Étiquettes
accord franco-saoudien, Armée libanaise, l'Arabie saoudite, l’industrie militaire, Liban, sept hélicoptères Cougar, trois corvettes, un couac majeur, véhicules de combat
Anne Bauer / Journaliste Aéronautique Défense
L’Arabie Saoudite suspend l’aide accordée au Liban pour moderniser son armée avec la France. Un accord franco-saoudien qui portait sur 3 milliards de dollars.
C’est un coup dur qu’a infligé hier l’Arabie Saoudite au Liban, au gouvernement français et à l’industrie militaire de l’hexagone. Vendredi, un porte-parole officiel du Royaume a annoncé que le pays interrompait l’aide de 3 milliards de dollars promise au Liban afin qu’il modernise son armée nationale avec du matériel militaire française. La dernière partie d’une aide d’un milliard de dollars destinée aux forces de sécurité libanaises a aussi été gelée. Ryad, qui rompt ainsi un accord scellé en 2014 entre le président François Hollande et le prince héritier devenu souverain Salman Ben Abdel Aziz, ne met pas en cause la France mais le pouvoir pris par le Hezbollah au pays du Cèdre. Le porte-parole officiel a ainsi précisé que l’Arabie Saoudite avait pris cette décision en réponse « aux positions libanaises hostiles qui résulte de la mainmise du Hezbollah sur l’Etat ». Et de citer l’absence de condamnation par Beyrouth des attaques menées en Iran contre l’ambassade saoudienne et les campagnes de presse inspirées par le Hezbollah contre l’Arabie Saoudite.
Il n’empêche, Ryad met bien Paris au pied du mur. Car le contrat dit « Donas », signé à l’automne 2014 pour fournir 2,2 milliards d’euros d’équipements à l’armée libanaise – 250 véhicules de combat et de transports de troupes, sept hélicoptères Cougar, trois corvettes, des moyens modernes d’artillerie comme le canon Caesar et de multiples équipements de reconnaissance, d’interception et de communication_, devait se matérialiser réellement ce printemps, avec des livraisons échelonnées jusqu’en 2019. La France n’a pour l’instant fourni que 48 missiles antichar Milan, qu’elle a d’ailleurs prélevée sur ses propres stocks. Avec 400 millions d’euros de fournitures pour le matériel terrestre, 1,5 milliards pour la marine et le reste pour l’aéronautique, la plupart des compagnies d’armement française sont touchées.
Au-delà de la déconvenue industrielle, il s’agit bien d’un couac majeur avec l’un de nos principaux partenaires dans la coalition internationale contre Daech. A la mi-janvier, l’entourage du ministre de la Défense expliquait encore que les autorités saoudiennes étaient prêtes à poursuivre le contrat, l’intérêt partagé avec la France étant de contribuer à la stabilité du Liban. « Il existe un consensus franco-saoudien pour renforcer la seule institution inter-confessionnelle de ce pays fragile qui tient encore debout, à savoir son armée », expliquait-on alors à l’hôtel de Brienne. Las, les autorités saoudiennes estiment ne pas avoir obtenu de garanties suffisantes pour s’assurer que les armes livrées ne tomberont pas aux mains du Hezbollah. Et elles testent aussi l’engagement de la France vis-à-vis de Bachar al Assad et de la Russie dans le conflit en Syrie, au moment où elle s’allie avec la Turquie pour mieux lutter contre l’armée syrienne.