Valls, ce n’est qu’un début !

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Le 9 avril 2014

Il y eut des ricanements assez justifiés lorsque le Premier ministre tira des plans sur 2017, 2021, voire 2025…

Reconnaissance sans ambiguïté et sans restriction de la défaite subie aux municipales. Énumération des causes de cette défaite, sans langue de bois. Trop de souffrance, trop peu d’espérance. Trop peu d’argent et trop d’impôts. Crise économique, sociale, civique, crise d’identité. Montée des tensions, des craintes, de la violence, du chômage. Aveu sans fard du mauvais état de la France et de la société. La déclaration de politique générale du nouveau Premier ministre, placée sous l’invocation de la sincérité et de la vérité, commençait plutôt bien, et faisait en tout cas un assez heureux contraste avec la harangue passablement essoufflée de son prédécesseur, il y a près de deux ans.

Puis les motsbanals se mirent à défileren bon ordre et au pas cadencé : insécurité, efficacité, parité, responsabilité… hommage rituel et convenu aux entrepreneurs, aux artisans, aux agriculteurs, auxPME, aux retraités, aux ouvriers, aux précaires, à un supposé talent, à un supposé génie qui nous seraient propres. ManuelValls n’est pas bon orateur, il a la diction et lestyle plats. L’Assemblée, pour sa part, réagissait à son habitude, par un brouhaha et des interruptions qui n’étaient pas à la hauteur de la circonstance. Il y eut des ricanements assez justifiés lorsque le Premier ministre tira des plans sur 2017, 2021, voire 2025, toutes dates auxquelles il est probable – pour ne pas dire certain – que les actuels pilotes du navire ne seront plus aux commandes.

L’intérêt se réveilla lorsque le chef du gouvernement, fidèle à l’image de lui-même qu’il s’est patiemment composée, entra dans le concret et s’engagea à ouvrir le dialogue non seulement avec toutes les forces syndicales, sociales, associatives, mais aussi, s’ils le souhaitaient, avec les représentants de l’opposition. Il retomba lorsqu’il passa à la défense des divers pactes et chocs tirés de son chapeau par le président de la République, en commençant par l’énumération, annoncée et attendue, des allègements de charges et d’impôts promis. Cadeaux aux entreprises, largesses aux salariés, caresses aux écologistes.

Contre quelle contrepartie, avec quel financement ? Le Premier ministre resta dans le vague – et pour cause – sur les créations d’emplois à venir et évoqua rapidement les économies à réaliser sur les dépenses publiques et sur la Sécurité sociale. La Chambre sortit soudain de sa torpeur quand il parla de rogner sur les finances des collectivités locales – preuve, s’il en était besoin, que le non-cumul n’est encore vraiment entré ni dans les têtes ni dans les faits. C’était appuyer là où ça fait mal. L’attention redoubla dans une assistance tout simplement frappée de stupeur, comme il arrive quand on entend quelque chose de si important et de si imprévu que l’on ne comprend pas immédiatement le sens et la portée des paroles que l’on est en train d’entendre, quand Manuel Valls, tout à trac, s’engagea tout simplement à diviser par deux le nombre des régions, à substituer l’intercommunalité à l’actuel quadrillage communal et enfin à supprimer les départements dans un avenir proche, soit en concertation avec les intéressés, soit d’autorité. Le faire est une chose, le dire est déjà une audace. Il y a des paroles qui valent des actes.

Le chef du gouvernement vanta ensuite les « réformes » sociétales accomplies par son prédécesseur, et notamment celle des rythmes scolaires qui ne mérite ni les compliments qu’il en fit ni les cris d’orfraie qu’il arracha aussitôt à la droite. Il conclut enfin avec des accents et une éloquence qui venaient du cœur lorsqu’il rendit hommage à la France dont il a choisi d’être citoyen et qui lui a permis d’accéder aux fonctions qui sont désormais les siennes. La corvée rituelle terminée, la suite était sans surprise. Nul ne pensait ni que l’opposition prendrait acte de quoi que ce soit de positif dans le discours qu’elle venait d’entendre, ni que les minauderies des écologistes ou la fronde de la gauche socialiste aboutiraient à un vote de défiance qui les ramènerait devant le corps électoral. Nos députés ont toutes sortes de défauts, mais ils ne sont pas masochistes.

Source: http://www.bvoltaire.fr/dominiquejamet  publié  le 09/04/2014

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