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Budget, mesures fiscales, résidences secondaires, session de rattrapage, Taxes
Par Patrick Roger

Promis, juré, à partir de 2015, « il n’y aura plus d’impôts supplémentaires sur qui que ce soit ». C’est François Hollande qui l’a dit, le 6 novembre sur TF1. Et le ministre des finances, Michel Sapin, de préciser, dans son entretien au Monde daté du 4 décembre, que « hormis les mesures intégrées dans les textes en cours, plus aucune autre mesure d’impôt ne sera prise pour 2015, 2016 et 2017 ». Liés par cet engagement au plus haut niveau, les députés se sont dépêchés d’effectuer, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative qui doit être voté mardi 9 décembre à l’Assemblée nationale, un dernier plein de taxes.
Ce collectif budgétaire s’apparente à une session de rattrapage pour projets en manque de financement. Il a fallu en premier lieu intégrer dans ce texte plusieurs mesures fiscales permettant de boucler les 3,6 milliards d’euros de réduction supplémentaire du déficit adressés in extremis à la Commission européenne pour échapper à des sanctions. C’est l’objet, notamment, des mesures de renforcement de la lutte contre la fraude fiscale, en particulier la fraude à la TVA dans des secteurs « à risques ».
Le gouvernement a mis les banques et les sociétés d’assurance à contribution. Celles-ci ne pourront désormais plus déduire de leur résultat imposable un certain
nombre de taxes. Lanon-déductibilitéde la taxe sur les locaux à usage commercial en Ile-deFrance devrait rapporter 85 millions d’euros en 2015, 290 millions en 2016 et 185 millions en 2017.
La non-déductibilité de la taxe sur les excédents de provisions des entreprises d’assurances devrait avoirun rendement de 25 millions d’euros en 2015, 35 millions
en 2016 et 30 millions à compter de 2017- Plus significatif est le produit attendu pour le budget de l’Etat de la non-déductibilité des différentes contributions aux
fonds de résolution des risques systémiques. Il est estimé à 280 millions d’euros en 2015, 340 millions en 2016 et 210 millions en 2017.
Le projet de loi prévoit une majoration de 20 %de la taxe sur les logements non affectés à l’habitation principale, dite Il taxe sur les résidences secondaires », dans les zones tendues marquées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements. Celle-ci s’appliquera dans 727 communes, sauf en cas de délibération contraire du conseil municipal. Elle devrait rapporter aux communes et intercommunalités concernées 100 millions d’euros à partir de 2015·
Cris d’orfraie
En revanche, ne figurait pas dans le texte initial l’amendement adopté mardi 2 décembre dans la soirée, la veille de l’annonce de M. Sapin, majorant de 50%la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom). Ses auteurs, MarieFrançoise
Bechtel (MRC, Aisne) et Eva Sas (EELV, Essonne) n’ont pas caché que cette mesure était destinée à contrebalancer l’effet positif du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) dont bénéficie la grande distribution. Elle pourrait rapporter de l’ordre de
200 millions d’euros. Le gouvernement s’y est déclaré favorable.
A l’initiative d’Olivier Faure (PS,Seine-et-Marne), un amendement a été adopté, vendredi, en fin de discussion, qui cette fois met à contribution les societes
d’autoroute. Celles-ci bénéficient en effet d’un régime avantageux, s’appliquant aux délégataires de service public, qui leur permet de déduire intégralement leurs intérêts d’emprunt.
L’amendement prévoit de leur appliquer le droit commun en plafonnant à 75 % la déductibilité des charges financières, ce qui rapporterait à l’Etat un peu plus de 60 millions d’euros. Le gouvernement, actuellement engagé dans une: négociation Il vigoureuse » avec les sociétés d’autoroute, a émis un avis défavorable, craignant que cela ne conduise à une hausse des tarifs de péage. Il n’a pas été suivi par la majorité.
Enfin, l’assemblée nationale a adopté un amendement destiné à asseoir le financement du Pass Navigo à tarif unique en Île-de-France. Celui-ci autorise le Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF) à relever le taux du versement
transport des entreprises.
Autant de mesures fiscales dont l’objet est identifié et correspond à de réels besoins, mais qui ne vont pas manquer de provoquer des cris d’orfraie du côté patronal. Au-delà de ces réactions, elles montrent aussi à quel point l’engagement
présidentiel sera difficile à tenir.