Étiquettes
bombardements aveugles, l'Arabie saoudite, Le Qatar, Les pays du Golfe, wahhabisme saoudien, Yemen
La coalition des pays du Golf qui dirige la lutte contre les rebelles Houthis du Yémen a intensifié sa campagne, après que 60 de ses soldats ont été tués en une seule attaque le 4 Septembre. L’Arabie saoudite, le Qatar, l’Egypte et le Soudan ont envoyé des troupes supplémentaires sur le terrain.

Pourquoi, alors qu’ils ne font rien en Syrie, les pays du Golfe s’acharnent-ils dans leur aventure militaire au Yémen ?
Alain Rodier : L’adversaire des pays du Golfe au Yémen est parfaitement identifiable et « détestable »: les chiites, en réalité, les zaydites, une branche du schisme, majoritaires au sein des tribus al-Houthis et présente au sein de la population yéménite.
L’ex-président Saleh est un zaydite -même s’il a combattu pendant des années les al-Houthi leur reprochant leur trop grande volonté d’autonomie-.
En Syrie et en Irak, c’est plus compliqué. Daesh (ou Etat islamique) et Al-Qaida « canal historique » via le front al-Nosra, ont une idéologie salafiste très proche du wahhabisme saoudien. Il n’est pas sûr que des troupes au sol issues des pays du Golfe adhèreraient à une guerre directe contre ces mouvements. Peut-être même qu’elles se retourneraient contre leurs chefs. Cela ferait désordre. Pour l’aviation qui effectue quelques raids symboliques, c’est moins grave car on se trouve plus dans une configuration « Star Wars » où ne distingue pas vraiment les cibles. De plus, les armées de l’air de ces pays font partie de l’élite … proche des pouvoirs en place.
L’Arabie saoudite, le Qatar, l’Egypte, et le Soudan ont envoyé des troupes supplémentaires sur le terrain, qu’ont-ils chacun à gagner dans cette guerre qui semble interminable ?
Le but est de « casser du zaydite » et par là, de stopper l’influence que pourrait avoir Téhéran dans la région. Un front par contournement (au sud de l’Arabie saoudite) est toujours gênant. En plus, c’est une « bonne petite guerre » qui va permettre de donner de l’expérience à des princes héritiers guerriers qui reviendront auréolés d’une gloire obtenue en tapant majoritairement sur des populations civiles. Cela dit, l’odeur de victoire ressentie en ce moment risque de ne pas durer.
L’attentat de Maarib semble avoir déclenché ce regain d’intérêt de la coalition. Pourquoi avoir « attendu » cet acte de violence pour tenter de mettre fin à ce conflit ?
Au Yémen, il est difficile d’attribuer les nombreux attentats qui s’y déroulent : Daesh (seule une petite cellule du mouvement serait présente mais elle semble très active), Al-Qaida dans la Péninsule Arabique (AQPA), les Houthis ? Une des caractéristiques de ces mouvements, c’est que la mort ne leur fait pas peur.
L’Arabie Saoudite ne veut pas mettre fin au conflit ayant rompu les négociations entamées à Oman. Elle veut une capitulation sans conditions de ses adversaires, ce qu’elle n’obtiendra pas car les Houthi ont l’habitude de se replier dans leurs fiefs montagneux du nord-ouest du pays avant de repasser à l’offensive. Il est probable que le sud-ouest de l’Arabie saoudite va faire l’objet de raids « hit and run » de la part des al-Houthi. Cela va servir de représailles aux bombardements aveugles.
L’embargo de la coalition sur l’Iran qui tente de bloquer l’envoi d’armes, est-il la solution ?
Certes, les al-Houthi vont rencontrer des problèmes d’approvisionnements mais les armes et les munitions, ce n’est pas ce qui manque au Yémen.
Riyad (mais aussi l’Egypte qui a dépêché 800 combattants, le Qatar avec 1 000 hommes au sol et peut-être bientôt le Soudan) se retrouve, de fait, allié à AQMI au Yémen qui s’est emparé en sous main d’une partie d’Aden et d’Al Mukala. De plus, l’Arabie saoudite (mais aussi le Qatar et la Turquie) soutiennent l’ « Armée de la conquête » en Syrie dont l’ossature est le Front al-Nosra, le bras armé d’Al-Qaida « canal historique » dans le pays. Là, c’est la province d’Idlib qui est placée sous son influence.
Le bourbier yéménite n’en n’est qu’à ses débuts.