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Thomas Piketty
Les banques françaises réalisent un tiers de leurs profits internationaux dans des territoires classés comme paradis fiscaux. Alors même que ces territoires ne regroupent que 4,5% de la population totale (et 7,5% du PIB total) des pays dans lesquels elles opèrent. C’est l’une des conclusions obtenues par Oxfam, Ccfd-Terre solidaire et le Secours Catholique-Caritas France dans un rapport publié ce matin, dans lequel les trois ONG épluchent les comptes 2014 rendus publics par les banques françaises dans le cadre des nouvelles législations. Le rapport est disponible ici, et toutes les données saisies dans les comptes sont en ligne là.
Certains s’interrogeront sur la définition adoptée pour les paradis fiscaux (fondée sur les listes officielles, qui malheureusement ne sont pas toujours cohérentes, ce qui peut difficilement être reproché aux ONG), et surtout regretteront les nombreuses limitations et incohérences des données rendues publiques par les banques. Rappelons également que le reporting pays par pays ne s’applique toujours pas à l’ensemble des grandes entreprises des autres secteurs (seul le secteur bancaire est concerné à ce stade), car le gouvernement français s’y est honteusement opposé en décembre 2015.
Mais l’essentiel est ailleurs: la preuve est maintenant faite que le reporting pays par pays est un outil indispensable de transparence financière et démocratique. Ce rapport permet de constater que malgré tous les discours les banques françaises continuent encore aujourd’hui de localiser dans les paradis fiscaux une part considérable de leurs profits, totalement disproportionnée et injustifiable par rapport à l’activité économique réelle réalisée dans les différents pays. Ces données permettent également de se faire une idée des pertes de recettes fiscales entraînées par l’opacité financière et l’absence d’un impôt européen unifié sur les bénéfices des grandes sociétés, au moins au niveau des pays de la zone euro qui y sont prêts. Cette démarche doit être saluée et approfondie à l’avenir.