Le gouvernement grec d’Alexis Tsipras a fait voter mercredi sa première loi depuis son arrivée au pouvoir: destinée à aider les foyers les plus durement touchés par la crise, son adoption en pleines négociations avec l’Europe irriterait la Commission européenne.

Le ministre grec Alexis Tsipras, le 13 mars 2015 à Athènes
En plein bras de fer avec Bruxelles et ses partenaires européens, le gouvernement grec de gauche radicale a fait voter mercredi une loi qui vise à secourir les foyers les plus démunis et les plus touchés par la crise. Mais ce texte, qui répond aux promesses électorales du gouvernement issu des législatives de fin janvier, serait vu d’un mauvais oeil par la Commission européenne.
Il s’agit en fait de la première loi « du gouvernement de salut national » comme l’a souligné dans son discours le Premier ministre Alexis Tsipras. Les deux principaux partis d’opposition, Nouvelle Démocratie (conservateurs) et PASOK (socialistes) l’ont approuvé aux côtés de la coalition Syriza-Grecs indépendants au pouvoir.
Aide alimentaire et au logement
Le texte prévoit la fourniture d’électricité gratuite aux plus pauvres, d’une aide au logement pour 30.000 foyers et d’une aide alimentaire pour 300.000 personnes. Il comprend également une aide pour les personnes qui ont perdu leur emploi ces derniers mois et sont privées de sécurité sociale.
Son adoption intervient la veille du sommet européen à Bruxelles, en marge duquel Alexis Tsipras a demandé à rencontrer le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, le président de la BCE, Mario Draghi, la chancelière allemande Angela Merkel, et le président français François Hollande. Il s’agit de trouver « une solution politique » sur la Grèce et débloquer une dernière tranche de prêts, vitale pour le pays qui est à court d’argent.
Toutefois, les partenaires de la Grèce semblent perdre patience, soulignant que peu de progrès ont été faits ces derniers jours sur les négociations entre Athènes et Bruxelles. Jean-Claude Juncker a réitéré lors d’une conférence de presse mercredi à Bruxelles qu’il était « inquiet » à propos de la Grèce et qu’il « n’était pas satisfait des progrès réalisés au cours des derniers jours ». A Berlin, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a indiqué que « le temps était compté » pour la Grèce.
Depuis la semaine dernière, des experts techniques de Bruxelles et d’Athènes essaient de trouver un terrain commun pour faire avancer les réformes qui ont été convenues lors de l’accord du 20 février passé entre la Grèce et ses créanciers, UE et FMI, sur la poursuite de l’aide au pays d’ici fin juin.
Une loi décidée de façon « unilatérale »
Mardi soir, le gouvernement avait soudain durci le ton contre la Commission européenne après des informations de presse affirmant que Bruxelles tiquait sur le vote du projet de loi humanitaire, jugeant qu’il s’agissait d’une action « unilatérale » en désaccord avec l’accord de l’Eurogroupe du 20 février. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Sakellaridis a dénoncé mercredi un « veto », une « pression ».
Quelques heures plus tard, le commissaire européen Pierre Moscovici a dû expliquer la position de la Commission. Celle-ci défend « pleinement l’objectif d’aider les plus vulnérables » en Grèce et n’oppose « pas un quelconque veto » aux mesures d’urgence prise pour les plus pauvres, a-t-il assuré.
Syriza n’a cessé ces deux dernières années de condamner la poursuite de la politique d’austérité, imposée au pays depuis le début de la crise en 2010, et qui a causé « une crise humanitaire », plongeant des centaines de milliers de Grecs dans la misère, en raison d’une explosion du chômage, du rabotage des salaires et des retraites, ainsi que de la hausse des taxes.
« Quand tous les indices sont dans le rouge, chômage, pauvreté etc. on ne fait que ce qui est nécessaire pour faire face à ces problèmes », a lancé à l’Assemblée mercredi le ministre de l’Emploi, Panos Skourletis.
Outre ces mesures sociales, la loi prévoit « la création d’un secrétariat général pour la lutte contre la corruption », sur laquelle le gouvernement mise pour augmenter les recettes publiques.