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Dimanche, l’homme d’affaires (nom est bien trouvé pour lui) s’est répandu sur Europe 1 pour continuer à essayer de se faire passer pour une victime, entre argumentation juridique bancale et sentimentalisme destiné à émouvoir dans les chaumières. Quelle fraude !

Vis ma vie, romancée

Bernard Tapie a souvent construit son parcours sur la victimisation. Ses péripéties judiciaires lui fournissent une occasion en or pour continuer de la sorte. Il aurait donc été arnaqué par sa banque, qui lui aurait racheté à vil prix Adidas, alors qu’elle n’en avait pas le droit (ce qui est juste), pour faire ensuite un gros bénéfice sur son dos. D’ailleurs, l’ancien patron du Crédit Lyonnais, Jean Peyrelevade, serait un « escroc ». Puis, il serait victime d’un règlement de compte politique par des juges sous influence qui voudraient sa peau. Mais même si quelques médias tendent parfois à accréditer cette version de l’histoire, une étude un peu approfondie des affaires Tapie condamne cette interprétation.

D’abord, il est tout de même paradoxal que Bernard Tapie s’en prenne à Jean Peyrelevade, alors que la vente d’Adidas a été conclue avant qu’il arrive au Crédit Lyonnais. L’ancien patron de la banque n’a fait que vendre une entreprise que son prédécesseur avait rachetée à son créditeur dans des conditions douteuses. Dans un entretien donné en 2013, il note qu’Adidas et Bernard Tapie étaient au bord du dépôt de bilan fin 2012, et que l’entreprise avait été sauvée par une injection d’argent de ses créditeurs, démontrant de facto que sa valeur d’alors n’était pas très grande. D’ailleurs, le prix de session d’Adidas était conforme aux souhaits de Bernard Tapie, qui s’en tirait par une opération blanche.

Une double affaire d’Etat ?

Comme le note Jean Peyrelevade, comment ne pas s’interroger sur un ministre qui vend de manière détournée à une banque publique une entreprise qu’il a rachetée et ne parvient pas à redresser, les deux étant dans une position financière délicate, un mois avant de perdre des élections législatives, qui allaient faire perdre aux amis politiques de Bernard Tapie les leviers du pouvoir ? N’aurait-il pas en réalité bénéficié d’un petit coup de pouce de son mentor politique d’alors, François Mitterrand pour éviter la faillite d’un ministre ? En février 1993, cette vente arrange celui qui est encore ministre. Alors bien sûr, cela n’était pas légal, le Crédit Lyonnais, détenant le mandat de la vente, ne pouvait théoriquement pas la racheter. Mais ici, ce qui n’est pas légal semble plutôt être fait pour arranger Tapie.

Bien sûr, près de deux ans après, le Crédit Lyonnais fait un gros profit en vendant Adidas, mais entre temps, avec de nouveaux dirigeants, l’entreprise a été redressée, chose que n’avait pas réussie Tapie. Du coup, ce joueur bonimenteur a vu une opportunité de demander en justice une partie des bénéfices réalisés par le Crédit Lyonnais sur sa transaction de fin 1994. Comme si, après avoir vendu des actions d’une entreprise s’étaient fortement appréciées 21 mois plus tard, il était possible d’aller chercher celui qui les avait achetées pour partager les bénéfices qu’il aurait fait en les vendant ? Une idée absolument absurde et totalement ubuesque, trop peu soulignée par les commentateurs.

Devant les lenteurs et la relative hostilité de la justice, Bernard Tapie, après avoir déclaré sa flamme à Nicolas Sarkozy, a curieusement bénéficié d’un arbitrage très favorable quelques temps après l’élection de ce dernier, alors que les deux hommes s’étaient souvent rencontrés (on se demande bien pourquoi…) Heureusement, après avoir notamment décelé un grave conflit d’intérêt dans le choix des arbitres du jugement, la justice a fini par casser l’arbitrage, même si rien n’est définitif en la matière. Là encore, il est difficile de ne pas soupçonner fortement un accord fait sur notre dos, avec un chèque extravagant et indécent de 400 millions pour renflouer l’homme d’affaires.

Tapie a bien du culot de traiter Peyrelevade d’escroc, lui qui a nettoyé les écuries d’Augias laissées par son prédécesseur. Mais parfois, plus c’est gros, plus ça passe, surtout vingt ans après, quand les mémoires défaillent. L’escroc, c’est Bernard Tapie, et sans doute François Mitterrand et Nicolas Sarkozy…

 

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