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Par Benjamin Barthe

Après le Sud-Liban, où il fait face à Israël, la frontière syro-libanaise, où il lutte contre les infiltrations terroristes, et l’intérieur même de la Syrie, où il combat aux côtés des forces pro-Assad, le Hezbollah se déploie sur un quatrième front : l’Irak. Dans un discours diffusé lundi 16 février, le secrétaire général du mouvement chiite libanais, Hassan Nasrallah, a admis que ses forces étaient présentes dans ce pays. L’implication du « Parti de Dieu » n’était plus un secret depuis juillet, quand la dépouille d’un de ses commandants, tué par le groupe Etat islamique, près de Mossoul, avait été rapatriée et inhumée au Liban. Un mois plus tôt, Nasrallah s’était dit prêt à « sacrifier en Irak cinq fois plus de martyrs qu’en Syrie pour le bien des lieux saints [chiites] car ils sont beaucoup plus importants ».
créés par lesGardiens de la révolution iraniens, comme Kataeb Hezbollah
[« les phalanges du Hezbollah »], qui est un clonedu Hezbollahlibanais.»
alors les « groupes spéciaux».Très vite, les techniques de guérilla développées
par le Hezbollah dans les combats contre les troupes israéliennes dans le sud du Liban avaient été réemployées par les Irakiens dans la lutte contre l’occupation
américaine. Parmi les formations paramilitaires couvées par leHezbollah figuraient non seulement Kataeb Hezbollah, mais aussi Asaib Ahl Al-Haq (la « Ligue des vertueux », en arabe),devenue l’une des milices chiites irakiennes les plus puissantes.
Le maître d’oeuvre de ce programme clandestin, le Libanais Ali Moussa Dakdouk, fut arrêté en 2007, à Bassora,pour son implication supposée dans une attaque
contre une base américaine.L’opération, l’une des plus audacieuses menées par Asaib Ahl Al-Haq, s’était soldée par la capture et l’exécution de cinq soldats américains.
Mais en 2012, au grand dam de Washington, un tribunal irakien blanchit et libéra Dakdouk, que l’on dit rentré au Liban.
De retour en Irakau grand jour,le Hezbollah pourrait y prendre une place croissante. En Syrie,son enrôlement avait d’abord été secret, maintenu dans des proportions modestes, avant qu’Hassan Nasrallah ne le reconnais se et que les
renforts affluent, au point que le « Parti de Dieu » est devenu l’indispensable
béquille de Damas. La situation n’est pas la même entre l’Euphrate et le Tigre, ne serait-ce parce que de nombreuses milices chiites participent déjà aux combats.
Mais !’incapacité de la coalition internationale à faire reculer l’El et ses métastases éclairs, notamment en Libye, pousse le Hezbollah à assumer un rôle régional
de plus en plus important, dans le sillage de son tuteur iranien.
Dans son discours de lundî, Hassan Nasrallah a mis la lutte contre les mouvements extrémistes sunnites comme l’El au même plan, ou presque, que la confrontation
avec Israël, pourtant l’ennemi désigné contre lequel son mouvement a été fondé. Répondant indirectement à l’ex-premier ministre sunnite Saad Hariri, qui l’avait appelé le samedi précédent, lors du 10′ anniversaire de l’assassinat de son père Rafic, à se retirer de Syrie,le dirigeant au turban a rejeté cette demande et lancé sur le ton du défi: « Allons ensemble[combattre] en Irak. »
L’officialisation de la présence du Hezbollahrisque d’avoirun effet à double tranchant. Elle pourrait galvaniser aussi bien les forces pro Bagdad, ravies de voir débarquer un alliéaussi expérimenté, que les djihadistes, pressés d’en découdre avec leur bête noire. Hezbollah contre Etat Islamique: le ProcheOrient se prépare pour un duel qui promet d’être dévastateur.