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Éric Verhaeghe, La Gauche, l’Etat, l’Etat protecteur, pot de Nutella, producteur d’inégalités, Ségolène Royal

La gauche aime l’Etat parce qu’il protège les plus faibles, dit-elle. Face aux horreurs du libéralisme dérégulateur, seul l’Etat peut garantir la justice, la solidarité, etc. L’occasion était trop belle pour ne pas rabâcher mes antiennes sur l’Etat comme instrument de domination entre les mains des élites. Les inepties de Ségolène Royal sur le Nutella en donnent une nouvelle illustration.
L’Etat protecteur, la doctrine de Karine Berger
Karine Berger a trouvé un nouvel élan depuis que la motion qu’elle a conduite au congrès de Poitiers lui a redonné de la lisibilité, après avoir laissé des plumes à l’époque où elle cirait les pompes de Moscovici ministre des Finances en répétant à tue-tête que la croissance (c’était promis! c’était prouvé!) reviendrait toute seule comme une grande en 2013. Elle a donné une interview tonitruante à Libération où elle déclare:
L’Etat doit intervenir pour ne pas laisser le plus fort l’emporter, par exemple en protégeant les droits liés à la propriété industrielle des PME. C’est de la régulation moderne. Même les plus libéraux des économistes admettent que le marché ne se résume pas à la loi du plus fort. La mondialisation ne nous condamne pas à l’inaction. Entre la fermeture des frontières de la France que propose le Front national, qui est une absurdité économique, et ne rien faire, subir tous les diktats libéraux, il y a beaucoup de place. Il y a le socialisme.
C’est beau comme du Victor Hugo! Ces assertions expliquent d’ailleurs l’attachement forcené d’un certain nombre de Français à l’Etat: l’Etat, c’est l’égalité, la défense du plus faible, bla bla bla.
L’Etat, principal producteur d’inégalités en France
Pour soutenir le discours de Karine Berger, il faut évidemment n’avoir jamais ouvert une statistique sur les résultats de l’Education Nationale. Avec un budget de 55 milliards d’euros, le premier budget de l’Etat, l’école publique transforme les impôts des pauvres en sélection sociale au profit des riches. L’enquête PISA le montre à chaque résultat publié.
Alors que la dépense publique est un vecteur essentiel de discrimination sociale (l’impôt collecté servant d’abord à apporter du service public gratuit aux privilégiés), il faut un culot monstre pour soutenir qu’il est une garantie d’égalité. Les 150.000 gamins de banlieue qui sortent chaque année du système scolaire sans aucun diplôme apprécieront l’idée que la dépense publique les a protégés!
En réalité, l’Etat connaît une expansion constante en France parce qu’il sert les privilégiés, et c’est une remarquable extraordinaire escroquerie intellectuelle de la part de Karine Berger de faire croire le contraire!
L’Etat menace les libertés
La sortie de Karine Berger intervient à un moment où le gouvernement fait voter la loi sur le renseignement, qui mettra entre les mains de l’Etat toutes les armes lui permettant de violer jour après jour la vie privée des citoyens.
Là encore, il faut une sacrée dose de culot et d’imposture pour soutenir que l’Etat protège les plus faibles quand, sur les cent dernières années, on fait le compte des citoyens emprisonnés ou persécutés par un Etat totalitaire. Demandons aux déportés du goulag ou aux victimes de Dachau si l’Etat les a efficacement protégé contre la loi du plus fort!
On rêve.
L’Etat partial: Ségolène Royal et le pot de Nutella
Au moment où Karine Berger vantait les mérites protecteurs de l’Etat, Ségolène Royal déclenchait une campagne insensée contre le Nutella, s’arrogeant de façon extravagante la fonction quasi-mariale de dire aux Français ce qu’il devait consommer ou non au petit-déjeuner. C’est comme ça, en France: la ministre de l’Ecologie décide, sans aucune analyse, sans aucun contradictoire, de flinguer une marque en place de grève, à une heure de grande audience à la télévision.
Pourquoi Nutella et pas une autre marque utilisant de l’huile de palme? C’est comme ça! c’est le caprice du prince. Ségolène a une idée qui lui passe par la tête, et elle profite du pouvoir que lui donne la Constitution pour dire son opinion, sans aucun contrôle. Cet abus de pouvoir montre bien le risque que l’Etat représente: il est d’abord le fait du prince, le lieu de l’arbitraire, le droit du plus fort sur le plus faible.
Et chacun le sait!
Sauf Karine Berger peut-être…