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Christian de Moliner ,Professeur agrégé et écrivain

But : leur interdire l’accès au savoir et les enfermer dans un ghetto d’études longues ou courtes qui ne débouchent que sur du vide.

Disons tout net : si les classes bourgeoises supérieures avaient sournoisement comploté afin que leurs rejetons trustent l’ensemble des métiers rémunérateurs et soient débarrassés de toute concurrence venant d’enfants d’origine modeste, elles auraient préconisé la même politique scolaire que celle que l’on suit actuellement ! Droite et gauche mènent depuis des décennies, sans en avoir conscience, une guerre implacable contre les pauvres.

Leur but : leur interdire l’accès au savoir et les enfermer dans un ghetto d’études longues ou courtes qui ne débouchent que sur du vide. Mme Belkacem est pétrie de bonnes intentions mais son plan n’est que l’ultime avatar d’une politique amorcée par M. Haby. Les dernières poches d’excellence au collège – classes européennes, internationales – vont être liquidées. Le privé élèvera une ultime digue contre le nivellement par le bas mais la pression qu’il endurera afin qu’il se « normalise » sera terrible : ! De plus, les places dans le privé sont limitées à 20 % du total alors que 40 % des parents voudraient y inscrire leurs enfants !

Le général de Gaulle, qui avait une vision pour la France, voulait promouvoir l’ascenseur social. Et il a réussi ! Jusqu’à la fin des années 1970, nombre d’enfants d’extraction modeste devenaient professeurs ou ingénieurs et faisaient de belles carrières. Les comparaisons sur l’origine sociale des nouveaux enseignants entre les années 1980 et 2010 sont, à ce titre, éloquentes !

La politique scolaire gaulliste reposait sur une sélection par le mérite (maintenant, c’est une sélection sournoise par l’origine sociale) et sur le primat accordé aux sciences, et plus particulièrement aux mathématiques. En effet, les études pédagogiques américaines (les seules crédibles car pragmatiques – les études françaises ne sont qu’un tas d’inepties) ont montré que les enfants sont égaux devant les mathématiques quelle que soit leur classe d’origine. De plus, si les étudiants littéraires sont fort utiles aux entreprises (ils leur apportent beaucoup), celles-ci ont néanmoins besoin de prendre la grande majorité de leurs cadres chez les scientifiques !

Le slogan « non à la dictature des maths » souvent brandi et unanimement approuvé n’était en réalité que le slogan des classes favorisées qui voyaient nombre de places lucratives échapper à leurs rejetons. Le très littéraire
M. Bayrou a fini par satisfaire les revendications bourgeoises en supprimant la terminale C, décision funeste dont les effets délétères se font encore sentir.

À terme, il y a aura bientôt trois types d’établissements scolaires. Les publics d’où sortiront une cohorte d’illettrés avec des titres ronflants (y compris des bac+5 !) mais qui n’auront que le SMIC comme horizon. Le privé sous contrat qui fera ce qu’il pourra mais sera en butte à l’hostilité du pouvoir. Et enfin les hors-contrat (5.000 euros par an !) qui dispenseront le vrai enseignement ! Allons-nous passer derrière le Zimbabwe au classement PISA ?

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