
Les généreux avantages financiers dont jouissent les recteurs au moment de quitter leurs fonctions créent une fois de plus colère et indignation. L’ex-principale de l’Université McGill a touché plus de 750 000 $ depuis 2013, une somme jugée « indécente » par le Parti québécois alors que les universités sont confrontées à des compressions budgétaires sans précédent.
Au terme des dix ans qu’elle a passés à la tête de la prestigieuse institution, Heather Munroe-Blum a bénéficié d’une pleine « année de ressourcement », passée à l’Université Stanford, en Californie, à titre de chercheuse invitée. Elle a alors touché un salaire de 358 000 $, une somme versée afin de « lui permettre de revenir par la suite à temps plein » comme professeure, a expliqué en entrevue au Devoir le vice-principal aux communications de McGill, Olivier Marcil. Or, après cette année à Stanford, Mme Munroe-Blum a finalement décidé de prendre sa retraite, bénéficiant à nouveau de l’équivalent d’une année de salaire, un « incitatif » offert à tous les professeurs âgés de 65 ans. Officiellement retraitée depuis quelques jours, elle touchera désormais des revenus issus de son régime de pension.Pendant son année à Stanford, Mme Munroe-Blum a aussi touché des avantages de 46 000 $ et des allocations de près de 38 000 $, qui s’ajoutent aux 1,2 million de dépenses remboursées par McGill de 2003 à 2013, selon le Journal de Montréal. « Mme Munroe-Blum voyageait dans le monde parce qu’on était en grande campagne pour amasser des fonds. Elle voyageait de Paris à Hong-Kong à la Californie pour rencontrer les [anciens] », explique M. Marcil, jugeant que ces sommes n’ont rien d’anormal.
Tant le gouvernement libéral que l’opposition péquiste voient les choses autrement. Alors qu’on demande à tous les départements et services des institutions postsecondaires du Québec de se serrer la ceinture, les conseils d’administration semblent avoir oublié de faire de même, avance Véronique Hivon, porte-parole du Parti québécois en matière d’Enseignement supérieur. « De telles conditions de rémunération d’après-mandat, particulièrement dans le contexte d’austérité actuel, nous apparaissent complètement indécentes. Ce n’est rien pour favoriser la confiance à l’égard des administrations d’universités. »Le PQ a été le premier à mettre en place des procédures concernant les salaires et allocations de départ des recteurs d’université, a-t-elle rappelé.
Le bureau du ministre de l’Éducation, François Blais, précise que, désormais, toute modification de la rémunération ou des conditions de travail des hauts dirigeants des universités doit obtenir l’aval du ministre. « On a fixé des balises pour empêcher de telles situations considérées comme excessives », a dit la porte-parole JulieWhite.Depuis quelques mois toutefois, la rémunération d’après-mandat des cadres universitaires a souvent fait les manchettes. Le mois dernier, le président de Bishop’s, la plus petite université de la province, renonçait partiellement à une prime de 620 000 $ qu’il devait recevoir à sa retraite en 2018. Huit hauts dirigeants de l’Université Laval doivent quant à eux se partager 1,4 million sur six ans, à compter de 2017, à titre d’avantages post-emploi.
La rectrice actuelle deMcGill,SuzanneFortier, se verra pour sa part verser l’équivalent d’une année de salaire à son départ, sous la forme d’une « année de ressourcement », mais ne pourra bénéficier d’un incitatif à la retraite comme celle de Mme Munroe-Blum, puisqu’elle aura alors franchi la barre des 65 ans.Mme Heather Munroe-Blum n’a pas rappelé Le Devoir lundi.