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Quelques chaises vides en perspective au congrès de la FIFA qui débute ce jeudi. (Alessandro Della Bella/Keystone)

Les médias ne font aucune concession ce jeudi. Le marasme dans lequel se trouve la faîtière du football mondial déchaîne les passions des éditorialistes
Cela n’étonnera guère: l’affaire de la FIFA fait la une partout, partout, partout. Avec force points d’exclamation, qui soulignent l’outrage, le choc, la révulsion, l’ulcération. Alex Taylor, pour France Inter, la presse qu’il préfère dans ces cas-là, c’est celle de langue allemande, dit-il, «seule à même d’exprimer le dégoût de tout un continent». Bild, par exemple, voit la FIFA sombrer dans le marasme: «FIFA-Sumpf». Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung, on a affaire à un univers «qui pue de la gueule» et qui «empoisonne le sport». La Süddeutsche propose sa une on ne peut plus wagnérienne sur le crépuscule de Blatter, la «Blatterdämmerung», «en ce jour où le président ne danse plus».
En Suisse, fait encore remarquer Taylor, «la porcherie est loin d’avoir été vidée de son fumier», et la Neue Zürcher Zeitung ne se prive pas de ce participe passé «d’une concision remarquable»: «augesmistet». Et pour ceux qui n’auraient pas tout à fait compris, «la Tribune de Genève est là pour le dire en bon vieux français». Titre de son éditorial: «M. Blatter, dégagez!» Même injonction à la une du Matin: «Il doit partir!» Trouver un seul journal européen pour défendre le patron de la FIFA relèverait de la gageure, pendant que le Web, lui, se moque allègrement du Haut-Valaisan: c’est sur le site de 24 heures.
«Vaisselle cassée»
Le Newsnet des rédactions lausannoises de Tamedia résume les propos les plus percutants des médias helvétiques. Où l’on goûtera plus particulièrement les phrases du Blick: «Monsieur Blatter, cela suffit! titre-t-il en une de son site internet. Pour son éditorialiste, le Valaisan a le mérite d’avoir développé la FIFA et d’y avoir lancé des réformes. Mais s’il est élu, il n’y aura pas d’ère nouvelle et il doit donc partir. Car l’atteinte à l’image de la fédération est trop grande. Il y a trop de vaisselle cassée», écrit-il.
Les éditoriaux, sans concession non plus, de la presse française sont, eux, très efficacement résumés, en images, sur le site de TF1. On y piquera les premières phrases de celui de L’Equipe, qu’on a beaucoup aimé: «Il y a dans l’air une odeur de pourriture. Les égouts de la FIFA débordent tellement que boucher son nez ne suffit plus à masquer les effluves pestilentiels lâchés par la machine qui gouverne le football mondial.» En Italie, la Gazzetta dello sport classe tous ses articles sous l’enseigne de «La bufera», la tempête.
«La FIFA, une mafia»
France 24 relève de son côté que le New York Times parle de «corruption institutionnalisée», alors que le Wall Street Journal qualifie les faits du «plus grand scandale de l’histoire du sport moderne». L’affaire Festina semble tout à coup bien loin. Et dans Le Monde, l’ancien cadre de la Fédération internationale de football association (1984 -1995 puis 2001-2003) Guido Tognoni critique sévèrement le système mis en place sous la présidence de Joseph Blatter et celle de son prédécesseur brésilien, Joao Havelange, en prétendant que «la FIFA est une mafia».
Le petit monde du sport, des autres sports, s’indigne aussi. Parmi les témoignages recueillis par Le Figaro, on aime bien les phrases fortes d’Eric Champel, le journaliste spécialiste des dossiers de corruption: «Il est clair que les Américains ont décidé de faire exploser le truc. C’est eux qui ont perdu la Coupe du monde 2022, donc à un moment donné je pense qu’ils ont des billes. On le savait tous. Il ne faut pas oublier que Michael Garcia est Américain et qu’il a mis un mouchoir sur son rapport. Tout ça, c’est concerté, c’est pas innocent. C’est surtout s’il y a des membres du comité exécutif… Tu fais pas un truc comme ça, à l’hôtel Borolak, avec tous les officiels. C’est un séisme, un raz de marée.»
Euh, pardon, hôtel Baur au Lac, on écrit… Surtout qu’il semble y avoir vraiment le feu, au lac, cette fois-ci.