Étiquettes

  • Il difficile d'ouvrir débat France présence d'universités privées paysage.

    Il sera difficile d’ouvrir un débat en France sur la présence d’universités privées dans le paysage. – Photo Jean-Michel André/REA

Les chefs de l’exécutif affirment et réaffirment qu’il faut continuer à réformer. Mais cela ne vaut visiblement pas pour l’enseignement supérieur et la recherche, secteurs que tous les autres pays, sans exception, considèrent comme essentiels pour leur avenir.

La nomination de Thierry Mandon au secrétariat d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche met fin à de longs mois d’atermoiements concernant ce secteur, dit « prioritaire » pour le gouvernement. Crée-t-elle pour autant une dynamique de moyens ? Personne ne se fait plus d’illusion sur ce point. Une dynamique de projets, alors ? Malheureusement, je crains que là aussi, on ne puisse se faire beaucoup d’illusions. Quelques paroles convenues, quelques pétitions de principe, mais surtout ne fâcher personne, ne pas créer dans l’environnement politique du gouvernement un nouveau chantier dangereux, alors même que Thierry Mandon, dans ses fonctions précédentes, avait montré qu’il faisait partie du club hélas trop fermé des réformateurs socialistes.

Il faut continuer à réformer, affirment et réaffirment les chefs de l’exécutif. Fort bien, mais cela ne vaut sans doute pas pour l’enseignement supérieur et la recherche, secteurs que tous les autres pays, sans exception, considèrent comme essentiels pour leur avenir.

Les rapports continuent de s’accumuler. Qu’ils viennent de « think tanks » orientés à gauche ou se réclamant d’une orientation libérale ou même de l’Inspection générale de l’Education nationale et de la recherche, qui tous éclairent les mêmes pistes, qu’il s’agisse de l’orientation sélective des étudiants, nécessaire si l’on veut réellement donner les mêmes chances à tous d’obtenir un diplôme ou encore des ressources financières des universités, pour lesquelles rien n’est tranché : pas d’augmentation des droits de scolarité, mais pas d’augmentation non plus du budget de l’Etat pour l’enseignement supérieur et la recherche. Et nous passerons sur la nécessaire diversification des universités et l’identification de quelques universités de recherche, alors que cette diversification existe dans tous les pays, y compris la Chine. Un calme plat règne donc sur des sujets dont on peut douter qu’ils seront abordés plus tard, en pleine rentrée universitaire.

La question est-elle politique et serait-elle marquée par le clivage gauche-droite ? Même pas : le silence est complet, sur tout l’horizon politique français. Alors que la loi Macron ouvre un peu la porte d’une vision plus moderne de l’économie et du rôle du marché, rien de neuf en ce qui concerne la formation supérieure et la recherche. Circulez, tout a été fait, tout a été dit sur les universités !

Fort heureusement une collègue de Stanford, Caroline Hoxby, a récemment exprimé un point de vue particulièrement pertinent sur les réformes universitaires françaises, lors des 15e Rencontres économiques d’Aix-en-Provence. Avec une lucidité absolument parfaite, elle exprime ses doutes quant à la possibilité de continuer en France la réforme universitaire. Son point de vue résume parfaitement deux points de blocage majeurs. Tout d’abord, elle s’interroge sur la capacité d’un Etat centralisé à donner davantage d’autonomie à ses universités. Mais pour notre collègue, seules les universités de recherche ont réellement besoin d’une très grande autonomie. Cette considération pourrait nous permettre d’avancer, en identifiant d’urgence quelques établissements, ou éventuellement regroupements d’établissements, dans la mesure où ils peuvent avoir un sens, qui pourraient jouer le rôle de ces universités de recherche. Celles-ci repérées, et dotées de statuts spécifiques, les autres n’en souffriraient pas, car les objectifs de toutes seraient ainsi grandement clarifiés et les moyens seraient bien mieux utilisés.

Notre collègue fait aussi observer le rôle essentiel que joue aux Etats-Unis la concurrence entre universités de recherche privées et universités publiques. Là, ne rêvons pas, il sera pour le moins difficile de seulement ouvrir un débat en France sur la présence d’universités privées dans le paysage. Mais gardons au moins le mot concurrence. La loi Macron nous montre que ce mot a encore un sens pour la partie la plus lucide de l’actuelle majorité. Pourquoi serait-il un gros mot dans le secteur de l’enseignement supérieur ?

http://www.lesechos.fr/