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Aurelie Abadie 
  • Pour observer l'éclipse partielle soleil vendredi, enfants devront munis de lunettes spéciales, rester l'intérieur.

    Pour observer l’éclipse partielle de soleil vendredi, les enfants devront être munis de lunettes spéciales, ou bien rester à l’intérieur. – AP/SIPA

Le principe de précaution prévaut dans les écoles. L’achat de lunettes homologuées pour observer le phénomène reste rare, à l’initiative de quelques établissements.

Rares seront les chanceux qui observeront vendredi matin l’éclipse partielle de soleil dans leur école. Le ministère de l’Education nationale « recommande » en effet aux établissements scolaires de «ne pas sortir les élèves au moment de l’éclipse », à moins qu’ils ne disposent des moyens de protection spécifique leur permettant d’observer le phénomène en toute sécurité.

« Des risques liés à l’observation d’une éclipse du soleil peuvent engendrer des liaisons oculaires graves. Vous trouverez ci-joint une note d’information émanant de la direction générale de la santé (DGS) rappelant les risques et les moyens de prévention. Je vous remercie de la communiquer aux chefs d’établissement et aux directeurs d’école afin qu’ils puissent prendre les mesures nécessaires », écrit la Direction Générale de l’enseignement scolaire dans un courrier adressé le 10 mars aux recteurs et inspecteurs d’académie.

Manque de lunettes adaptées

Dans cette note, datée du 28 janvier, la Direction générale de la santé rappelle que « pour observer cet événement dans de bonnes conditions de sécurité, il convient de se munir de lunettes spéciales de protection complètement opaques à la lumière normale ». Or, comme le souligne l’Association nationale pour l’amélioration de la vue AsnaV, « alors que l’éclipse aura lieu pendant les heures de cours, aucune distribution de lunettes adaptées n’a été prévue par le ministère de la Santé ou de l’Education nationale. ».

Si certains professeurs ou certains établissements ont pris l’initiative « sur leurs fonds propres  » ou via les collectivités territoriales (les mairies pour les écoles maternelles et primaires) d’équiper leurs élèves de lunettes homologuées afin d’observer le phénomène, cela n’est pas la règle générale.

« L’intérêt pédagogique de l’observation de l’éclipse est laissé à la libre appréciation des enseignants. Ils sont peu nombreux à avoir anticiper l’événement et à s’être procuré l’équipement adéquat », explique Hubert Raguin de la Fédération nationale de l’enseignement, de la culture et de la formation professionnelle – FO. Sans compter la rupture de stocks chez les pharmaciens et les opticiens depuis l’annonce de l’événement dans les médias.

 http://videos.lesechos.fr/4118956329001

Récréation supprimée ou décalée

L’éclipse partielle de soleil aura lieu vendredi matin entre 9h30 et 11h40, le maximum de l’ « obscuration » du soleil se produisant vers 10h30 du matin à Paris, avec quelques minutes de variation selon les régions. Résultat, nombre d’écoles ont décidé de décaler, voire carrément de supprimer la récréation. D’autres auront recours aux préaux et aux salles de jeux couvertes. «Dans l’école élémentaire où sont scolarisés mes enfants, la récréation a été supprimée vendredi. Elle l’était déjà depuis mardi en raison de la pollution aux particules », témoigne un père de famille de la région parisienne.

Dans l’académie de Montpellier – où « l’obscuration » du soleil sera de fait beaucoup plus faible que dans le nord de la France – le recteur a adressé le 13 mars dernier une mise en garde aux chefs d’établissement et aux inspecteurs (voir ci-dessous). « L’observation sans précaution d’une éclipse solaire est aussi dangereuse que de regarder directement le soleil sans protection. (…) Je vous remercie de prendre les mesures nécessaires et d’informer les personnels placés sous votre autorité afin que les élèves ne soient pas mis en situation d’observer directement ce phénomène. Dans certains cas, il conviendra de décaler l’heure de la récréation », écrit-il.

Au rectorat de Grenoble, également, le directeur de cabinet François Charlon confirme que nombre d’établissements ont privilégié « une lecture a minima » des informations du ministère. «  Les consignes générales ont plutôt été de mobiliser les enfants à l’intérieur. L’observation de l’éclipse est possible si elle est effectuée dans des conditions de sécurité satisfaisantes, mais ce n’est pas une activité obligatoire », rappelle-t-il.

« Principe de précaution »

«  Il s’agit d’un problème de santé publique donc il est de la responsabilité des enseignants d’appliquer le principe de précaution », souligne Christian Chevalier, secrétaire général du syndicat d’enseignants SE-UNSA. Ce dernier relève une grande « diversité de situations » selon les établissements. L’académie de Toulouse a ainsi mis en ligne un dossier pédagogique contenant diverses fiches pratiques pour l’observation du phénomène de manière indirecte, sans lunettes. « L’observation d’un phénomène naturel aussi rare qu’une éclipse de soleil (même partielle) peut pleinement se justifier et s’intégrer dans une démarche d’investigation telle que formulée dans le nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture de 2014 », peut-on y lire.

Dans un courrier adressé le 19 mars à la ministre de l’Education nationale, le SNU IPP-FSU, syndicat majoritaire dans le premier degré (maternelle et élémentaire), pointe des « consignes contradictoires ». « Alors qu’une information nationale a été envoyée aux écoles pour permettre une observation de l’éclipse en toute sécurité, des notes départementales ou de circonscription appellent maintenant à confiner les élèves dans les classes, à calfeutrer les fenêtres, quand elles n’interdisent pas formellement de mener une activité encadrée », écrit Sébastien Sihr, secrétaire général du syndicat.

«  S’il est tout à fait nécessaire d’informer largement sur les mesures de précaution, il est également essentiel d’autoriser l’observation de l’éclipse lorsque celle-ci a été préparée en respectant les règles de sécurité. Nous souhaitons que les directeurs et les équipes enseignantes soient soutenus et épaulés en ce sens. » Ceux qui ne pourront observer le phénomène directement pourront se consoler vendredi avec la retransmission vidéo diffusée en direct sur le site du CNRS. Ou attendre la prochaine éclipse partielle de soleil…. en 2021.

 

http://www.lesechos.fr/