Emanation des revendications féministes du début du XXème siècle en Europe et en Amérique, la journée internationale des femmes a été officialisée en 1977 par l’Organisation des Nations Unies. Tous les pays ont été invités à proclamer un jour en fonction de leurs coutumes et de leurs traditions historiques et nationales pour les droits des femmes et la paix internationale.
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Merci Lénine !
Dès le début du XXème siècle, de plus en plus de femmes se mobilisent à travers l’Europe et l’Amérique pour réclamer le droit de vote, la suppression du travail des enfants et dénoncer les bas salaires. Une manifestation qui avait mobilisé des milliers de femmes à New-York le 8 mars 1908 est restée dans l’histoire comme le point de départ d’une lutte qui dure encore aujourd’hui. Mais ce n’est qu’en 1910, lors de la deuxième conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague que la leader socialiste allemande, Clara Zetkin, évoque l’instauration d’une journée internationale des femmes pour promouvoir leur combat dans le monde entier. Les revendications féministes rejoignent celles des mouvements ouvriers et en mars 1911, des milliers de femmes manifestent aux Etats-Unis, en Allemagne, en Suisse et en Autriche. La tradition du 8 mars se met réellement en place en 1917 en Russie avec la grève des ouvrières de Saint Petersbourg qui réclament du pain et le retour de leur mari parti au front. Quatre jours plus tard, le tsar abdique et le gouvernement provisoire accorde le droit de vote aux femmes russes. En 1921, Lénine décrète que le 8 mars sera la journée internationale de la femme.
Après 1945, la journée est célébrée dans les pays de l’Est et la tradition s’étend progressivement au monde entier.
Une journée de célébrations…
En 1975, l’ONU reconnaît officiellement cette journée consacrée aux femmes qui devient l’occasion d’esquisser un bilan annuel sur les avancées faites pour leurs droits à travers le monde et de décider des objectifs à atteindre.
La majorité des pays de l’Europe de l’Est décrète que le 8 mars serait un jour férié. Cette tradition repose sur l’héritage de l’URSS qui avait décidé d’une journée de repos pour les ouvrières. Depuis, cette journée a légèrement perdu de sa teneur politique dans ces pays et a été progressivement associée au printemps et la fertilité. En Arménie, au Kazakhstan, en Moldavie ou encore en Géorgie, la journée des femmes est l’une des fêtes nationales les plus populaires.
Pendant cette journée, les hommes sont censés couvrir leur femme de petites attentions. L’Arménie a même surnommé la période qui s’étend du 8 mars au 7 avril, « le mois de la femme ». Tandis qu’en Chine, depuis 1949, la demi-journée seulement est fériée et pour les femmes uniquement.
… mais aussi de mobilisations partout dans le monde
Sous l’impulsion de l’ONU depuis 1977, cette journée a atteint une dimension politique nouvelle. Le thème de l’année 2016 est la parité, l’ONU se fixe comme objectif d’atteindre d’ici 2030 l’égalité complète des sexes. « Les pays dans lesquels les femmes sont traitées sur un pied d’égalité avec les hommes jouissent d’une meilleure croissance économique… Il ne fait donc pas l’ombre d’un doute que l’égalité entre les femmes et les hommes est un avantage pour tous » a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon.
Au delà de l’élan international que suscite cette journée, beaucoup de pays sont le théâtre de mobilisations parfois spectaculaires. En 2015, à la veille de la journée des femmes en Afghanistan, des hommes ont défilé en burqa dans les rues de Kaboul, pour protester contre ce vêtement traditionnel considéré comme un symbole d’oppression imposé par les Talibans dans les années 1990.
Au Brésil, pays dans lequel l’avortement n’est autorisé qu’en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère, plus de 3.000 femmes ont défilé en 2015 dans les rues de São Paulo pour réclamer sa légalisation et lutter contre le machisme ambiant. Selon les chiffres officiels, quinze femmes sont tuées chaque jour au Brésil pour le simple fait d’être des femmes. Deux jours plus tard, le 10 mars 2015, la Présidente Dilma Roussef signait une loi mentionnant que le « féminicide » serait désormais considéré comme circonstance aggravante au crime d’homicide. Quinze autres pays d’Amérique du Sud sont dotés de ce genre de lois.
La lutte peut également se jouer sur la toile. A l’occasion de la journée de la femme en mars 2015, RFI consacrait une émission à la représentation des femmes sur l’encyclopédie en ligne Wikipédia. Des internautes américaines ont réalisé que la fiche des écrivains américains ne prenaient pas en compte les écrivaines américaines, les plaçant de facto dans une sous-catégorie et non comme des auteurs à égalité avec les hommes. Des « wiki-édithatons » ont été organisés pour inciter les gens à réécrire des fiches d’artistes femme dont la sémantique était encore trop « genrée ». En mars 2015, ces sessions ont eu lieu au MoMA à New York, à Amsterdam, à Los Angeles, à Berlin, en Italie, ou encore en France.
Une journée qui est surtout placée sous le signe du bilan et de la réflexion
D’autres pays en profitent pour engager une réflexion plus nationale sur la place de la femme dans la société. Des manifestations culturelles ainsi que des débats sont organisés un peu partout dans le monde pour réfléchir à la place des femmes dans la société.
Ainsi au Burkina Faso, la journée de 2016 est placée sous le thème du développement de l’entreprenariat agricole des femmes. Dans un pays où 60% de femmes vivent d’une activité de production agricole, ce thème est un facteur déterminant dans la lutte pour l’autonomisation et l’émancipation des femmes burkinabés. Cette journée sert donc à rappeler quelles sont les actions politiques qui ont été menées jusqu’ici – comme le Programme Spécial de Création d’Emplois pour les Jeunes et les Femmes et ce qui reste à accomplir. Le gouvernement encourage aussi les femmes à porter le pagne traditionnel, le « Faso dan fani », littéralement le « pagne tissé de la patrie » pour valoriser la production des tisseuses burkinabés et encourager la consommation des produits locaux. Enfin lors de cette journée, les femmes ne travaillent pas et ce sont les hommes qui font les emplettes. Les commerçants burkinabés augmenteraient alors le prix des produits pour duper les hommes qui ignorent les prix réels ne faisant jamais les courses le reste de l’année.
Au Cameroun aussi, la journée internationale des femmes est considérée comme l’une des fêtes nationales les plus importantes, portée par un engouement extraordinaire. Cette année, les festivités ont débuté le 1er mars 2016 et durent une semaine, rythmées par des manifestations culturelles, des journées gastronomiques et des défilés organisés par différentes associations. L’ensemble de la société est mobilisé, les Camerounaises défilent ensemble, vêtues du pagne traditionnel, pendant des heures. En 2015, le défilé à Yaoundé, parrainé par la première dame du Cameroun, a duré près de 3h30. Cette année le thème au Cameroun porte sur l’« Egalité des sexes et autonomisation des femmes : gagner le pari, surmonter les obstacles ».
La réflexion s’amorce aussi sur des supports différents. Ainsi, le collectif AfricaFrance, qui rassemble des Etats, des entreprises, des collectivités locales, des associations, des établissements d’enseignement et de recherche, organise un événement digital sur Twitter pour la journée du 8 mars 2016, à 19 heures (heure de Paris). Cette initiative s’est donné comme but de créer un débat panafricain et recueillir des témoignages, des propositions, des réponses sur comment favoriser la place de la femme dans la croissance économique en France et en Afrique, autour de l’hashtag #8MarsenAfrique.