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Le gouvernement aura cette fois-ci recours à l’arme constitutionnelle dès le début, de façon à s’épargner les débats dans l’hémicycle.

Photo d'illustration. Séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, en présence du Premier ministre Manuel Valls, le 10 septembre 2014.
Photo d’illustration. Séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, en présence du Premier ministre Manuel Valls, le 10 septembre 2014. © Marlene Awaad / MaxPPP

Manuel Valls engagera dès mardi la responsabilité du gouvernement, via l’article 49.3 de la Constitution, pour permettre l’adoption sans vote du projet de loi Macron en nouvelle lecture, a-t-on appris lundi auprès de plusieurs députés. Le gouvernement avait déjà eu recours à cette arme de la Constitution en février lors de la première lecture du texte du ministre de l’Économie, face à l’opposition attendue de 30 ou 40 députés PS hostiles notamment à l’extension de l’ouverture des commerces le dimanche. Mais cette fois, le gouvernement va engager sa responsabilité dès le début, en s’épargnant des débats dans l’hémicycle.

Jusqu’alors, le projet de loi « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques » était prévu à l’ordre du jour mardi à 21 h 30 pour une semaine de débats avant un vote solennel le 24 juin. Mais son examen va être avancé à 16 h 15, après la séance des questions au gouvernement, ont indiqué plusieurs députés. Emmanuel Macron devrait prendre la parole, suivi du rapporteur général, Richard Ferrand (PS), et éventuellement des autres rapporteurs du texte. Manuel Valls devra ensuite annoncer qu’il engage la responsabilité du gouvernement. Le projet de loi sera considéré comme adopté, à moins que le gouvernement ne soit renversé par une motion de censure d’ici la fin de la semaine. La décision a été prise lors d’un déjeuner lundi à Matignon en présence des rapporteurs et de présidents de commissions parlementaires.

« C’est la panique générale au gouvernement »

L’opposition a aussitôt réagi en annonçant qu’elle déposera une motion de censure. « C’est la panique générale au gouvernement. Le Premier ministre est en perdition, c’est un acte de défiance vis-à-vis de sa propre majorité », a réagi le chef du groupe Les Républicains, Christian Jacob. « On va déposer évidemment une motion de censure. Ce sera une censure de la politique du gouvernement depuis l’arrivée de Manuel Valls : aucune réforme de structure, des coups de mentons dans tous les sens… » a-t-il dit. « On peut légitimement se demander si l’expression démocratie parlementaire est encore d’actualité. Le Sénat est à droite, l’Assemblée avec ses frondeurs n’est pas assez docile… Ah si le gouvernement pouvait légiférer uniquement par décret-loi ou par ordonnances… », a réagi de son côté dans un communiqué le sénateur Roger Karoutchi, délégué « riposte » du parti Les Républicains.

Par ailleurs, plusieurs députés frondeurs ont redit ces derniers jours leur intention de voter contre. Le 49.3 « traduit une situation de faiblesse, cela prouve bien qu’il y a un problème de majorité », a réagi lundi l’un d’entre eux, Laurent Baumel.

Ce recours au 49.3 ne constitue pas une surprise, le gouvernement, ainsi que le président de l’Assemblée Claude Bartolone (PS) et le patron des députés socialistes, Bruno Le Roux, ayant martelé depuis plusieurs jours qu’il s’agissait d’une bonne solution pour accélérer l’entrée en vigueur de la loi. L’incertitude demeurait en revanche sur le moment : au début des débats, après les interventions générales des députés, ou juste avant le vote comme en février ? Le chef du gouvernement, qui a affirmé sa « détermination » à maintes reprises, a tranché pour la solution la plus rapide. Des rapporteurs ont aussi plaidé que le débat était « épuisé » après 437 heures de débats entre l’Assemblée, le Sénat et leurs commissions spéciales respectives. 2 024 amendements ont été adoptés au total, selon les chiffres du ministère de l’Économie.

Autocars, professions règlementées du droit ou travail dominical, ses quelque 300 articles touchent quantité de secteurs. Le gouvernement y a fait ajouter la semaine dernière en commission plusieurs mesures en faveur des TPE-PME, dont le controversé plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif. L’ex-ministre Benoît Hamon, figure de l’aile gauche du PS, de même que le député Yann Galut (PS), avec trente de ses collègues, avaient annoncé avoir déposé des amendements de suppression de cette mesure. Au total, plus d’un millier d’amendements de députés avaient été déposés, qui ne seront donc pas débattus, ce qui évite au gouvernement des débats potentiellement houleux. Le gouvernement peut cependant, sans débat, en accepter certains qui lui paraissent importants, et en déposer lui-même sur le texte issu de la commission, ce qui sera connu mardi. Des rapporteurs ont demandé qu’il reste « au plus près » de la dernière version du projet de loi, pesée au trébuchet.

Un article fait encore polémique parmi les députés socialistes et même entre Manuel Valls et la ministre de la Santé Marisol Touraine : la modification de la loi Évin sur la publicité pour l’alcool, introduite au Sénat et validée en commission à l’Assemblée.

Le texte qui sortira de l’Assemblée devra repasser au Sénat, avant son adoption définitive au Palais-Bourbon lors de la session extraordinaire de juillet.

 

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