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De prochaines élections législatives anticipées, moins de six mois après l’arrivée de Syriza au pouvoir, sont déjà dans l’air en Grèce au lendemain d’un vote sur l’accord entre Athènes et ses créanciers qui a divisé le parti.
AlexisTsipras a obtenu un vote très large au Parlement, en faveur de nouvelles mesures d’austérité comme une hausse de laTVA ou une réforme contraignante des retraites. Des textes difficiles, mais indispensables à la poursuite des discussions en vue d’un troisième plan d’aide qui permettrait à la Grèce d’obtenir 80 milliards d’euros sur trois ans, et d’espérer l’ouverture de négociations sur un allégement de sa dette.Si le texte a été adopté par 229 députés sur 300, M. Tsipras a perdu sa majorité parlementaire. La coalition entre Syriza et le parti de droite souverainiste ANEL qu’il dirige est forte de 162 députés. Il pouvait donc se permettre d’en perdre 11 pour garder la majorité absolue. Mais 39 lui ont finalement fait défaut, avec 32 « non », six abstentions et une absente.
Parmi les «non», des personnalités comme l’ex-ministre des FinancesYanisVaroufakis ou la puissante présidente du Parlement ZoéKonstantopoulou, et une ministre ayant démissionné mercredi matin, la ministre adjointe aux Finances,NadiaValavani. Mais aussi trois ministres en exercice,PanagiotisLafazanis, ministre de l’Énergie et des Infrastructures,KostasIsihos, ministre adjoint de la Défense, etDimitrisStratoulis, ministre adjoint de la Sécurité sociale.À l’automne ?
Le sort que leur réservait M. Tsipras n’était pas encore clair jeudi après-midi. Mais déjà, de nombreux commentateurs, et même des proches de M. Tsipras, commençaient à évoquer la nécessité de nouvelles législatives. « Il y aura probablement des élections en septembre ou octobre, en fonction des développements, a ainsi analysé le ministre de l’Intérieur, Nikos Voutsis, à la radio Sto Kokkino.
« Le gouvernement n’ira pas au-delà de septembre », prédit Manolis Alexakis, professeur de sociologie à l’université de Crète. « On n’évitera pas de nouveaux développements politiques d’ici la fin de l’année », renchérit ThomasGerakis de l’institut de sondage Marc.Beaucoup de partisans de M. Tsipras ont été déçus de le voir signer lundi matin, au terme de discussions épuisantes, un plan considéré par certains comme « humiliant » tant il est contraignant. D’autant que de nouvelles mesures d’austérité semblaient avoir été clairement rejetées, par 61 % des Grecs, lors du référendum du 5 juillet.
Mais quand même, M. Gerakis a trouvé mercredi « surréaliste » le spectacle des rebelles de Syriza, « disant qu’ils soutenaient le gouvernement, mais pas les mesures » qu’il a signées.Des divisions
Même Gabriel Sakellaridis, le porte-parole du gouvernement, un très proche de M. Tsipras a reconnu jeudi « une division majeure » dans le parti à présent.Et le quotidien qui fait figure d’organe de Syriza, Avghi, a estimé que « lorsqu’on perd un quart de ses troupes au Parlement, dans un vote sur un accord portant la signature du premier ministre et leader du parti, il n’y a pas de doute qu’on en sort amoché ».
M. Tsipras avait reconnu devant le Parlement avoir signé cet accord, qu’il n’aime pas mais auquel il reconnaît de possibles vertus à moyen terme pour éviter une sortie de l’euro, rejetée par trois quarts des Grecs.Pour M. Alexakis, le premier ministre est désormais pris entre deux feux : les dissidents de Syriza et l’opposition.
Quoique inconfortable, la situation actuelle est cependant loin d’être périlleuse pour M. Tsipras. Pour l’instant, en effet, l’opposition est assez fragile. Le parti conservateur Nouvelle démocratie n’a qu’un président par intérim,EvangelosMeimarakis, en remplacement de l’ancien premier ministreAntonisSamaras qui a démissionné au lendemain du référendum. Par ailleurs, la dirigeante du parti socialistePasok,FofiGennimata, vient à peine d’arriver. Conscient de cette faiblesse, M. Meimarakis a assuré mercredi que l’opposition n’avait pas l’intention de déposer une motion de défiance.Du côté de Syriza, par ailleurs, M. Tsipras a observé que ses députés n’étaient pas suicidaires au point de vouloir renverser un gouvernement toujours très populaire. « Les gouvernements chutent quand ils perdent le soutien de la société, ce qui n’est pas le cas du nôtre », a-t-il fait valoir devant le Parlement.
Ainsi, pour le commentateur politique Nikos Dimou, M. Tsipras pourrait même émerger plus fort de nouvelles élections. « La plupart des Grecs ne veulent pas retourner à la drachme et Syriza gagnera de nouveau, encore plus largement que la dernière fois », pense-t-il.