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baisse immédiate des charges sociales agricoles, baisser les charges, fixer des quotas, François Fillon, L'immigration, lever l’embargo économique sur la Russie, libérer le marché du travail, mettre la pression sur la grande distribution, réduire les effectifs de la fonction publique
Dans une fable de Lafontaine, il serait la tortue. Parti le premier en campagne pour la primaire de la présidentielle du parti Les Républicains, François Fillon est aujourd’hui en concurrence avec six autres candidats. Bientôt dix, peut-être.
Ce passionné d’automobile, qui considère la France com- me une Ferrari équipée d’un moteur de 2CV,déroule au fil de ses rencontres un programme politique qu’il dit “innovant, radical et efficace”. Vendredi soir, il sera en meeting public à 19 h 30 au centre des congrès d’Aix-les-Bains.
Vous annoncez un timing minuté pour relever les finances de la France. Avez-vous une baguette magique ?
«Non ! Juste un programme fouillé dans les moindres détails. Je dis qu’en deux ans, on peut inverser cette tendance actuelle d’une dette qui se creuse avec un déficit qui augmente. En cinq ans, on peut redresser le pays et dans moins de dix ans, figurer parmi les leaders européens. Comment ? En prenant dans les trois mois suivant l’élection présidentielle une dizaine de mesures très fortes, jamais prises ou non menées jusqu’au bout. Je reconnais que de 2007 à 2012, nous ne sommes pas allés assez loin. Aujourd’hui, je sais ce qu’il nous reste à faire.»
C’est-à-dire?
«Pour atteindre le plein-emploi, il faut libérer le marché du travail et baisser les charges pour tous. Quitte à augmenter la TVA. Et pour remettre en ordre nos finances, il faut réduire radicalement les effectifs de la fonction publique. Ça fait 30 ans qu’on refuse de s’atteler au problème. Or, tous nos voisins européens qui ont réduit leurs effectifs, donc leurs dépenses publiques, ont vu leur chômage baisser.»
Oui, avec des emplois précaires…
«En France, on préfère le chômage au travail partiel. C’est ce schéma dépassé et absurde qui est la cause de nos échecs. Le travail est trop verrouillé en France. Il est temps de laisser de la liberté de mouvement aux entreprises, comme aux salariés. Il faut redonner de la confiance aux citoyens et leur donner le pouvoir d’agir. Ça ne passera que par des mesures radicales. Si les sujets de société doivent se traiter dans le consensus et l’adhésion, en économie, il faut trancher pour avancer.»
Justement, en matière de société, vous dites “marre de l’égalitarisme”, place à la liberté.
N’est-ce pas anti-fraternel ?
«L’égalité, ce doit être celle des chances. Pas un carcan. À vouloir protéger les Français contre tout, à coup de réglementations, on est allés trop loin. Trop de normes tuent l’envie. C’est cette liberté-là que je veux réhabiliter, celle d’aller de l’avant.»
Vous voulez proposer aux Français une politique d’immigration par quotas, avec un référendum. Dans quel but ?
«La France a une identité. Pour que l’intégration fonctionne, l’immigration doit être ramenée à son strict minimum et organisée en fonction de nos besoins économiques et de nos capacités sociales. Je propose, oui, de fixer des quotas à travers un débat annuel au Parlement. Ça ne marchera que si les Français s’engagent. Le référendum, c’est le seul moyen, à mon avis, pour que cette question qui agite la France soit raisonnablement et efficacement traitée.»
Si vous étiez aux affaires, que feriez-vous pour les agriculteurs ?
«La première chose est de lever l’embargo économique sur la Russie, qui est en train de tuer notre production en la privant d’un gros débouché. Doivent suivre la baisse immédiate des charges sociales agricoles et le gel des réglementations environnementales purement françaises qui paralysent nos agriculteurs. Enfin, il faut mettre la pression sur la grande distribution, qui ne peut pas ignorer le risque qu’il y aurait à détruire des productions sans lesquelles il ne saurait y avoir d’avenir pour l’industrie alimentaire nationale. Exiger, comme le font certaines centrales d’achat, une baisse du prix du lait de 8 % dans le contexte actuel, c’est un acte stupide et dépourvu de toute vision à long terme.»
Que pensez-vous du référendum local sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ?
«Cela signifie qu’il n’y a plus de chef et plus guère d’État. Ce projet est porté depuis longtemps par des responsables politiques de droite et de gauche qui ont été élus localement sur ce programme.
La justice a été saisie à de multiples reprises et tous les recours ont été rejetés. Ce référendum n’est qu’un alibi pour permettre à François Hollande de ne rien décider.»
Un mot sur la candidature aux primaires de M. Copé, votre “meilleur ennemi” ?
«Je ne fais pas de commentaire sur mes concurrents. Ce sont les Français qui jugeront les hommes et les projets lors des primaires.»
Vous avez dit que vous arrêteriez la politique en cas d’échec. Ça tient toujours ?
«Je n’envisage pas l’échec, donc la question ne se posera pas ! [rire]. Ce que j’ai voulu dire, c’est que je ne suis pas dans une perspective de carrière. Je me présente parce que j’ai un vrai projet. Pas pour avoir une place en politique.»
Vous avez choisi de communiquer sur le fond plutôt que sur la forme. Un pari risqué qui ne vous donne pas beaucoup de lumière médiatique…
«Un pari risqué, peut-être, mais le seul à la hauteur de l’enjeu : proposer un vrai programme pour la France. C’est la seule chose qui m’intéresse. Les coups de menton et les postures m’exaspèrent. La primaire semble encore loin aux Français. Mais à l’automne, au moment de voter pour un futur candidat à la présidentielle, je suis sûr qu’ils s’attacheront au fond. Et je serai là !»
Propos recueillis par Muriel BERNARD