Dans un contexte d’explosion des actes antisémites, François Hollande avait prévu de profiter de la 30e édition du dîner du Crif, lundi soir, pour préciser les axes de son plan contre l’antisémitisme et le racisme. Mais, avant même que les quelque 700 invités du Conseil représentatif des institutions juives de France arrivent à l’hôtel Pullman-Montparnasse, où le dîner avait été déplacé cette année pour des raisons de sécurité, son président, Roger Cukierman, s’est retrouvé sous les tirs croisés d’une partie de la gauche, du FN et du Conseil français du culte musulman (CFCM).

En cause: ses déclarations lundi matin sur Europe 1. «Le Front national est un parti pour lequel je ne voterai jamais», a-t-il expliqué, en affirmant que «derrière Marine Le Pen, qui est irréprochable personnellement, il y a tous les négationnistes, tous les vichystes, tous les pétainistes». Selon lui, lorsqu’on parle d’antisémitisme, «il faut dire les choses : toutes les violences aujourd’hui sont commises par des jeunes musulmans». «Pas du tout choqué» par le terme «islamofasciste» utilisé à plusieurs reprises par Manuel Valls, et qui, d’après lui, «correspond assez bien à la réalité», le président du Crif a précisé qu’il visait «une toute petite minorité de la communauté musulmane, de l’ordre du 1 pour 1000», contre laquelle il fallait «absolument que  les musulmans eux-mêmes se mobilisent».

Le premier à réagir a été Alexis Bachelay, sur LCI. Il a accusé Roger Cukierman d’«ouvrir la porte au FN» et de se transformer «en allié objectif du Front national»: «Il dédouane le FN de son passé antisémite en disant que Marine Le Pen serait différente de son père, alors qu’elle n’a jamais condamné aucun des dérapages antisémites de son père, a-t-il affirmé. Ensuite, il fait un amalgame odieux entre des actes antisémites qu’il attribue exclusivement à une catégorie de personnes qu’il désigne par leur religion. Il ethnicise.»

Des déclarations qui agacent

Le député des Hauts-de-Seine a appelé François Hollande et tous les responsables politiques à «boycotter le dîner du Crif». Sur Twitter, Cukierman a précisé que Marine Le Pen était «irréprochable juridiquement, jamais condamnée pour antisémitisme, mais infréquentable», car elle ne «s’est jamais désolidarisée des propos de son père». En revanche, il n’a pas jugé utile de préciser que les violences antisémites n’émanaient pas exclusivement de jeunes musulmans, comme on l’a vu au cimetière de Sarre-Union, profané par un groupe dont le meneur se revendique «antifasciste».

Au Front national, les déclarations de Roger Cukierman ont beaucoup agacé Louis Alliot. «Les leçons d’“infréquentabilité” du communautariste CRIF nous honorent. Mais qui représente-t-il aujourd’hui?» a tweeté le vice-président du FN. Plus outré encore, Dalil Boubakeur, président du CFCM, a fait savoir qu’il ne participerait pas au dîner, en jugeant «aussi graves qu’infondées les attaques contre la composante musulmane de France».

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