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Maurice Duverger, politologue et spécialiste du droit constitutionnel, a formé des générations de juristes. Il a fondé le premier Institut d’Etudes Politiques à Bordeaux.
Son nom est connu de tous les étudiants en sciences politiques en France mais aussi à l’étranger. « Le scrutin majoritaire à un seul tour tend au dualisme des partis» tandis que « le scrutin majoritaire à deux tours ou la représentation proportionnelle tendent au multipartisme », écrivait-il dans son célèbre traité sur « Les partis politiques », publié pour la première fois en 1951 et maintes fois réédité. Ces lois ont résonné dans les amphis de droit constit’ depuis des décennies. Maurice Duverger, politologue et juriste éminent, est décédé à l’âge de 97 ans, a annoncé lundi sa famille dans le carnet du Monde.
Commenter Duverger dans @leMonde ou Thémis, notre dernier chic d’étudiants. Je le croyais de papier impérissable. Il était de chair ! ChT
— Christiane Taubira (@ChTaubira) 22 Décembre 2014
Pensées pour mon ancien prof de sciences politiques Maurice Duverger qui vient de mourir.Il m’a donné le goût de la sociologie politique .
— christine Boutinن (@christineboutin) 22 Décembre 2014
Ancien professeur émérite à la Sorbonne, ancien directeur d’études et de recherches à la Fondation nationale des sciences politiques, cet universitaire était l’auteur d’une trentaine d’ouvrages. Outre des manuels d’enseignement supérieur tels que « Institutions politiques et droit constitutionnel » (1966), ou « la Cinquième République » (1968), et des essais politiques, il a publié plusieurs ouvrages de vulgarisation comme « Les Régimes politiques » (1965) ou « La Cohabitation des Français » (1987). Il a aussi été député européen (1989-94), élu sur la liste du Parti communiste italien (PCI).
Liens avec le parti populaire français
La politique l’a toujours passionné. A 16 ans, Maurice Duverger adhère à l’Union populaire républicaine, dirigée par Philippe Henriot, le futur ministre de la propagande de Vichy. Trois ans plus tard, il rejoint le Parti populaire français de Jacques Doriot. Ce n’est pas encore un mouvement fasciste mais une formation populiste, antiparlementaire, où les antisémites donnent de la voix. Maurice Duverger est promu secrétaire de la Fédération du Sud-Ouest des jeunes doriotistes, l’Union populaire de la jeunesse française. « Tout cela, écrira-t-il dans un livre de souvenirs, était idéaliste et irréaliste. J’avais vingt ans » (« L’Autre côté des choses », 1977).
A deux reprises, l’attitude de Maurice Duverger durant les premières années de l’occupation sera mise en cause. En 1987, le magazine Actuel l’avait accusé d’avoir fait preuve d’antisémitisme dans un commentaire de la revue de Droit public, en 1940-41, sur le statut des juifs. Maurice Duverger avait gagné un procès en diffamation contre le mensuel, le tribunal estimant que son commentaire de l’époque n’impliquait aucune approbation de la loi de Vichy. En 2003, la revue L’Histoire lui reprochait d’avoir écrit sous un pseudonyme pour un journal collaborationniste de Bordeaux.
« Un grands penseur »
Mais Maurice Duverger n’est pas resté longtemps au PPF : il quitte ce mouvement d’extrême-droite en 1938 pour se consacrer à sa deuxième passion : le droit. Agrégé de droit public, Maurice Duverger devient professeur aux facultés de droit de Poitiers (1942-43), puis de Bordeaux (1943-45). Il fonde le premier Institut d’études politiques (IEP), à Bordeaux, qu’il dirige entre 1948 et 1955. L’actuel directeur de l’IEP de Bordeaux, Vincent Hoffmann-Martinot, a salué « un des très grands penseurs en sciences politiques de la deuxième moitié du XXe siècle ». A partir de 1955, il est professeur à l’université de Paris I, dont il dirige de 1969 à 1975 le département des sciences politiques.
Parallèlement à sa carrière d’universitaire, il débat de la vie publique dans divers journaux et revues. Il est notamment chroniqueur au Monde à partir de 1946, collaborateur de L’Express (1954-65), puis du Nouvel Observateur, ainsi qu’éditorialiste des quotidiens italien et espagnol, Corriere della Sera et El Pais.
Partisan du régime présidentiel
Dès la publication de son premier livre, « La Constitution de la France » (1944), Maurice Duverger, est partisan du système présidentiel favorisant le dualisme droite-gauche et l’alternance, condition selon lui, d’une démocratie qui ne serait plus une « démocratie sans le peuple ». Il est aussi à l’origine du concept de régime semi-présidentiel regroupant les régimes mixtes empruntant certaines caractéristiques aux régimes parlementaires et aux régimes présidentiels. Candidat à deux reprises à l’Académie française (1978 et 1987), Maurice Duverger était grand officier de la Légion d’honneur et commandeur de l’ordre national du mérite.