Étiquettes
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La mesure touche notamment les fruits et légumes, le vin, le miel et l’huile d’olive. © Reuters / © Baz Ratner / Reuters
L’Union européenne adopte l’étiquetage différencié pour les produits des colonies. Fureur en Israël
La décision mûrissait depuis des années, elle a été sujette à des pressions et à des divisions, au point d’être reportée à d’innombrables reprises. Mais finalement, une nouvelle indication devrait bientôt faire son apparition sur les étiquettes de certaines marchandises vendues dans les supermarchés de l’Union européenne: «Produit en Cisjordanie (colonie israélienne)». La décision a provoqué la fureur des autorités israéliennes, mais ne les a nullement surprises, à voir la célérité de leurs réactions et des menaces à peine déguisées adressées aussitôt à l’UE.
Cette différenciation a déjà fait son chemin dans certains États européens (la Grande-Bretagne, le Danemark ou la Belgique), ou dans certaines entreprises (comme la Migros, en Suisse). Voilà des mois qu’une bonne moitié des États de l’Union faisait pression sur la haute représentante Federica Mogherini pour promouvoir l’indication de l’origine des produits provenant des colonies de peuplement établies dans les territoires palestiniens.
Voyant venir l’orage, des responsables européens ont taché mercredi de minimiser l’importance de cette mesure. «Il s’agit d’une décision purement technique, destinée à permettre une meilleure identification des produits», insistait par exemple Lars Faaborg-Andersen, l’ambassadeur de l’UE à Tel-Aviv.
Illégalité des colonies
Au sein de l’Union européenne, l’indication d’origine est obligatoire notamment pour les fruits et légumes, le vin, le miel, l’huile d’olive ou encore les produits cosmétiques. La logique défendue par les promoteurs de cette différenciation des étiquettes? Les colonies israéliennes, ainsi que l’annexion de Jérusalem-Est, sont illégales en regard du droit international. Faute de rendre illégales, elles aussi, les exportations en provenance de ces colonies (c’est ce que prônent la plupart des ONG actives sur ce dossier ainsi que les Palestiniens), reste le droit pour le consommateur d’être pleinement informé.
Face à cette décision de la Commission européenne, qui devrait être officialisée ce jeudi, les responsables israéliens ont joué de toute la gamme des incriminations. «C’est une honte pour l’Europe», faisait savoir le premier ministre Benjamin Netanyahou qui, il y a quelques semaines, avait déjà comparé cet étiquetage aux pratiques des nazis visant à répertorier «les produits juifs». D’autres ministres ont laissé planer la menace sur le rôle que pourrait jouer l’Europe à l’avenir dans une éventuelle relance du processus de paix. En soirée mercredi, le gouvernement israélien a finalement fait savoir qu’il boycottera le «dialogue diplomatique» au sein de «certains forums» avec des responsables européens.
Une mesure marginale, mais significative
Tous les analystes s’accordent à dire que, même si elle devait amener à modifier le comportement des consommateurs européens, cette mesure n’aurait qu’un impact extrêmement marginal sur les exportations israéliennes vers l’Union européenne: peut-être 1 ou 2%. Mais l’essentiel n’est pas là. Alors que plusieurs membres de son gouvernement actuel proviennent eux-mêmes de colonies illégales, Israël s’emploie à rendre plus floue que jamais la démarcation entre le territoire compris dans les frontières internationalement reconnues et les colonies. La démarche européenne s’inscrit en outre dans un contexte où les appels au boycott contre Israël se font de plus en plus menaçants, menés principalement par le mouvement qui se fait appeler «BDS» (pour boycott, désinvestissement, sanctions).
En réalité, la distinction entre les produits provenant d’Israël et des colonies est déjà prévue par l’accord d’association conclu entre Israël et l’Union européenne en 2005, puisque les produits des colonies sont exclus du régime tarifaire préférentiel stipulé par cet accord. À de nombreuses occasions, cependant, ont été dévoilés les moyens qu’utilisent fréquemment les entreprises israéliennes afin de «maquiller» la provenance exacte de leurs produits.
La Suisse, elle aussi, est liée à Israël par un accord du même type, duquel sont exclus les produits des colonies. De sorte que les marchandises en provenance d’Israël doivent bel et bien comporter l’indication de leur localité d’origine pour pouvoir passer la douane. Mais, alors que la Migros décidait de procéder à l’étiquetage différencié, à partir de 2013, le Conseil fédéral affirmait qu’il n’entendait pas généraliser cette pratique à l’égard des consommateurs. L’introduction d’une telle mesure, pour tous les produits israéliens «entraînerait une charge administrative supplémentaire disproportionnée et constituerait un obstacle au commerce», faisait-il savoir à l’époque.