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 Par Alexis Delcambre

Patrick Drahi, propriétaire d’Altice, la maison mère de Numericable, le 20 novembre 2013, à Paris.

C’est une surprise. Selon nos informations confirmant celles obtenues par l’AFP, jeudi 12 février, le patron du groupe de télécoms Altice – Numericable, Patrick Drahi, et son associé, Marc Laufer, vont acquérir l’ensemble des magazines français que détient le groupe Roularta, soit le cinquième pôle français de presse magazine.

Avec cette acquisition, les deux hommes, déjà co-actionnaires de Libération, prennent une place croissante dans le paysage médiatique français.

Jusqu’ici, le périmètre des négociations exclusives entre les deux parties, ouvertes le 8 janvier, ne portait que sur une partie des magazines, dont L’Express, mais aussi sur Mieux vivre votre argent, Lire, Classica, Pianiste, Ciné Live, le site L’Entreprise, l’organisation de salons de recrutement Job Rencontres et le portail Distrijobs.

De son côté, le groupe belge Roularta entendait conserver son pôle Education (autour de L’Etudiant), Point de vue et son pôle Art de vivre, notamment avec le site cotemaisons.fr, les magazines Côté Sud, Côté Ouest, Côté Est, Côté Paris, ou encore Maison française Magazine. Ces titres avaient d’ailleurs, un temps, été convoités par Le Figaro.

Il semble que les lignes aient bougé ces derniers jours et que MM. Drahi et Laufer aient trouvé les arguments pour convaincre Rik de Nolf, le patron de Roularta, de renoncer à sa présence française. Aucune confirmation officielle n’avait été faite, jeudi matin. Mais, selon nos informations, le comité d’entreprise avait été réuni en début de matinée et une réunion générale d’information devait se tenir au siège de L’Express, à 10 heures. Un communiqué de Roularta était également attendu.

Une dépréciation radicale

Pour le groupe belge, cette cession vient clore une décennie au bilan négatif. En 2006, Roularta avait déboursé plus de 210 millions d’euros pour acquérir ces magazines. Las, en raison de la baisse des recettes publicitaires et des ventes, ce pôle s’est mis à accumuler des pertes récurrentes, que des plans sociaux à répétition n’ont pu entraver. En 2013, le groupe belge avait ainsi accusé une perte nette de 57,9 millions d’euros, principalement due à ses magazines français.

Dès lors, la cession était devenu une option sérieuse et les rumeurs de vente se sont multipliées. Mais les discussions ont souvent achoppé sur le prix, Roularta refusant de brader son actif, malgré se dépréciation. Il est peu probable que le montant payé par MM. Drahi et Laufer soit divulgué, mais les transactions récentes dans le domaine des magazines se sont chiffrées au mieux en dizaines de millions d’euros.

Cette acquisition, quelques mois après la reprise de Libération, témoigne de l’appétit du propriétaire d’Altice et de son associé Marc Laufer, passé notamment par les groupes NRJ et NextRadioTV. Les deux hommes ont pour objectif la constitution d’un groupe de médias puissant et diversifié.

Outre Libération et les magazines de Roularta, ce groupe doit inclure la chaîne d’information en continu i24news, lancée en Israël par Patrick Drahi, et le groupe de presse professionnelle NewsCo, créé par M. Laufer. Certains observateurs pointent l’hétérogénéité de ces titres, aux cultures éditoriales dissemblables. Mais les deux hommes avancent. Ils auraient choisi un nouveau nom pour leur groupe, Altice Media Group, et non plus Mag & NewsCo, comme initialement annoncé.

Ils ne sont pas pour autant attendus comme des sauveurs. Le 17 janvier, dans un communiqué, les rédactions s’étaient alarmées des négociations en cours, estimant que « la gestion de Patrick Drahi dans le secteur des médias et celle de Marc Laufer se sont caractérisées par une politique low cost doublée de plans de départs massifs ». Le pôle des magazines français de Roularta comprend aujourd’hui 720 personnes environ, dont 330 journalistes, hors pigistes et CDD.

http://www.lemonde.fr