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Si Julian Assange et son WikiLeaks n’existaient pas, certains États auraient donné un bras pour qu’on ne l’inventât point. Les Américains, bien sûr ; mais surtout les Saoudiens, voire même, aujourd’hui, les Français.
Nicolas Gauthier
Si Julian Assange et son WikiLeaks n’existaient pas, certains États auraient donné un bras pour qu’on ne l’inventât point. Les Américains, bien sûr ; mais surtout les Saoudiens, voire même, aujourd’hui, les Français.

Ces nouvelles révélations ? Rien de plus, fondamentalement, que ce que nos lecteurs lisent ici depuis des années sous la plume de votre serviteur ; mais désormais « officialisées » par WikiLeaks et dûment relayées par l’un des quotidiens américains de référence, The New York Times et Atlantico.fr, site français dont les contributeurs ne sont pas tout à fait connus pour mouiller la chemise dans le combat contre l’atlantisme et la défense de la cause palestinienne…

Bref, toute la duplicité saoudienne y est enfin mise sous les projecteurs. Leur diplomatie du chéquier consistant à promouvoir un islamisme wahhabite dégénéré contre l’islam traditionnel – voir, à ce sujet, l’excellente analyse de Stéphane A. Brunel publiée hier. Diplomatie parallèle les poussant à déstabiliser, non seulement le monde oriental, mais aussi nos nations européennes, nos banlieues françaises et, au passage, les républiques caucasiennes musulmanes, aux marches de la Russie.

Et Atlantico de relayer cette information des plus intéressantes : « Il s’agit d’un système d’influence que les autorités saoudiennes ont mis en place et financé par l’argent des pétrodollars. Riyad a notamment accordé des moyens financiers à des prédicateurs à l’étranger, construit des mosquées, des écoles, des centres et soutenu des campagnes pour contrer des responsables et des médias à l’étranger qui étaient susceptibles de s’opposer à l’agenda du Royaume. »

On notera qu’il s’agit de cette même dynastie saoudienne qui, participant à une hypothétique coalition occidentale anti-Daech, finance ce mouvement en sous-main tout en faisant semblant de le combattre ; qu’il est loin le temps du roi Fayçal… Pour hypocrite qu’il soit, ce double jeu n’en est pas moins redoutablement efficace. Julian Assange, cité par Atlantico : « Les documents, dont je n’ai pas pris connaissance de la totalité, ne nous apprennent rien de plus que ce que nous savions déjà au sujet de la monarchie saoudienne, à savoir un État qui applique une vision très littéraliste et, partant, répressive de la religion, et qui n’hésite pas, par ailleurs, à s’appuyer sur la diplomatie de chéquier pour soigner son image à l’étranger. Il faut reconnaître que la diplomatie de chéquier procède d’une relation clientéliste où il y a un patron ou des patrons et un ou plusieurs obligés. En d’autres mots, si clientélisme saoudien il y a, la clientèle en accepte les termes. La responsabilité est par conséquent largement partagée. »

Il est un fait que ce n’est pas par miracle que François Hollande n’en finit plus de vendre des avions Rafale au premier chaland venu, pour peu que son chèque soit certifié par une banque saoudienne, pour un État égyptien financièrement exsangue dont le seul titre de gloire demeure, pour l’instant, la possible condamnation à mort du premier président égyptien démocratiquement élu : Mohamed Morsi.

Mais là où la duperie prend des dimensions stratosphériques, c’est que, de concert et ce depuis des années, Riyad et Washington nous vendent un soi-disant « choc des civilisations », entre islam et chrétienté, Orient et Occident.

Youssef Hindi, historien marocain, et récemment dans ces mêmes colonnes, a résumé l’équation avec de plus judicieuses données : d’un côté, un bloc protestant et wahhabite – avec Israël embarqué comme passager clandestin, car dans cette histoire, l’État hébreu ne peut sortir que perdant – et de l’autre, un autre bloc historique, catholique, islamique et orthodoxe. Voilà qui mérite réflexion…

Maintenant que le roi est nu, ou au moins en slip dans le désert ou la banquise, les occasions ne manqueront sûrement pas de revenir sur la question.

Boulevard Voltaire – La liberté guide nos pas