Étiquettes
Etat Islamque, Etats-Unis, Gérard Bapt, Les chrétiens d'Irak, Liban, Syrie
Par Gérard BAPT Député de la Haute-Garonne

Pour le député Gérard Bapt, face à la menace grandissante de l’islamisme totalitaire au Proche-Orient, toutes les perspectives de solutions possibles doivent désormais devenir négociables.
Aujourd’hui l’Etat Islamique est l’enfant monstrueux des Etats-Unis et de ses alliés du Golfe comme Ben Laden le fut en Afghanistan: il parachève l’épuration religieuse en Irak. A Sinjar, ce sont 200 000 chrétiens, chiites et yazidis qu’il vient de chasser de leur ville…Dans le même temps l’Etat Islamique étend aussi son califat en Syrie: la prise d’assaut d’une nouvelle base militaire s’est accompagnée de l’exécution de 85 soldats syriens «infidèles»… Le Liban est aussi désormais, dans la Bekaa Nord, le nouvel objectif d’occupation d’Al-Nosra et de l’Etat Islamique, alliés pour la circonstance.
Que peut «la communauté internationale» pour s’opposer à l’exil forcé des chrétiens et des autres minorités en Irak? L’appel aux «autorités irakiennes» pour faire respecter les droits des minorités peut-il être efficace si ce n’est en admettant une intervention iranienne massive? La contradiction fondamentale de la politique occidentale – si tant est qu’elle puisse être qualifiée comme telle! – apparait alors dans toute sa désastreuse ampleur: comment dans le même temps peut-elle continuer à en appeler à la chute de Bachar El Assad, l’allié de l’Iran? Peut-on imaginer que cette chute ne mènerait pas au chaos, comme après les interventions occidentales en Irak ou en Lybie, pays dans lesquels nombreux sont ceux qui arrivent à en regretter désormais l’ordre ancien, paradoxe oh combien douloureux! Ce serait à nouveau l’exil des minorités religieuses, et des chrétiens de Syrie, pays où leur existence communautaire et leur liberté de culte leur est encore garantie? Très vite leur présence serait aussi menacée dans un Liban inévitablement aspiré par contagion vers le chaos?…
Il est temps que les chefs d’Etats occidentaux prennent la mesure du péril historique encouru au Moyen Orient avec la montée en puissance d’un islamisme totalitaire dont la vocation sera d’étendre son emprise sur tous les Etats environnants. Pour le faire reculer, il ne suffira pas d’imposer la nécessaire solution négociée en Palestine dont la situation n’est plus le moteur des déstabilisations et des indignations collectives dans un monde arabe déchiré par ses sanglants conflits internes.
Il est temps d’aller, au niveau de l’ONU, vers la recherche d’un compromis historique entre l’Iran et le chiisme d’une part, les Etats du Golfe et le sunnisme modéré d’autre part. Cette initiative doit commencer par la Syrie, pays dans lequel subsiste un Etat, qui serait amené à accepter une solution politique assurant à l’opposition démocratique – y compris à sa branche armée, cible des djihadistes – une participation réelle au gouvernement et à la reconstruction morale et matérielle, sous garantie et présence internationales.
Faudra-t-il accepter, pour aboutir au compromis historique, certaines modifications de frontières? Pourquoi faudrait-il s’arc-bouter sur l’intangibilité de frontières tracées au cordeau par les anciennes puissances coloniales? Toutes les perspectives de solutions possibles doivent devenir négociables.
La tragédie vécue par les chrétiens d’Orient à Mossoul et par toutes les minorités à Sinjar met en lumière le péril dans toute son ampleur. Il n’est que temps pour les instances internationales, face au chaos contagieux et aux tragédies toujours plus terribles, de mettre en échec le projet du totalitarisme islamique hégémonique en imposant un compromis régional historique entre chiisme et sunnisme modéré garantissant la stabilité et les droits des minorités.
Source: le figaro.fr publié le 08/08/2014