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Barack Obama, le pape est un «marxiste», Les républicains, Pape François, une responsabilité morale
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Le clocher de la basilique à Washington où le pape célébrera une messe ce mercredi. (Keystone)
Le pape François rencontre Obama mercredi matin. Les républicains craignent les propos très «progressistes» du souverain pontife
Enthousiasme est un mot faible. Après quatre jours à Cuba, le pape François est arrivé mardi à Washington. Il a été accueilli – fait exceptionnel – par le couple présidentiel à sa descente d’avion sur la base militaire Andrews. Barack Obama l’a avoué: il n’attendait plus de voir ce «pape des pauvres», qu’il reçoit dans le Bureau ovale pendant environ une heure.
A Washington et New York, des centaines de milliers de fidèles sont attendus pour voir le souverain pontife. A Philadelphie, où se tiendra une rencontre mondiale des familles catholiques, près d’un million et demi de spectateurs sont attendus. La papamania s’est emparée de la ville depuis des semaines. A New York, les autorités ont dû organiser une loterie pour trier ceux qui pourront suivre le pape à Central Park. L’événement suscite un énorme engouement populaire dans un pays qui compte 68 millions de catholiques, la plus grande communauté religieuse du pays, loin devant la Southern Baptist Convention, qui compte 15,5 millions de membres. Les télédiffuseurs ont chacun créé une chaîne qui couvre en continu la totalité de la visite papale depuis son arrivée à Cuba. L’enthousiasme se traduit en chiffre: 63% des catholiques américains ont une opinion favorable du souverain pontife. En comparaison, Benoît XVI n’en avait que 43%.
Pour les autorités américaines, la sécurité tout au long de cette visite de cinq jours constitue le plus grand défi sécuritaire jamais relevé. Des membres du Secret Service (services de sécurité) ont multiplié les rencontres au Vatican pour s’informer de la manière la plus judicieuse d’assurer la sécurité du pape. A Washington, des exercices ont été effectués avec une réplique de la papamobile. A New York, explique le chef de la NYPD William Bratton, les policiers ont étudié de près le body langage du pape pour voir comment il interagit avec la foule. Le défi est d’autant plus important que ce dernier refuse d’être enfermé dans sa papamobile et cherche le contact avec les gens. Plus de 5000 policiers assureront la sécurité à New York où le pape s’exprimera aussi à la tribune des Nations unies vendredi. A Washington, nombre de fonctionnaires sont priés de rester à la maison, la capitale risquant d’être paralysée pendant deux jours.
La visite de François aura une composante spirituelle évidente, notamment avec la canonisation de Junipero Serra. Mais elle sera aussi hautement politique. François, décrit parfois aux Etats-Unis comme le «pape d’Obama», a défendu des positions qui tendent à renforcer l’agenda du président démocrate: il a joué un rôle de médiateur essentiel dans le rapprochement entre Washington et La Havane. Il juge positif l’accord trouvé sur le nucléaire iranien. Il estime que la planète a une responsabilité morale de lutter contre le changement climatique. Il est en revanche critique de la non-fermeture de la prison de Guantanamo. Les prises de position du Saint-Siège ne manquent pas de crisper les conservateurs américains, même catholiques. L’animateur de radio Rush Limbaugh ne mâche pas ses mots: le pape est un «marxiste».
La première étape s’arrête ce matin sur la pelouse de la Maison-Blanche où 15 000 personnes sont invitées. L’événement a déjà provoqué des commentaires acerbes d’élus et de candidats présidentiels républicains. Barack et Michelle Obama ont convié à la réception le premier évêque ouvertement homosexuel, un activiste se battant pour les droits des transgenres et un blogueur catholique et gay. Pour le candidat à la Maison-Blanche Mike Huckabee, la liste des invités est une «insulte à des millions de catholiques».
Jeudi, la première allocution prononcée par un pape devant les deux Chambres du Congrès promet aussi d’exacerber les passions. Les républicains, qui ont longtemps été très proches du Vatican, sont en plein questionnement, même les élus catholiques. Il y a eu basculement. Ce sont désormais les démocrates qui sont plus en phase avec le Saint-Siège. Représentant de l’Iowa, Steve King espère que le souverain pontife se contentera de dénoncer l’avortement et le mariage gay. «Il n’y a rien dans le Nouveau Testament au sujet du réchauffement climatique», estime-t-il.
Barack Obama, pour sa part, pourrait saisir l’occasion pour affirmer davantage sa foi chrétienne à un moment où celle-ci est de nouveau mise en doute par des extrémistes qui continuent de le considérer comme un musulman et un faux Américain.