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de Cruas, de Saint-Alban, François Hollande, la centrale nucléaire du Bugey, la gouvernance du Rhône, Refroidir les réacteurs, sites du Tricastin
La gouvernance du fleuve attise les tensions. A tel point que Paris la met sur le haut de la pile.
Le Canton de Genève est responsable du maintien du niveau des eaux du lac Léman par le biais du barrage du Seujet, selon un accord signé en 1984 avec le Valais et le Canton de Vaud. En aval, la France souhaiterait avoir son mot à dire.
Dès demain, le Conseil fédéral recevra le président de la République française, François Hollande, pour une visite d’Etat de deux jours, placée sous le signe de la réconciliation. Mais, le long conflit fiscal à peine évacué, un nouveau point de friction monte en puissance entre les deux pays, qui a trait à l’énergie et à la sécurité: la gouvernance du Rhône.
A la grande surprise de Berne, les préparatifs de la visite ont mis en évidence, du côté de Paris, avec une pression croissante, le débit du fleuve comme l’un des enjeux importants du moment. Tout aussi étonnés, le président du Conseil national, Stéphane Rossini (PS/VS), et la vice-présidente, Christa Markwalder (PLR/BE), ont été interpellés par des élus français à propos du Rhône lors de leur visite officielle à Paris la semaine dernière.
Refroidir les réacteurs
Où se situe le problème? Pour le cerner, il faut remonter à son épisode déclencheur, en 2011. L’année est très sèche. Le Canton de Genève, conformément à un acte intercantonal signé avec le Valais et Vaud, doit réduire les débits d’eau à la sortie du lac Léman pour rétablir un niveau conforme du plan d’eau. Mais en aval, sur sol français, les conséquences sont immédiates sur le Rhône. Or l’eau du fleuve sert notamment au refroidissement de la centrale nucléaire du Bugey. «Si la sécurité a été garantie grâce à une réaction rapide des autorités, cet épisode a néanmoins été un déclencheur pour des discussions quant à la gestion transfrontalière du fleuve», explique Christian Bréthaut, chercheur à l’Université de Genève.
En France, l’épisode est vécu comme un traumatisme. Au-delà du Bugey, la vallée du Rhône grouille de réacteurs nucléaires: les sites du Tricastin, de Cruas, de Saint-Alban, tous ont besoin d’eau en quantité suffisante et prévisible pour refroidir leurs réacteurs! Ajoutez à cela le contexte climatique – les épisodes de sécheresse augmentent –, l’importance croissante de l’énergie hydraulique en Suisse et la libéralisation du marché de l’électricité dans l’Union européenne, et vous obtiendrez un cocktail explosif.
Suisse prise au dépourvu
A tel point que la ministre française de l’Ecologie et de l’Energie, Ségolène Royal, a pris de court son homologue Doris Leuthard en mettant le sujet sur le tapis, lors de leur dernière rencontre, à la fin de mars, à Paris. La conseillère fédérale ne s’y attendait pas. Elle a alors convenu avec son homologue de reparler du Rhône, une fois les résultats du projet de recherche GOUVRHÔNE, mené par l’Université de Genève, connus.
La problématique du Rhône rebondira-t-elle lors de la visite d’Etat demain? Officiellement, aucune nouvelle rencontre bilatérale n’est prévue entre Doris Leuthard et Ségolène Royal, qui fera aussi le voyage en Suisse. D’autres problématiques transfrontalières en souffrance sont plus avancées, comme le statut de l’aéroport de Bâle-Mulhouse. Mais le Rhône, or bleu devenu enjeu majeur de crispation, pourrait bien s’inviter dans les discussions de coulisses. (TDG)