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La globalisation a une sérieuse tendance à aplatir la terre : même fast-food, même chaine d’habillement, mêmes sodas, mêmes marques, mêmes films, mêmes musiques, même langue. En quelques décennies, le monde entier est devenu le terrain de jeu de bien des multinationales, réduisant la diversité de la planète. Mais il y a un domaine où cette marche en avant connaît une résistance : le vin.

Eloge de la terre et de l’humanité

Bien sûr, quelques maisons ont réussi à s’imposer dans la planète entière. Cependant, en comparaison de l’évolution de bien des catégories de produits, qui s’uniformisent et où la diversité recule, le vin conserve une spécificité, une unicité que cette globalisation ne semble pas parvenir à réduire. Déjà, le vin n’est pas tout à fait un produit, il a une dimension culturelle et son procédé de production ne peut pas suivre les modalités de tant de produits que nous consommons. Le vin, c’est un terroir, qui lui donne sa personnalité, la Bourgogne nous apprenant que quelques centaines de mètres peuvent changer le caractère d’un même cépage. C’est aussi un millésime : son caractère varie chaque année, l’effet millésime continuant à jouer, pour tous les vins, grands ou petits, dans un puzzle aux multiples facettes.

Mais outre le fait d’être ancré dans une géographie, et dans le temps, le vin est aussi le fruit du travail des hommes. Sa singularité ne vient pas seulement de son terroir, de son millésime, de ses cépages, mais aussi de tout le travail des vignerons qui le conçoivent : densité des cultures, soin de la vigne (effeuillage, produits utilisés), puis choix du jour de la récolte et élevage du vin jusqu’à sa mise en bouteille. Autant de choix qui façonnent des vins à la personnalité différente, parfois même quand ils sont voisins. Et enfin, le vin n’est pas un produit qui se dégrade dans le temps, il évolue, pendant des années, parfois même des décennies. Le vin nous impose la patience dans un monde où tout va trop vite, ce ne peut pas être mauvais. Au final, c’est un éloge de choses qui nous dépassent (le terroir, le climat), de notre travail et parfois de notre génie, de la diversité, du temps, à rebours des recettes trop uniformes et souvent insipides, quand elles ne sont pas trop sucrées, que produit cette mondialisation qui veut aplatir le monde.

Anti-thèse de la globalisation ?

Bien sûr, les esprits chagrins pourront, pas totalement à tort, regretter la globalisation des cépages, que l’on retrouve aux quatre coins du globe, parfois interprétés d’une manière caricaturale ou convenue. On peut aussi regretter l’influence de certains critiques, qui pousseraient à une forme d’uniformisation des vins, que l’on retrouve dans le succès de vins plus mûrs, souvent plus boisés, même s’il faut bien reconnaître que leur réussite devrait être respectée et repose sur un certain talent. Mais au final, je ne crois pas que nous allions vers une standardisation des vins, loin de là. Comme amateur, j’ai plutôt l’impression d’assister au contraire au succès et au renforcement de la diversité, comme si, dans le vin, l’humanité y retrouvait aussi sa richesse ainsi que sa propre diversité. Le plus impressionnant finalement, c’est qu’il n’y a pas qu’une démarche qui fonctionne, entre Moët et Chandon, les grands vins de Bordeaux, la famille Perrin dans le Rhône, Thierry Germain dans la Loire ou Alain Brumont dans le Sud-Ouest.

Ce qui est formidable avec le vin, c’est le foisonnement de propriétés attachantes, qu’une vie ne suffirait pas pour découvrir, à rebours de ces marchés standardisés dominés par une poignée de multinationales ou un seul acteur, le graal de cette nouvelle économie uniformisante et à la recherche de rente. J’ai l’impression que jamais la logique de la globalisation n’imposera sa logique et que le vin ne sera jamais, heureusement, transformé en un nouveau Coca. D’ailleurs, il suffit de voir comment les jeunes générations se passionnent pour le vin pour être optimiste. Et puis, par la logique du terroir et d’innombrables petits producteurs, le vin est structurellement en contradiction avec la logique uniformisatrice de la globalisation. On peut espérer que dans vingt ou cinquante ans, les choses n’auront pas changé.

Merci donc à tous les vignerons de faire vivre ce magnifique symbole de l’humanité, ancré dans le temps et la géographie, mais aussi sublimé par le génie humain, malgré certains excès, sans doute inhérents à l’humanité. La vigne est et restera un petit village qui résiste encore et toujours à cette envahissante et uniformisante globalisation, nous rappelant que l’homme vaut beaucoup mieux.

http://www.gaullistelibre.com