Étiquettes

, , ,

La crise des réfugiés a laissé l’UE KO debout et pour sauver Schengen, l’espace de libre circulation, ses dirigeants sont désormais contraints de négocier avec le président Turc Recep Tayip Erdogan, qui bafoue régulièrement les valeurs de l’UE.

Passer de la parole aux actes. C’est l’injonction lancée par le président du Conseil européen Donald Tusk dans la lettre d’invitation pour le sommet UE-Turquie, organisé lundi 7 mars, à Bruxelles.

Concrètement cela signifie pour la France de mettre enfin en œuvre son engagement à prendre en charge 30 000 demandeurs d’asile syriens et irakiens arrivés en Italie et en Grèce depuis l’été 2015 pour soulager ces deux pays.

Paris a pour l’instant proposé 1 300 places et 135 réfugiés ont été installés : 94 venus de Grèce et 41 d’Italie. La France n’est pas la seule mauvaise élève. La solidarité avec la Grèce et l’Italie prévoit la répartition de 160 000 demandeurs d’asile sur deux ans au sein de l’UE.

Or, à ce jour 642 seulement ont été pris en charge. Dans les faits, les réfugiés sélectionnés par la France étaient déjà partis pour l’Allemagne, le pays où tous veulent se rendre, attirés par les chances de trouver un emploi et un système d’aide bien plus généreux qu’ailleurs dans l’UE.

Plus de prétextes

Mais, aujourd’hui, le gouvernement français n’a plus de prétextes pour tergiverser. La Grèce a accepté le déploiement de garde-frontières européens à sa frontière avec la Turquie, les centres de tri réclamés par Paris sont opérationnels, le taux d’enregistrement et d’identification des arrivants est passé de 50 % à 70 % des arrivants, la frontière avec la Macédoine est sous contrôle, l’armée grecque a été mobilisée pour construire des camps pour 50 000 personnes.

« Nous avons fait notre part, les autres membres de l’UE doivent respecter leurs engagements », avertit le Premier ministre grec Alexis Tsipras.

Le problème passe désormais aux villes et aux communes d’accueil dans l’UE. Ces dernières sont en première ligne et manquent de financements.

« Il faut respecter l’équilibre social des villes et éviter l’incompréhension des populations en attribuant aux réfugiés des logements sociaux, sinon ce sont des voix en plus pour le Front National », avertit le Français Frédéric Vallier, secrétaire général du Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE).

Sommet crucial

« Le sommet de lundi est crucial pour la relation avec la Turquie et il sera l’heure de vérité pour l’Union européenne, pour sa capacité à mettre en œuvre des décisions prises ensemble », a averti le commissaire Dimitris Avramopoulos.

L’équipe dirigée par Jean-Claude Juncker a soumis un plan d’actions pour sauver Schengen, l’espace de libre circulation mis à mal par les fermetures des frontières nationales.

Les Européens attendent beaucoup du Président Erdogan et de son Premier ministre Ahmet Davutoglu pour bloquer en Turquie les flux de réfugiés et de migrants économiques arrivés facilement dans leur pays, car Ankara n’exige pas de visa d’entrée.

Mais il n’est pas question de marchander un accord, assure la Commission, sans vraiment convaincre. Les Européens n’ont pas d’autre choix que de traiter avec Erdogan, pourtant peu soucieux des critiques formulées en Europe lorsqu’il bafoue les droits fondamentaux et la liberté de la presse.

La Turquie héberge 2,7 millions de Syriens et ne veut pas les intégrer, ni leur permettre de travailler pour éviter qu’ils ne s’installent. Le risque est grand d’un exode vers l’UE. Il ranimerait les mauvais démons qui, à Vienne et à Bratislava, veulent exclure la Grèce de Schengen.

« L’enjeu c’est l’existence même de l’Europe », a averti François Hollande.

 

https://www.contexte.com/