En plein Brexit, l’anglais toujours roi dans les instances européennes !

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À Strasbourg et à Bruxelles, places fortes d’une construction européennen’ayant plus d’européen que le nom, c’est l’anglais qui règne en maître.

Nicolas Gauthier, Journaliste, écrivain

La France, ce n’est pas rien. Deuxième espace maritime au monde. Grâce aux confettis de son lointain empire, jamais le soleil ne se couche sur elle. Mieux : grâce à la francophonie, des millions de Terriens parlent notre langue sur tous les continents.

À Strasbourg et à Bruxelles, places fortes d’une construction européenne n’ayant plus d’européen que le nom, c’est l’anglais qui règne en maître. Pour cela, Londres n’a même pas eu besoin de recourir à sa traditionnelle hégémonie ; la lâcheté des dirigeants du Vieux Continent a suffi. Même chez nos confrères de Libération, on s’alarme de cet état de fait ; c’est dire…

Ainsi, Jean Quatremer, spécialiste de la question – il doit être l’un des derniers journalistes à couvrir l’actualité européenne à temps plein pour la presse française -, s’indigne-t-il en ces termes : « Le temps où Umberto Eco pouvait affirmer que “la langue de l’Europe, c’est la traduction” appartient à un lointain passé. Aujourd’hui, il constaterait que “la langue de l’Union européenne, c’est l’anglais”. Ceux qui osent s’en étonner, voire protester, sont renvoyés à leur ringardise, leur nationalisme, leur refus de modernité, leur franchouillardise [ça, c’est pour les Français]. »

Et l’estocade, pour finir : « Certes, on compte toujours 23 autres langues officielles dans l’Union mais, vu de Bruxelles et de Francfort, il s’agit d’autant d’idiomes tribaux, survivance des vieux États-nations, voués à être sacrifiés sur l’autel d’une construction communautaire qui sera anglophone ou ne sera pas. »

Logique, donc, que le site Internet de la Commission européenne soit entièrement – et exclusivement – rédigé en anglais. La traduction serait-elle trop coûteuse ? Même pas, nous rappelle opportunément Jean Quatremer : « 60 centimes d’euros par an et par Européen… »

Assez paradoxalement, ce ne sont pas les Français qui se rebiffent, mais nos voisins allemands, dont les banques rédigent désormais leur courrier destiné à la Banque centrale européenne dans la langue de l’inspecteur Derrick.

Et le même Jean Quatremer de conclure : « La montée des euroscepticismes trouve là en partie son explication : comment accepter d’être dirigé dans une langue qu’on ne comprend pas, langue qui véhicule un système de valeurs qui n’est pas issu d’un compromis linguistique, comme cela a longtemps été le cas, d’où, par exemple, les accusations récurrentes en France “d’ultralibéralisme européen” ? L’anglais, ou plutôt le “globish”, sera peut-être un jour la langue appauvrie des Européens. »

Assez paradoxalement, on notera qu’il aura fallu que l’Angleterre songe à quitter les institutions européennes – le plus tôt sera évidemment le mieux – pour que le débat s’ouvre enfin.

Et ce, par le biais d’un journaliste dont l’employeur n’est pas précisément connu pour son patriotisme à la sauce Déroulède, qui plus est.

Boulevard Voltaire – La liberté guide nos pas

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