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élections régionales 2015, le Front national, les programmes, Les républicains, les socialistes, Second tour
Par LAURENT DE BOISSIEU
Dimanche 13 décembre, second tour des éection régionales. La Croix analyse les programmes de la droite, de la gauche et du Front national.
Christophe Morin/© Christophe Morin / IP
1 -La gauche a pour priorité l’emploi, l’accès aux transports et la santé
Les têtes de liste socialistes portent des projets qui ont subi des modifications à la marge après des accords de fusion avec les écologistes et le Front de gauche.
La recette des programmes des candidats socialistes ? Un mélange d’une dizaine de mesures nationales, de nombreuses propositions adaptées aux spécificités de chaque région et quelques concessions faites sur l’autel de l’union de la gauche pour le second tour.
« La santé à moins de 15 minutes de chez vous ».
Dans tous les projets, une base commune existe sur de grandes questions telles que les transports, l’emploi, la formation, l’éducation, la santé, le développement durable et l’écologie. La santé, par exemple, est un enjeu national qui ne relève pas des compétences des régions, mais celles-ci étant chefs de file en matière d’aménagement du territoire, les socialistes proposent de multiplier « les maisons de santé » pour lutter contre les déserts médicaux. En Île-de-France, Claude Bartolone se fixe cet objectif : « la santé à moins de 15 minutes de chez vous ».
Mobilité et la réduction des temps de transports
Mais pour l’essentiel, ce sont le numérique et surtout les transports qui occupent la plus grande part des engagements des candidats de la gauche. Alors que les régions récupèrent la compétence des départements en matière de cars en 2017, deux mesures sont annoncées presque partout. D’abord la gratuité des transports scolaires, pour aider les familles en milieu rural et périurbain et soutenir leur pouvoir d’achat. Ensuite la généralisation d’une tarification ou carte unique de transports comme il en existe déjà en Île-de-France et en Bretagne.
Les priorités sont toutefois différentes selon les territoires. Dans les Pays de la Loire, socialistes et écologistes mettent l’accent sur le soutien aux transports urbains de Nantes et du Mans et le maintien de lignes menacées (Nantes-Quimper, Caen-Le Mans-Tours, Nantes-Bordeaux). En désaccord sur le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, sujet politique à haut risque, ils ont trouvé un accord pour que la région finance « une étude indépendante » sur une « optimisation » de l’actuel aéroport de Nantes-Atlantique.
Offre de trains TER, plans parking voitures/vélos à proximité des gares, gratuité pour les apprentis et les chômeurs en formation… Le programme de la gauche en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes met aussi la priorité sur la mobilité et la réduction des temps de transports. Et là aussi, le candidat PS a dû accéder à une condition posée par les écologistes : il a accepté de « revoir le programme de financement » des futures lignes à grande vitesse (LGV), bien qu’il soit favorable à la réalisation de ces projets, en particulier la LGV Limoges-Poitiers.
Profitant des compétences renforcées en matière de formation professionnelle par la loi sur la nouvelle organisation des territoires, les candidats de la gauche proposent de nombreuses actions de soutien en direction des apprentis et des jeunes en situation de décrochage scolaire, un crédit de 100 heures de formation professionnelle ainsi que l’accès à des formations financées par les régions (chacune proposant entre 300 et 1 200 heures de formation qualifiante). Leurs programmes donnent aussi la priorité à l’emploi, en utilisant la transition énergétique et écologique comme un levier pour de nouveaux gisements d’emplois.
Plans antipollution
Enfin, les socialistes n’ont pas attendu les accords avec leurs habituels partenaires de gestion des régions pour parler d’écologie. Ils ont tous travaillé à des plans antipollution pour lutter contre les gaz à effet de serre et de rénovation de l’isolation thermique des logements. Deux engagements conformes à la feuille de route de la conférence climat de Paris (COP 21). Et tous manifestent le souci d’améliorer la qualité de l’alimentation : les cantines scolaires doivent être approvisionnées en produits bios, de saison et par des producteurs locaux.
2 – La droite a la volonté de maîtriser les dépenses publiques
Les candidats de droite insistent sur la nécessité de rompre avec une gestion de gauche, en proposant aussi des dépenses nouvelles.
Souci d’économies
Les candidats de droite se retrouvent pour demander une maîtrise des dépenses régionales, affichant leur volonté de rompre avec la gestion de gauche. D’une part à travers « le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ». D’autre part, comme Valérie Pécresse (LR) en Île-de-France, en proposant la « mise en place d’une évaluation systématique des politiques régionales ». Dans un souci similaire d’économies, Hervé Morin (UDI) entend, en Normandie, « créer une agence régionale unique de développement dotée de 100 millions d’euros et capable d’entrer en fonds propres ou quasi-fonds propres dans le capital des entreprises petites ou moyennes ».
Candidat en Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, Philippe Richert (LR), unique président de conseil régional sortant de droite en métropole, avance plusieurs mesures liées à l’international. D’une part, « créer une agence économique régionale d’ingénierie et d’accompagnement à l’internationalisation et à l’export ». D’autre part, « mettre en place un dispositif de bourses de mobilité transfrontalière et internationale pour les étudiants ».
Ambition pour les lycées
Autre compétence régionale : les lycées. François Sauvadet (UDI), tête de liste en Bourgogne-Franche-Comté, veut promouvoir à l’échelon régional des internats d’excellence, « lieux de vie et d’étude pour apprendre autrement et en réseau ». En Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez (LR) a l’ambition d’un « premier campus européen des métiers du numérique », ouvert aux étudiants en formation initiale comme aux professionnels en formation continue. « Surtout, il pourrait devenir un véritable centre de ressources pour les entreprises de la région qui doivent faire face à la révolution digitale et au défi du numérique », insiste le candidat.
