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Nucléaire iranien : entretien avec l’ambassadeur d'Iran en France (Partie 1)

Les décideurs de l’Occident se posent des questions sur la stratégie nucléaire de l’Iran. Du 18 au 24 novembre a lieu à Vienne une conférence entre l’Iran et les six médiateurs internationaux (Russie, Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Allemagne) pour trouver un accord avec l’Iran.

Un accord historique dans le dossier nucléaire iranien est possible à moins que les grandes puissances ne formulent des « demandes excessives », a annoncé mardi le ministre iranien des Affaires étrangères Javad Zarif. Dans un entretien avec Ali Ahani, ambassadeur d’Iran à Paris, nous parlons du contexte, des enjeux de cette réunion de Vienne afin d’avoir la version iranienne pour comprendre les enjeux sous l’angle iranien.

 Javad Zarif pense à la possibilité d’un accord si les grandes puissances ne formulent pas des « demandes excessives ». Quelles demandes seraient ou sont excessives ?

Ali Ahani : Compte tenu du caractère pacifique du programme nucléaire iranien, du respect de la République islamique d’Iran envers ses engagements internationaux à l’égard du Traité de Non Prolifération nucléaire (TNP) et du caractère obligatoire du Fatwa (instruction religieuse) du Guide Suprême de la Révolution islamique prohibant la production, le stockage et l’utilisation des armes nucléaires, en ce qui nous concerne, la poursuite des activités nucléaires iraniennes ne doit provoquer aucune inquiétude. La non prise en compte des réalités et des besoins d’enrichissement dans le programme nucléaire iranien et la demande du groupe 5+1 pour réduire de manière excessive et inacceptable le nombre de centrifugeuses nécessaires et leur manière irréaliste concernant la levée des sanctions injustes qui ont été imposées au peuple iranien, sont quelques uns des obstacles pour aboutir plus rapidement à un accord définitif à Vienne.

Quels sont les souhaits de l’Iran pour signer cet accord ?

Ali Ahani : La signature d’un accord implique le respect envers les droits légitimes du peuple iranien pour profiter de la technologie nucléaire pacifique dans le cadre du TNP, à l’instar des autres membres de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA).

 Une nation libre fait ce qu’elle veut ! Est-ce qu’un accord est vraiment utile ?

Ali Ahani : Le peuple iranien qui est héritier d’une civilisation plusieurs fois millénaire et d’une culture extrêmement riche, tout en insistant sur son indépendance politique, respecte ses engagements internationaux et souhaite aboutir à un accord avec le Groupe 5+1 qui permet de créer la confiance mutuelle.

LVdlR : Comment juge la diplomatie iranienne le contexte de cette conférence de Vienne ?

Ali Ahani : Jusqu’à maintenant, notre analyse est fondée sur le souhait des deux parties d’aboutir à un accord car ainsi, les intérêts communs des parties seront assurés et le terrain deviendra favorable pour des coopérations profitables et constructives des différents pays avec l’Iran.

 Quelles nations formulent des demandes excessives ?

Ali Ahani : Certains des membres du Groupe 5+1, tout en souhaitant aboutir à un accord avec l’Iran, font face aux pressions exercées sur eux par, d’une part, certains courants internes à leur pays, et d’autre part des pressions exercées par des tierces parties, ce qui limite leurs marges de manœuvre et par conséquent, ils tentent, par des exigences excessives, de réduire ces pressions.

Quelle puissance mondiale est la plus à l’écoute de l’Iran aujourd’hui ?

Ali Ahani : Dans le cadre des négociations, il est normal que chaque partie essaie de prendre en compte ses propres intérêts, mais pour aboutir à un accord, les parties doivent avoir une approche réaliste et faire preuve d’adaptabilité, tentant de rapprocher les points de vues des deux parties en prenant en compte les lignes rouges respectives. /N

Quel est le rôle de la Russie dans le développement du nucléaire en Iran ?

Ali Ahani : La politique ferme des pays occidentaux dans la coopération nucléaire avec l’Iran a offert à la Russie une opportunité favorable pour développer et renforcer ses coopérations avec l’Iran, ce que nous accueillons favorablement. Mise à part l’achèvement de la construction et la mise en marche du réacteur nucléaire de Bushehr, la Russie a finalisé dernièrement un contrat pour la construction de deux autres réacteurs nucléaires en Iran et est en train de préparer actuellement les préparatifs pour la construction de six autres réacteurs nucléaires. Dès lors, la Russie a dépassé les autres puissances nucléaires, ce qui ne doit pas être au goût de ses derniers. En effet, alors que l’économie de l’Occident est en crise et que le chômage croît de manière inquiétante, la Russie a réussi à priver les pays occidentaux d’excellentes opportunités en Iran.

Quelle position devrait adopter la France vis à vis de l’Iran dans ce dossier ?

Ali Ahani : La France bénéficie dans ce domaine d’un poids politique et d’une compétence technologique de haut niveau et pourra, par des initiatives constructives et en jouant un rôle actif digne du grand peuple français, œuvrer de manière précieuse pour qu’on aboutisse plus rapidement à un accord. C’est là l’attente envers la France.

L’objectif est-il d’avoir la bombe atomique comme les autres puissances sinon l’Iran renoncerait à ses droits et à la grandeur de la nation ?

Ali Ahani : Considérant le Fatwa du Guide Suprême de la Révolution islamique et les engagements internationaux de l’Iran, l’arme nucléaire n’a aucune place dans la doctrine défensive de la République islamique d’Iran et nous ne croyons nullement dans le principe de la dissuasion nucléaire. Notre objectif est l’utilisation totalement pacifique de la technologie nucléaire sous la supervision de l’AIEA.

Que dites vous à Israël et à l’Occident qui s’inquiètent de vos projets nucléaires ?

Ali Ahani : Ainsi que je l’ai précisé précédemment, la supervision de l’AIEA des activités nucléaires de la République islamique d’Iran ne laissera plus aucune place pour l’inquiétude.

Quel est l’objectif de l’Iran avec le nucléaire ?

Ali Ahani : L’objectif du programme nucléaire pacifique de la République islamique d’Iran est d’assurer au moins une partie du combustible nécessaire pour les réacteurs nucléaires, produire les isotopes médicaux nécessaires pour le traitement des malades cancéreux ainsi qu’assurer les besoins du pays dans les domaines énergétiques et agricoles qui sont totalement pacifiques.

 Qu’est-ce-que nos lecteurs doivent savoir des volontés de la diplomatie iranienne dans un monde devenu très instable, dans lequel l’Otan et les pays occidentaux menacent et provoquent la Russie ?

Ali Ahani : L’expérience du passé a démontré que les menaces, les provocations et les sanctions n’ont jamais eu l’efficacité nécessaire pour résoudre les difficultés et les crises régionales et internationales. Les racines des crises actuelles doivent être analysées et identifiées afin qu’en les prenant en compte, l’on soit en mesure de trouver les solutions adéquates par le biais de consultations avec des objectifs précis entre les pays et les acteurs qui peuvent avoir un rôle efficace, garantissant ainsi la paix et la stabilité et la sécurité dans la région et dans le monde. Dans cette voie, la République islamique d’Iran est parfaitement disposée à coopérer en utilisant ses capacités et potentiels diplomatiques. /N


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