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cabinet Giacometti-Péron, Gérard Hordé, Gilbert Azibert, Nicolas Sarkozy, sondages de l’Elysée
Décidément, les innombrables affaires judiciaires qui empoisonnent Nicolas Sarkozy n’ont pas fini de réserver des surprises, et d’étranges recoupements. Quel point commun y a-t-il entre l’histoire des sondages payés par l’Elysée et différents ministères au cabinet Giacometti-Péron, et l’enquête sur les écoutes valant à l’ancien chef de l’Etat une mise en examen pour « trafic d’influence » ? Réponse : Gilbert Azibert ! Ce haut magistrat de la Cour de cassation auprès duquel Nicolas Sarkozy espérait obtenir en douce des informations sur les procédures le visant est aussi celui qui a avalisé, au ministère de la Justice, époque Sarkozy, les sondages facturés par le cabinet de Pierre Giacometti, le bon ami de l’ex-président.
Les faits que révèle Marianne, remontent à l’été 2008 quand Gilbert Azibert, procureur de Bordeaux est nommé secrétaire général du ministère de la Justice. C’est sous son autorité qu’est validé le bon de commande des sondages au cabinet Giacometti-Péron, selon une clé de répartition qui reste à déterminer. Montant du deal : 180 000 euros. Et l’affaire semble avoir été conclue dans l’urgence. Car, à peine nommé le 4 juillet, Azibert notifie le 25 juillet la bonne nouvelle au sondeur chéri de la Sarkozie. Emballé, c’est pesé !
Mais il se pourrait bien que cet empressement coûte cher au magistrat… Dans un arrêt récent portant sur ses fameux sondages, la Cour des comptes s’est contentée d’épingler le comptable du ministère de la justice entre 2007 et 2010 sans remonter plus haut. Qu’a fait de si terrible Gérard Hordé, ce fonctionnaire qui finissait sa brillante carrière comme Contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM), le haut du panier de l’ancien corps des trésoriers payeurs généraux ? Rien, sinon avoir signé les chèques au profit du cabinet Giacometti-Péron. Pour la Cour des comptes, non seulement la réalité de la prestation effectuée est incertaine, mais la gestion de ce contrat relève du farfelu, depuis sa passation jusqu’à son paiement. En clair, un vieux briscard comme Gérard Hordé aurait dû refuser de payer, comme il en avait le droit et le devoir. Il ne l’a pas fait et il est donc condamné à rembourser les sommes, telle est la règle pour ces comptables publics.
Si Hordé est coupable de payer une étrange facture, alors Azibert l’est aussi de la lui avoir transmise pour règlementProblème : c’est parce que la commande était viciée que le paiement l’était aussi. Et si cette enquête n’est pas dans les prérogatives des limiers de la Cour des comptes, leur arrêt l’aborde longuement. Ils pointent ainsi que le CBCM a été incapable de produire « l’identité de la ou des personnes, qui au cas d’espèce, avaient signé électroniquement les dix “dossiers de liquidation” en cause ». Faut-il comprendre qu’il a plutôt refusé de la donner ? Parce que si Hordé est coupable de payer une étrange facture, alors Azibert l’est aussi de la lui avoir transmise pour règlement, en qualité d’ordonnateur.
Comme à leur habitude, les magistrats de la Cour des comptes ont laissé quelques pistes dans leur rapport, comme autant de petits cailloux, pour remonter le fil d’une affaire sur laquelle ils ne peuvent investiguer que partiellement. Là, une date, ici la mention d’une fonction.
Rachida Dati, elle fait moins dans la dentelle. Au micro de RMC, la maire du VIIe arrondissement de Paris, a menacé de vendre la mèche, en parlant de ce « gros problème, [qui] était sur les dépenses de sondages ». Mise en cause par ses « amis » de l’ex-UMP, elle a affirmé « n’être au courant de rien (…) ces sondages qui concernaient le ministère, je n’ai pas connu la passation, ni les modalités », et que seule son administration avait eu à gérer l’affaire, allant jusqu’à évoquer « le secrétaire général du ministère ». A bon entendeur !
Rachida Dati, n’a pas voulu nous en dire plus… Contacté par Marianne, Gérard Hordé n’a pas souhaité, lui non plus, répondre à nos questions. Itou de la Cour des comptes qui, sans jamais citer Gilbert Azibert, n’a pas voulu communiquer « sur les suites judiciaires qui pourraient ou pas avoir été données par la Cour dans le cas d’espèce. » Au regard de la gravité des faits, on peine à croire qu’il n’en a rien été.
