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Sacré Alain Juppé, sacré « meilleur d’entre eux » par Jacques Chirac, et qui n’en finit plus de nous jouer de la flûte.
Nicolas Gauthier,Journaliste, écrivain

Sacré Alain Juppé, sacré « meilleur d’entre eux » par Jacques Chirac, et qui n’en finit plus de nous jouer de la flûte sur la ritournelle de l’éternel retour tout en navigant plus ou moins à vue entre les gouttes.

Invité ce mardi matin sur BFM TV par Jean-Jacques Bourdin, toujours droit dans ses bottes – ou ses babouches -, il s’est donc livré à un assez remarquable numéro d’équilibriste. Après avoir reconnu, dans les colonnes de Paris Match, « l’échec de la stratégie qu’il avait incarnée aux côtés de Nicolas Sarkozy », il n’évoque que nos errements syriens. Et passe à la trappe l’opération libyenne, catastrophe séminale dans laquelle il fut néanmoins aux avant-postes, mais persiste à soutenir une coalition militaire internationale continuant d’inclure l’Arabie saoudite ; un peu comme si le Ku Klux Klan était représenté à une commission censée combattre la négrophobie.

Pour le reste, ça navigue à vue. Alain Juppé fait son marché à gauche comme à droite. Applaudit au discours de François Hollande tout en reconnaissant que la baisse des effectifs des forces de l’ordre, entamée sous le mandat sarkozyste et politique poursuivie sous son successeur hollandais, fut une funeste « erreur ». Ce qui ne l’empêche pas de reprendre à son compte les propositions de Marine Le Pen, grâce auxquelles étrangers et binationaux potentiellement dangereux pourraient être expulsés du territoire national.

Dans son enthousiasme, suivant encore Marine Le Pen qui exige la fermeture des mosquées « radicales », il demande l’interdiction « des prêches en arabe » dans ces mêmes mosquées. Explication : « Dans les églises, on ne prêche pas en latin. » Pourquoi pas ? Mais à ce détail près que jamais, dans les églises, les sermons n’ont été dits en latin, même pas en ces âges médiévaux où les fidèles étaient rares à maîtriser l’auguste langue des clercs et ne baragouinaient pas même trois mots de celle d’un Molière encore promis à naître, se contentant le plus souvent de leur patois de village.

Pour le reste, les considérations habituelles. « Eux » le « mal » et « nous » le « bien ». Alain Juppé n’en est pas encore réduit au stade d’un Nicolas Sarkozy naguère incapable, sur les ondes du même Bourdin, de faire la différence entre un sunnite et un chiite, estimant qu’il n’était pas compétent en matière de querelles « ethniques » – gag suprême pour celui qui fut ministre de l’Intérieur, et donc des Cultes -, mais ça pourrait bien un jour s’en approcher.

Dans la foulée, cet entretien accordé à Paris Match par Bernard Kouchner, où quand le ludion précède l’histrion au Quai d’Orsay, avec ce titre fleurant bon le choc des mots et le poids des zozos : « Ces barbares veulent la fin des temps. »> Le tout assorti de ces doctes explications : « Parce que la France, ça compte. À travers elle, ces barbares ciblent notre jeunesse, sa façon de s’habiller, ses goûts musicaux, son envie de danser, la liberté de s’asseoir à la terrasse des cafés avec des femmes. »

On notera qu’il n’y a pas si longtemps, Bernard Kouchner, alors ministre des Affaires étrangères, entendait, dans son enthousiasme d’éternel vieil adolescent, entraîner la France dans une guerre contre l’Iran, pays dans lequel les jeunes aiment aussi s’habiller, écouter de la musique, danser et partager la table des cafés avec les femmes. Va comprendre, Charles…

Alain et Bernard sont en bateau et qui tombe à l’eau ? À tous les coups Charlot.

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