Xavier Bertrand, en duel face à Marine Le Pen dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, propose de rendre accessibles à tous les habitants de la région, en dehors des heures de cours, les équipements des lycées. « C’est ma proposition : quand il n’y a pas cours, les équipements des lycées qui s’y prêtent doivent être accessibles à tous les habitants de la Région, et je pense particulièrement aux équipements sportifs, explique le candidat à la primaire présidentielle de droite. Cela profite aussi à nos jeunes de pouvoir accéder au gymnase du lycée pour s’entraîner en dehors du temps scolaire ! ».
Toujours en direction des jeunes, Christian Estrosi, également en duel face au FN, suggère d’étendre l’actuel dispositif mis en place par la gauche en instaurant « une tarification à 1 € par mois dans les transports, dans toute la région, pour les lycéens et les étudiants de moins de 26 ans ».
Enfin, de nombreux candidats de droite parlent des transports, une compétence régionale qui touche directement les habitants. En Centre-Val de Loire, Philippe Vigier (UDI) a l’idée d’une nouvelle gare TGV en Eure-et-Loir, à la bifurcation de la ligne Atlantique (Paris-Tours et Paris-Le Mans), afin de « placer le sud du département à 34 minutes de Paris et de relier Le Mans et la Bretagne ». En Normandie, Hervé Morin parle, lui, d’une « navette » ferroviaire rapide « reliant Rouen à Caen en 1 heure, et toutes les 30 minutes aux heures de pointe ». Autant de projets qui peuvent transcender les clivages politiques.
3 – Le FN défend le « patriotisme économique régional »
Les candidats d’extrême droite veulent « supprimer toutes les subventions aux associations communautaristes et d’accueil des clandestins ».
Marine Le Pen (Nord-Pas-de-Calais-Picardie) le reconnaît elle-même au sujet de Calais : l’immigration n’étant pas une compétence régionale, elle ne pourrait pas faire grand-chose, hormis « un maximum de barouf » pour attirer l’attention. Sur de nombreux sujets, la difficulté pour le FN consiste en effet à parvenir à décliner localement un projet national.
La « République référendaire » prônée par Marine Le Pen devient ainsi dans le programme de Marion Maréchal Le Pen (Provence-Alpes-Côte d’Azur) « l’usage du référendum local pour les grandes questions, et notamment les choix structurants qui engagent durablement l’argent public ». Sur la sécurité, les candidats d’extrême droite ont trouvé une fenêtre de tir en proposant, tous, la « création d’une police régionale des transports telle qu’il en existe en Île-de-France ».
« Manger français dans les cantines »
Mais c’est le « patriotisme économique régional » que le FN met en avant dans sa campagne. « Afin de favoriser le tissu économique local, le bon sens commanderait de faire profiter en priorité (et pourquoi pas même en exclusivité ?) les entreprises de Paca des marchés publics passés par la région », expose par exemple Marion Maréchal Le Pen. Pour ce faire, le FN utiliserait des normes sociales et environnementales contournant les règles européennes de la libre concurrence, ce qui lui permettrait de faire « manger français dans les cantines » des lycées, la benjamine de l’Assemblée nationale se fixant comme objectif « 50 % minimum de produits locaux ».
Toujours dans le domaine économique, certains candidats FN exigent « le remboursement des aides publiques aux entreprises en cas délocalisation, de licenciements ou d’embauche de travailleurs détachés ». D’autres plus libéraux, comme Nicolas Bay en Normandie, suggèrent que cette suppression ne s’applique pas en cas de licenciements. Marion Maréchal Le Pen vante en outre les « conventions de partenariat public-privé afin de mutualiser les moyens pour un moindre coût et plus d’efficacité », alors que la présidente du FN veut, à l’inverse, « réinternaliser certaines actions régionales ».
« Baisser le niveau des taxes régionales »
Les candidats du FN divergent également sur la fiscalité locale. Florian Philippot (Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine) ou Louis Aliot (Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées) s’engagent à simplement « geler le niveau des taxes régionales ». Christophe Boudot (Auvergne-Rhône-Alpes) évoque, lui, « un budget de rupture : baisser le niveau des taxes régionales ». Si Marion Maréchal Le Pen parle de « non-remplacement des départs à la retraite » alors que sa région n’a pas été modifiée, Marine Le Pen, dont la région a été agrandie, veut, « après une analyse attentive du fonctionnement de chaque service fusionné, supprimer les doublons par le non-remplacement de départs à la retraite ».
Par ailleurs, l’ensemble des candidats FN proposent de « supprimer toutes les subventions aux associations communautaristes et d’accueil des clandestins », sachant que l’extrême droite réfute la distinction juridique entre demandeurs d’asile et étrangers en situation irrégulière. Particularité : en Paca, Marion Maréchal Le Pen ne veut plus maintenir les subventions au Planning familial, même si elle assure « ne pas remettre en cause le droit à l’avortement ». La candidate dans le Sud entend par ailleurs que les subventions aux associations sportives soient « soumises au bon comportement, pour en finir avec la racaille qui pollue le sport amateur ». Elle se démarque encore en voulant supprimer le programme « MED – CAP Accueil », destiné à des étudiants étrangers, au profit d’une « bourse au mérite régionale ». Enfin, celle qui dénonce une « substitution de population » est pour la création d’une « vice-présidence à l’identité » et l’installation « de crèches dans l’ensemble des bâtiments de la région en période de Noël ».