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COP21, Financement, mauvaise foi des pays développés, profondément déçu, projet d’accord, Risques de dérapages

À quelques heures de l’échéance pour le dépôt samedi du projet d’accord qui sera soumis à la négociation ministérielle, les tractations climatiques de Paris semblent plus crispées que jamais autour de la question cruciale du financement réclamé par les pays en développement pour s’adapter aux bouleversements irréversibles du climat.
De plus en plus amers et mécontents de la tournure des négociations à la Conférence des parties (COP21), les États émergents ont carrément accusé jeudi les pays riches d’ignorer « les inquiétudes des plus pauvres et des plus vulnérables ».« Le message que nous recevons des pays développés » en matière de soutien financier pour l’adaptation aux changements climatiques, « c’est qu’il n’y a rien », a dénoncé le délégué bolivien Juan Hoffaister, au nom du groupe G77 + Chine, un poids lourd dans les négociations, puisqu’il représente pas moins de 134 pays émergents. Se disant « profondément inquiet » et « profondément déçu », il a dénoncé la « mauvaise foi » des pays développés, qui s’abstiennent de prendre des engagements fermes.
« Nous sommes à un point des négociations difficile, parce que nous n’avons plus beaucoup de temps. Les gens sont nerveux et irrités », a d’ailleurs reconnu Daniel Reifsnyder, l’un des présidents des travaux.Les demandes des pays en voie de développement sont très claires : ils réclament que les 100 milliards par an promis d’ici 2020 par les pays du Nord leur soient effectivement versés, que cette enveloppe augmente régulièrement après cette date et qu’une grande partie de ces fonds soit consacrée à l’adaptation aux effets du changement climatique.
Risques de dérapages Sans un engagement ferme en ce sens, les négociations pourraient tout simplement dérailler, a prévenu l’ambassadrice sud-africaine Nozipho Mxakato-Diseko, présidente du goupe G77 + Chine. « Ça passera ou ça cassera sur la question des financements », a-t-elle averti en conférence de presse.
« L’engagement de 100 milliards doit être tenu », avait lui aussi reconnu dans l’après-midi le président de la COP21, Laurent Fabius. Cette question des financements « sera une partie très importante de la discussion dans les jours qui viennent », avait-il ajouté. Les pays riches avaient promis à Copenhague en 2009 d’augmenter leur aide pour arriver en 2020 à 100 milliards de dollars par an. Selon un rapport de l’OCDE, leur aide s’est élevée à 62 milliards en 2014.Il faut dire que le groupe G77 + Chine est particulièrement affecté par le dérèglement climatique et les phénomènes extrêmes qu’il génère. Même si certains de ses membres — Chine et Inde en tête — sont aujourd’hui parmi les plus gros pollueurs de la planète, ce groupe a historiquement une faible responsabilité dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Ces pays défendent même leur droit de recourir aux énergies fossiles, dont le charbon, au nom du développement économique.
Réduire les options
Cette question financière n’est évidemment pas la seule à rester en suspens à Paris. Le texte du projet d’accord publié jeudi est certes passé de 55 à 50 pages, mais surcertains points, on constate des reculs. « Le nombre d’options ouvertes n’a pas été réduit : autour de 250. Et le texte comporte encore plus de crochets : 1400 au lieu de 1250 », a souligné Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot.« Un tel constat de lenteur est traditionnel dans les COP, mais cette fois il ne faut pas le prendre à la légère : si la COP de Copenhaguea échoué, c’est notamment parce que le texte sorti de la première semaine de négociations comportait trop d’options pour la deuxième semaine. Il y a là un point d’alerte fort », a-t-il prévenu.
Alors que les négociateurs doivent rendre leur projet de texte à M. Fabius samedi midi, le délégué de la Norvège Aslak Brun a mis en cause jeudi le processus de négociations lors d’une plénière tendue en fin d’après-midi. Il a regretté des lignes « très dures de toutes parts » et l’absence de volonté de « rapprocher les positions ».En conférence téléphonique, la négociatrice en chef du Canada, Louise Métivier, s’est néanmoins dite « optimiste » sur la suite des choses. Certes, a-t-elle souligné, les progrès sont « un peu lents » sur certains points, mais elle a dit avoir constaté certaines avancées. Elle n’a toutefois pas voulu détailler les points de discorde autour de la table des négociations.
http://www.ledevoir.com Avec l’Agence France-Presse