer sur la situation de notre parti.

 

A Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet fait une campagne difficile. Est-ce encore gagnable ?

Nathalie mène une campagne positive. Je le vois à ses côtés sur le terrain. Elle a su créer auprès des parisiens une dynamique et un intérêt qui fait qu’aujourd’hui l’espoir de déjouer les pronostics est permis. Nathalie a une solidité indéniable, une expérience gouvernementale et des propositions pour Paris qui me paraissent nettement au dessus de celles d’Anne Hidalgo.

 

Malgré les menaces de sanctions et l’indignation de la communauté internationale, Moscou ne cède rien dans le conflit Ukrainien. Doit-on être plus ferme avec Poutine ?

En faisant entrer ses forces sur le territoire de l’Ukraine, la Russie a violé le droit international comme les Américains d’ailleurs lorsqu’ils avaient envahi l’Irak. Pour cela, elle doit être condamnée. Mais la fermeté n’implique pas l’hystérie. Le discours de certains dirigeants américains est extravagant. La comparaison avec la guerre froide est stupide et ne peut que pousser la Russie dans ses plus mauvais instincts.

 

Donc, vous êtes contre des sanctions ?

Là n’est pas l’essentiel, l’essentiel c’est de renouer le dialogue. En 2008, le dialogue avec Medvedev et Poutine avait permis de résoudre une situation analogue en Géorgie. Les Européens, madame Merkel en tête parce qu’elle a une autorité et une relation plus engagée avec Poutine, devrait s’en inspirer. Le devoir de l’Europe c‘est d’entretenir avec la Russie les relations les plus confiantes possibles. La crise ukrainienne est dangereuse mais nous avons des éléments pour la résoudre.

 

Vous qui connaissez bien Poutine, c’est un homme avec qui on peut discuter ?

Bien sûr. Et c’est justement pour cela que je prône le dialogue. La discussion avec lui n’est pas facile mais il est capable de compromis et respectueux des engagements pris. Tous les dirigeants russes sont plus ou moins autocrates. Mais si on compare Poutine à ses prédécesseurs, il a plus de rationalité.

 

Comment jugez-vous la gestion de cette crise par le gouvernement français ?

Sur la gestion immédiate, je n’ai pas de critique particulière. En revanche, sur la période précédente, j’en ai ! C’est parce que la France a traité depuis deux ans la Russie d’une façon assez légère, que le président Hollande n’a pas l’écoute et l’influence qu’il devrait avoir dans ce conflit.