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David Revault d’Allonnes

François Hollande politiquement éprouvé, François Hollande « personnellement touché », mais François Hollande indéniablement relancé. « Je me sens plus fort, plus ferme », a glissé ce week-end le président à ses proches. Dans un champ politique sonné encore par l’effet de souffle des attentats, la solidification de la position présidentielle s’avère indiscutable. En témoignent ses courbes sondagières qui, après deux ans et demi d’une descente aux enfers qui semblait inéluctable, connaissent un rebond attendu mais spectaculaire : le chef de l’Etat progresse de 21 points dans une étude IFOP pour Paris Match, atteignant les 40 % de satisfaits. Une hausse historique que d’autres enquêtes devraient rapidement confirmer.
« Le pays a changé, le regard qu’il porte sur ma présidence aussi, explique M. Hollande au Monde. Une épreuve comme celle-là change également celui qui, au plus haut niveau de l’Etat, a dû l’affronter. La France est sortie plus forte de cette tragédie. J’ai moi-même été conforté dans mes convictions et dans la fierté que je porte dans les valeurs de notre République. Mais je suis conscient que ce sera toujours sur les questions de résultats économiques et sociaux et de confiance dans l’avenir que les Français exprimeront le moment venu leur choix. » Comment gouverner, donc, après janvier 2015 ? Où précisément placer le curseur, entre la gestion de l’après-crise et le retour aux priorités d’avant ?
Antiterrorisme et éducation
« Quels sont les risques? Le premier serait de tourner la page, repasser aux affaires courantes, faire comme si rien ne s’était produit, poursuit M. Hollande. Après cette
attaque et ce sursaut exceptionnel, la vie doit continuer, mais pas comme avant. Deuxième risque:
concentrer toute l’action gouvernementale sur le seul sujet du terrorisme.
Certes, il est impératif de tirer toutes les conséquences de ce que révèlent ces terribles crimes et de garantir la sécurité des Français. Mais cet événement doit nous donner encore plus d’audace dans l’action réformatrice que j’ai engagée avec le premier ministre. Nous devons nous élever collectivement. «
De fait, le retour aux affaires courantes se révèle difficile. Si,dimanche 18 janvier, le président a téléphoné à plusieurs leaders syndicaux, afin de préparer ses veux
Le risque serait de tourner la page, repasser aux affaires courantes, faire comme si rien ne s’était produit»
aux forces vives, économiques et sociales qu’il devait prononcer lundi, ceux-ci, tout comme ceux aux corps constitués et aux bureaux des assemblées, le lendemain,
seront bien sûr empreints de 1’« esprit du 11 janvier».
L’agenda de l’exécutif, cette semaine,sera focalisé sur la lutte contre le terrorisme et les questions éducatives. La loi Macron, comme celle sur la santé ou le débat sur la fin de vie, est clairement passée au second plan. Signe des temps : le passage du ministre de l’économie à l’émission « Des Paroles et des actes», jeudi sur
France 2, est reporté. Il s’y verra remplacé par ses collègues de l’intérieur
et de l’éducation nationale, Bernard Cazeneuve et Najat Vallaud-Belkacem.
Ce lundi, François Hollande et Manuel Valls devaient arbitrer,lors de leur déjeuner hebdomadaire,les mesures antiterroristes qui seront annoncées par le chef
du gouvernement en personne à l’issue du conseil des ministres de mercredi: mesures réglementaires facilitant le travail du renseignement,dont un assouplissement administratifpour les écoutes téléphoniques, programme de
surveillance des déplacements des suspects, renforcement des moyens en effectifs et investissements, notamment technologiques. Ce même lundi, M.Hollande
devait se rendre à l’urgence France-Presse, qui fête ses 70 ans, pour
parler « liberté et indépendance de la presse « .
Mercredi, le président se saisira des « propositions concrètes » qu’il a demandées à la ministre de l’éducation pour ses voeux au monde éducatif. Le lendemain, il
accordera – « pour s’adresser aux jeunes » – une interview au journal
pour enfants Mon quotidien, où le dessinateur Charb avait oeuvré au début de sa carrière.
« Garder la main sur le sujet»
L’hypothèse d’une cérémonie d’hommage national avec les familles des victimes, aux Invalides, ayant été abandonnée à la demande de ces dernières, celui-ci
sera rendu à l’Élysée – « dans l’intimité et à huis clos » – avec une remise de décorations à titre posthume, le week-end prochain.
Même son discours au Forum économique mondial de Davos, vendredi après-midi, fournira l’occasion à François Hollande de parler « paix et sécurité », « On ne
peut pas,d’un coup d’un seul, dire qu’il n’y a plus que l’union nationale et
le régalien après avoir expliqué pendant deux ans que la priorité, c’ëtait l’économique et le social. Mais on veut clairement occuper le terrain et garder. la main sur le sujet caron pense que les Français attendent cela. Il’y a des mots que l’on doit continuer à prononcer, dans toutes les prises de parole, sur la liberté, la lutte contre les amalgames,l’unité « , explique un proche du chef de l’Etat.
Sa conférence de presse semestrielle,initialement programmée fin janvier, a quant à elle été reportée au mardi 3ou au jeudi 5février afin de laisser ses ministres se déployer d’ici là. De ces journées de crise intense et de «fusion » qu’a connues l’exécutif, le président est sorti avec la nécessité d’une « grande coordination « , a-t-il répété à son équipe. « Il faut que l’on sache quelle est la place de chacun. « Fort de l’élan des derniers jours, M. Hollande, qui s’attend voir ses principaux adversaire
Marine Le Pen et Nicolas Sarkoz se focaliser sur le thème de l’islam entend pour sa part « utiliser positivement une énergie, comme la poussée d’une fusée « , estime un de ses conseillers.
Le président cultive donc l’espoir d’un durable retournement de situation politique. « Ceux qui voulaient faire du « French bashing » pour faire du « Hollande bashing ont atteint leur payse n voulant atteindre Hollande, dit un de ses intimes. Aujourd’hui, même ceux qui ne l’aiment pas sont pris dans nouveau regard porté sur le président .Car le regard que le pays porte sur le président est le regard qu’il porte sur lui-même. » François Hollande en est persuadé, pour lui comme pour le pays, « rien ne sera plus comme avant « .