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Nicolas Sarkozy et Alain Juppé afficheront leur entente, samedi à la Baule, alors qu’ils se déchirent et se détestent. (JEAN-PIERRE MULLER / AFP)À La Baule, ils s’afficheront ensemble sur la même scène; ils feront preuve d’affection et de complicité l’un vis-à-vis de l’autre; ils chanteront La Marseillaise d’une seule voix. Et ce ne sera, chacun par avance le sait, qu’une mauvaise comédie plus ou moins bien jouée puisque Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire savent’ qu’aussitôt après les élections régionales de décembre prochain, ils vont … s’étriper ! Non pas seulement parce que la campagne de la primaire de la droite sera par définition intense, violente, mais parce que des conceptions vraiment différentes de la société française vont s’opposer. En cela, la primaire sera d’une importance cruciale puisqu’on peut supposer aujourd’hui que son vainqueur atterrisse quelques mois plus tard à l’Élysée.
Sarkozy et Juppé, les deux favoris, ne se supportent plus. L’ex-président est en grande partie responsable de cette tension naissante et grandissante, multipliant en privé les attaques personnelles contre le « vieillard socialiste ». Mais leurs divergences politiques, idéologiques et culturelles dépassent désormais le stade de la concurrence politico-électorale. La droite Sarkozy – identitaire et réactionnaire – n’a plus grand chose en commun avec la droite Juppé – humaniste, européenne et transfrontières. Si le président de LR (Les Républicains) s’entête à vouloir diminuer le Front National en le concurrençant sur sa droite, l’affrontement avec Juppé ne cessera de monter, tant sur le fond que sur la forme. Car Sarkozy se radicalisera chaque jour davantage tandis que le maire de Bordeaux deviendra le bouclier protecteur de tous ceux qui se refusent au rétrécissement français.
Des adversaires qui montreront à La Baule comme ils s’aiment…
Dans cette perspective à enjeux très forts, la gauche semble absente, hors sol, en état d’apesanteur, et les outsiders de la droite en sérieuses difficultés. François Fillon est issu du gaullisme social, en quelque sorte l’héritier clean de Philippe Séguin.
Passé à la moulinette Sarkozy, essoré, épuisé, Fillon s’est emparé de la défroque néolibérale. Il passe son temps à promettre du sang et des larmes. Et il s’étonne, sondage après sondage, d’une cote de popularité en berne… Sarkozy et Juppé considèrent, à juste titre sans doute, qu’il est sorti du scénario présidentiel, abîmé de surcroît par sa bataille de chiffonniers de la politique avec Jean-François Coppé. Que, dans ce contexte, Fillon fasse le prophète – du malheur – ce week-end sur les tréteaux de La Baule ne dérange personne. Ce n’est pas le cas de Bruno Le Maire. Sarkozy et Juppé comprennent mal son évolution, sa droitisation assez radicale.
En troisième position dans les études d’opinion, Le Maire, si propre sur lui, si convenable, le genre premier de la classe, a jusque-là charmé une partie de la bourgeoisie modérée. Comment expliquer cette soudaine radicalité ? Ces prises de position sociétales à la… droite de Marine Le Pen et de Nicolas Sarkozy ? Pour deux raisons, au moins : l’ancien ministre de l’Agriculture est persuadé que les Français persistent à se droitiser ; et il entrevoit, qu’à force d’affaires judiciaires, Sarkozy ne sera peut-être pas en mesure de se présenter.Ah, ces gens-là, à droite, décidément, s’adorent. Ils le montreront une fois encore à La Baule.