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  • Par  BASLE Jean-Luc
 L’Ordre exécutif du 9 mars 2015, signé par le président Obama, considère que « la situation au Venezuela constitue une menace inhabituelle et extraordinaire à la sécurité nationale et à la politique étrangère des Etats-Unis ».
En conséquence, compte tenu de l’engagement des Etats-Unis « à défendre les libertés individuelles, à sauvegarder les institutions démocratiques, et à protéger le système financier américain des transactions financières illicites vénézuéliennes », des sanctions sont imposées à sept vénézuéliens. Ce n’est pas d’un canular mais il faut se pincer pour y croire. Quel danger le Venezuela peut-il bien poser aux Etats-Unis ? Examinons les données de la CIA.

Etats-Unis Venezuela
Population 318,9 millions 28,9 millions
Produit intérieur brut (PIB) $16.720 milliards $367,5 milliards
PIB/habitant $52.800 $13.600
Production pétrolière 11,1 millions de barils jour 2.5 millions de barils jour
Budget de la défense 4,35% PIB
$836 milliards
1,05% PIB
3,9 milliards
Armement nucléaire 7.000 ogives nucléaires néant

Source : Central Intelligence Agency

Le Produit intérieur brut (PIB) vénézuélien est quarante-cinq fois inférieur au PIB américain. Comment la corruption financière vénézuélienne pourrait-elle menacer la finance américaine ? La production pétrolière du Venezuela est quatre fois inférieure à celle des Etats-Unis. Son budget militaire est deux cent fois inférieur à celui des Etats-Unis. Le pays ne dispose pas de l’arme atomique. Son armée est squelettique, et sa marine et son aviation inexistantes. Où est le danger ?

Quelle légitimité les Etats-Unis ont-ils en matière de libertés individuelles au vu du récent rapport du Sénat sur la torture, des écoutes de la NSA, de Guantanamo, d’Abu Ghraib, de l’Irak, de la Libye, des drones, des exactions de la police américaine à l’égard des noirs (Ferguson, Cleveland, Staten Island), du soutien accordé à Saddam Hussein du temps où il combattait l’Iran, des décapitations de son allié, l’Arabie Saoudite ?
Qui a oublié cette phrase de Madeleine Albright, ministre des affaires étrangères, affirmant que la sécurité des Etats-Unis valait bien la mort de 500.000 enfants irakiens ? (1)

Le Venezuela ne présente aucun danger pour »la sécurité nationale et la politique étrangère des Etats-Unis ». C’est une évidence. Affirmer cela ne signifie pas que la politique de Nicolas Maduro est bonne. Elle est déplorable. Mais cela ne donne pas le droit aux Etats-Unis d’encourager l’opposition vénézuélienne dans le but de renverser un président démocratiquement élu, pas plus que les erreurs et manquements de la politique intérieure et extérieure américaine ne donnent le droit à la Russie ou à la Chine d’inciter les Américains à se révolter contre Barack Obama.

« Le souverain est celui qui décide des exceptions », disait Carl Schimitt en 1922. Les Etats-Unis ne cessent de se conduire en puissance hégémonique. Le président américain en fait une nouvelle fois la preuve en s’en prenant au Venezuela. C’est un changement de régime que Barack Obama veut imposer, comme il le fit en Honduras en 2009 en déposant un président démocratiquement élu, et comme les Etats-Unis l’ont fait de nombreuses fois dans le passé. (2)

(1) 60 minutes, 5 décembre 1996
(2) La France a pratiqué la même politique en Afrique.