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C’est Franck Dedieu, co-auteur de livres rafraîchissants sur le protectionnisme et l’euro, qui a parfaitement résumé ce que représente l’irruption de certaines entreprises comme Uber, Airbnb ou Blablacar. Derrière le masque riant de l’économie collaborative, se cachent de vrais barbares de nos sociétés.
Ce qu’il y a de barbare en eux
Bien sûr, ces entreprises peuvent faire rêver. Elles fournissent des services intéressants pour les utilisateurs et elles ont révolutionné des pans entiers de l’économie, comme le savent les taxis ou les hôtels, au point qu’Uber compte déjà 5000 chauffeurs en France et Airbnb pas moins de 40 000 logements en Ile de France. Du coup, Uber vaut déjà plus de 40 milliards en bourse et Airbnb 13 ! Cette nouvelle économie bénéficie d’une bonne image, car elle peut sembler écologique, voir même sociale en fournissant à ceux qui offrent leurs services des revenus, et à ceux qui les utilisent des prestations généralement moins cher, sauf pour le Réveillon, comme s’en souviennent les utilisateurs d’Uber.
Mais derrière ce portrait idyllique se cachent de nombreux côtés obscurs. Comme le soulignent justement les chauffeurs de taxi, Uber leur mène une concurrence déloyale, payant moins de taxes, et ne requérant ni formation, ni coûteuse licence. En fait, le succès d’Uber doit moins aux innovations de son modèle d’affaire qu’au fait que l’entreprise a trouvé des failles légales lui permettant de concurrencer les acteurs historiques de manière déloyale, et en contribuant pas ou peu à la collectivité dont elle dépend. Et ces entreprises ne créent que très peu d’emplois, enrichissant principalement actionnaires et dirigeants, et précarisant tous les autres, apportant leur contribution à l’explosion des inégalités.
Barbaries à tous les étages
Uber est bien comme les barbares qui pillaient l’Europe à la chute de l’empire romain. Le plus incroyable est que beaucoup défendent ces pratiques, comme ce blogueur du NouvelObs pour qui les taxis ont bien mérité la guerre des VTC. Outre le fait qu’il oublie un peu vite certains abus tarifaires d’Uber, ses calculs sont un peu superficiels. Les tarifs plus bas ne viennent que d’une moindre contribution à la collectivité et d’un appauvrissement des taxis. En somme, il ne finance pas sa santé, son éducation ou sa retraite. Et il fait des économies sur le dos d’honnêtes travailleurs. Et les armées de l’ombre d’Uber ne bénéficient d’aucune protection, une forme ultime de précarisation du marché du travail.
Et même s’il faut le regretter (et le condamner), il n’est pas totalement surprenant que les taxis réagissent vivement contre cette entreprise qui vole un pain durement gagné, avec des scènes de traque qui semblent indiquer que la barbarie ne fait qu’appeler à plus de barbarie. Comme souvent, le gouvernement a tenté une forme de synthèse qui n’a rien réglé. Il est étonnant que la Californie soit plus interventionnistes que nous, en ayant « donné à un chauffeur le statut d’employé et non d’indépendant », une décision qui « pourrait obliger Uber à accorder des droits sociaux à tous ses chauffeurs ». Ce faisant, les juges pourraient bien casser le modèle économique déloyal de cette entreprise.
Voilà pourquoi je soutiendrai les manifestations de taxis contre Uber prévues jeudi. Aujourd’hui, cette entreprise n’est qu’un vautour de plus de notre société, qui ne profite qu’à une infime minorité, certes très habilement, et pour un prix bien plus élevé que la plupart ne l’imaginent.