Pourtant, sa diffusion dans notre pays aura été plus que laborieuse.
Les réseaux normaux ne voulaient pas en entendra parler. Il a fallu un lobbying intense des milieux catholiques pour qu’une petite société se risque à en assurer la distribution.
Première leçon : le catholicisme est politiquement incorrect en France. Un film qui relate leur persécution et leur révolte sent le soufre dans le pays des droits de l’homme. On en a eu une confirmation récente quand la direction de la RATP a refusé de diffuser une affiche mentionnant qu’un concert était donné en faveur des chrétiens d’Orient. Qu’elle ait été obligée de faire machine arrière ne change rien à la signification de l’incident. Le syndicat CGT de la Bibliothèque nationale a eu une réaction analogue vis-à-vis d’une exposition au sujet des chrétiens d’Orient.
Deuxième leçon : les réseaux du capitalisme médiatique sont tout sauf neutres. Du temps de la révolution d’Octobre, Lénine disait que les capitalistes étaient prêts, pour gagner de l’argent, à vendre tout, « même la corde qui servira à les pendre ». On considérait, en ce temps là, que l’argent n’avait ni odeur ni couleur politique. Si une bonne affaire était possible, le capitaliste ne regardait pas à quel parti elle allait profiter, au risque même de favoriser les ennemis du capitalisme.
Mais les temps ont changé. Les publicitaires font, aujourd’hui, une sélection des médias auxquels il vont apporter la manne qu’ils gèrent. Cette sélection est politique et idéologique. Elle ne sera pas faite en fonction des intérêts directs du capitalisme mais de l’idéologie dominante « politiquement correcte ». Dans ce cadre, un film comme Cristeros est suspect. Il en serait de même d’un film qui serait critique du mariage homosexuel ou encore favorable à un pays auquel l’Occident est hostile.
Ce climat nouveau traduit une mutation très profonde de la société. L’intolérance est inséparable d’une idéologie à la fois manichéenne et prométhéenne, comme l’était le marxisme-léninisme , comme l’est aujourd’hui un certain libéralisme libertaire.
Au XIXe siècle, la bourgeoisie dominante n’était pas idéologue, quoi qu’en ait dit Marx. Elle gérait la société en fonction de ses intérêts, certes, mais avec pragmatisme.
Aujourd’hui, l’idéologie, libérale et mondialiste en l’occurrence, n’est plus à la périphérie de la société. Elle est au centre. Les classes dirigeantes sont devenues idéologues. Ceux qui contrôlent la planète ne le font plus seulement par le pouvoir de l’argent et de la force armée. Ils le font en imposant un mode de pensée aussi exclusif et intolérant que l’était l’idéologie socialiste à ses débuts. Comme toutes les idéologies, celle qui domine aujourd’hui est, d’une manière plus ou moins ouverte, hostile au fait religieux.
Le fait d’être en position dominante dans la société donne toujours un prestige et des moyens que n’ont pas les opposants. Mais l’idéologie a une force propre, par son caractère de construction logique, sa promesse eschatologique (le progrès sous telle ou telle forme) et l’intolérance à toute forme de débat, qui renforce beaucoup les positions de ceux qui combattent sous son pavillon. Cette force se conjugue avec la puissance que le progrès technique donne désormais aux médias.
Ce qui est arrivé au film Cristeros qui, malgré son caractère éminemment rentable, a eu beaucoup de mal à être distribué, confirme que, dans notre société mondialisée, le contrôle des opinions est plus étroit qu’il ne l’a jamais été.