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Pour faire passer la loi Macron, le gouvernement va recourir à l’article 49.3 de la Constitution. Christian Paul (PS) dénonce l’absence de concertation.

Pour accélérer l’entrée en vigueur de la loi Macron, le gouvernement a prévu ce mardi de recourir à l’article 49.3 de la Constitution. Un processus qui permettra l’adoption sans vote du projet de loi en nouvelle lecture. Le gouvernement avait déjà eu recours à cette arme en février lors de la première lecture du texte, face à l’opposition attendue de 30 ou 40 députés PS hostiles notamment à l’extension de l’ouverture des commerces le dimanche. Mais, cette fois, le gouvernement va engager sa responsabilité avant tout débat dans l’hémicycle. Le député PS Christian Paul s’inquiète.
Le Point : Que retenez-vous de ce passage en force ?
Christian Paul : Utiliser le 49.3, c’est tout sauf une démonstration de force. C’est toujours un échec collectif et un aveu de faiblesse. Mais le pire, j’en témoigne, c’est qu’à aucun moment il n’y a eu une tentative de trouver un accord ou de discuter le texte. Le gouvernement a même succombé à la tentation de durcir le texte qui prévoit désormais le plafonnement des indemnités de licenciement abusif. Cela diminue le coût des licenciements abusifs sans effet sur l’emploi. Aucun patron ne « prévoit » un licenciement abusif quand il embauche. Mais en revanche, cela crée un déséquilibre dans la relation entre le patron et le salarié. Ce n’est pas une simplification du travail, mais une dégradation des protections élémentaires des salariés. Ce texte est toxique.
Le PS présentait le congrès de Poitiers comme le congrès de la réconciliation. Quelques jours après, chacun rejoue sa partition…
Le congrès aurait dû se donner comme objectif de faire la clarté sur les idées. Nous ne sommes pas une opposition. Mais nous alertons sur les conséquences sociales de l’action menée par le gouvernement de Manuel Valls. Nous nous exprimons au nom de 30 % du Parti socialiste. Cela nous donne une légitimité, même si nous n’avons pas de majorité. Mais la majorité n’a pas tenu ses engagements. À trois jours du congrès de Poitiers, le gouvernement prend une mesure qui est le contraire de tout ce qui a été dit là-bas. J’avais mis en garde face au risque de se retrouver devant une grande déception. C’est le cas aujourd’hui de beaucoup de militants qui ont voté pour la motion de Jean-Christophe Cambadélis, car ils ont eu le sentiment qu’on pouvait trouver cet équilibre qui n’a finalement pas été respecté. La droitisation de la loi Macron dans la dernière ligne droite est un acte politique qui divise la majorité. Le Premier ministre s’éloigne de la gauche et met en danger la suite du quinquennat.
Pourquoi cette incapacité à se concerter entre socialistes ?
C’est un mystère absolu. Pour se concerter, il faut le vouloir et y consacrer du temps, ce qui n’a pas été fait. La majorité, le Parlement et le PS en sont affaiblis. Cette situation accroît la défaillance démocratique française.
Réconcilié avec Martine Aubry qui incarne l’aile gauche du PS, François Hollande considère peut-être qu’il peut se passer de l’aval des frondeurs…
Je n’imagine pas que Martine Aubry cautionne le plafonnement des indemnités de licenciement abusif. C’est à elle de le dire. D’ailleurs, si cette question avait été abordée à Poitiers, elle aurait fait « exploser » le congrès. Il y a aujourd’hui un défaut de dialogue et de loyauté qui nous contraint à exprimer un vigoureux désaccord à l’égard de ce texte. Le débat public en a grand besoin. Beaucoup de Français l’attendent de nous.