Par Marie Théobald ,
Ce 1er mai 2016, à Paris.

Plusieurs milliers de personnes rassemblées dimanche après-midi, place de la Bastille, ont pris le départ du traditionnel défilé. Très rapidement, des tensions sont apparues en tête de manifestation et les forces de l’ordre ont bloqué le cortège à plusieurs endroits.

Le grand défilé parisien du 1er Mai, qui s’est élancé peu après 15 heures de la place de la Bastille, a rapidement connu plusieurs interruptions peu après son départ liées aux tensions entre certains manifestants et forces de l’ordre.

Plusieurs journalistes présents ont indiqué que le cortège avait été stoppé peu avant 16 heures, boulevard Diderot, par un cordon de CRS. Un groupe de manifestants situé en tête de cortège a lancé des projectiles (cartons récupérés aux ordures, bouteilles) sur les forces de l’ordre en criant: «Tout le monde déteste la police». Les CRS ont riposté par des tirs de gaz lacrymogène, avant que le calme ne revienne.

A 16h25, les CRS ont chargé sur l’avenue Diderot pour disperser ces groupes, au milieu desquels une seule banderole proclamait «Soyons ingouvernables». Les CRS ont été rejoints par des policiers en tenue anti-émeutes. La BAC était également bien visible. Après leur intervention, le calme est temporairement revenu, juste troublé par les slogans et les sifflets.

Un manifestant fait face aux forces de l'ordre, dimanche à Paris, sous des nuages de gaz lacrmogène.

Avenue Daumesnil déjà, les CRS avaient été sifflés et hués par des dizaines de manifestants, certains très virulents, qui criaient «Cassez-vous!» ou «dehors la police!». Certains jeunes étaient équipés de casques attachés à leur sac.

En-dehors de la tête du cortège, des milliers d’autres manifestants défilaient dans le calme avant d’être bloquée par un cordon de CRS boulevard Diderot. Pour cette foule, un autre slogan résumait l’état d’esprit: «Retrait, retrait, de la loi travail. Ni amendable ni négociable», faisant écho aux mots d’ordre scandés dans les défilés ayant eu lieu plus tôt dans d’autres villes de France.

À 18 heures, la CGT a annoncé avoir décompté 70.000 manifestants dans le défilé parisien. La préfecture de police n’avait pas encore publié de chiffre officiel.

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Ariane Griessel ‎@arianegriessel

Bd Diderot et rue adjacentes bloqués, les manifestants reculent ou font demi-tour (vers où?)

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Antoine Guibert ‎@thisisguibz

Ça commence à être très tendu Voir l'image sur TwitterAntoine Guibert ‎@thisisguib

Ça commence à être très tendu

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Lila ‎@Lilabellili

Les policiers repoussent les manifestants à Paris

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Marc de Boni
‎@MarcdeBoni

La tension monte crescendo, les manifestants de la tête du cortège attendent de voir l’encerclement levé, en vain

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Olivier Tesquet
‎@oliviertesquet

Violents affrontements au niveau du métro Reuilly-Diderot

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Juliette Harau ‎@juliette_harau

Le défilé du n’avance plus. Les explosions et sifflets ont remplacé la fanfare.

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Juliette Harau ‎@juliette_harau

Le défilé du n’avance plus. Les explosions et sifflets ont remplacé la fanfare.

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v23id ‎@v23id

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Thomas Baïetto ‎@ThomasBaietto

Bras levés, le cortège avance à nouveau

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Clément Lanot ‎@ClementLanot

Très très tendu. @RadioLondres_fr

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Juliette Harau ‎@juliette_harau

A 20m, la police avance. « On recule doucement », leitmotiv des manifestants dans la foule.

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Lucas Arland ‎@LucasArland

Many police present to contain during in , fights but things seem under « control »

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Ellen Salvi ‎@ellensalvi

Avec les yeux qui piquent.

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Clément Lanot ‎@ClementLanot

Les manifestants réclament le passage. @RadioLondres_fr

Syndicats alliés contre la loi travail

Plus tôt, nous observions qu’une fois n’était pas coutume, CGT et FO, séparés depuis 1947, défilaient côte à côte pour la première fois depuis sept ans. La cause de cette alliance de circonstance? L’opposition à la loi travail qui les unis depuis presque trois mois et sept manifestations. Un slogan, place de la Bastille, résumait l’état d’esprit des participants: «Retrait, retrait, de la loi travail. Ni amendable ni négociable», faisant écho aux mots d’ordre scandés dans les défilés ayant eu lieu plus tôt dans d’autres villes de France.

Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO et son homologue de la CGT, Philippe Martinez, conduisaient la manifestation pour réclamer «le progrès social». Les leaders de FSU, Solidaires et des organisations étudiantes (Unef) et lycéennes (UNL et FIDL) étaient aussi présents.

«Je pense que le gouvernement peut toujours retirer sa loi s’il écoute l’opinion publique, s’il écoute la mobilisation», a déclaré Philippe Martinez à des journalistes. «Dans le programme de la majorité, il n’y avait pas de réforme du droit du travail, il n’y avait pas inscrit qu’il fallait casser les droits des salariés. Les députés qui font partie de cette majorité rendront des comptes», a-t-il ajouté. «Le gouvernement ne doit pas faire la sourde oreille face à la mobilisation. Nous sommes là pour que la loi travail soit retirée», a dit en écho Bernadette Groison, n°1 de la FSU.

Bernadette Groison de la FSU, Philippe Martinez de la CGT et Jean-Claude Mailly de FO, ont défilé derrière une barrière commune.

Plusieurs milliers de manifestants en province

Des manifestations et rassemblements avaient déja eu lieu en province au cours de la matinée.

Selon France Info, 12.000 manifestants ont été comptabilisés par les organisateurs à Toulouse et 1800 d’après la police. Dans les autres villes, on en compte entre 2000 (police) et 4000 (syndicats) à Bordeaux, un millier à Tours comme à Nancy, 700 à Dijon, 600 à Orléans, 900 à Limoges, Clermont-Ferrand et le même nombre à Périgueux, 400 à Brest et Mulhouse, 300 à Cherbourg et Nice, entre 1900 (police) et 5000 (organisateurs) à Nantes, quelques centaines à Marseille, entre 950 (police) et 2000 (organisateurs) à Lille, 2000 à Lyon, 1200 à Grenoble.

A Rennes, plusieurs centaines de jeunes ont envahi à la mi-journée un cinéma du centre-ville, peu après l’arrivée de la manifestation à laquelle ils avaient participé, entrainant l’évacuation du cinéma de tous ses clients.

Le cortège officiel a réuni entre 2000 personnes, selon la police, et 3500 selon la CGT. Plusieurs centaines de jeunes, dont certains cagoulés, ont à un moment stoppé le défilé pour mener une action de revendication contre les «violences policières» sur une passerelle enjambant la Vilaine, près de laquelle un étudiant manifestant de 20 ans a été grièvement blessé par un projectile lors de la manifestation de jeudi et a perdu définitivement l’usage d’un oeil. Après avoir peint en rouge la passerelle, ils ont tagué «Police Mutile» sur les lieux avant de repartir avec le cortège en criant: «Ça crève les yeux, la police mutile, la police assassine!».

De leur côté, les syndicats réformistes (CFDT, CFTC et Unsa et la FAGE pour les étudiants) ont organisé des tables rondes, ce dimanche matin, dont l’une sur la loi travail.

Mise en garde contre la violence

De Nouvelle-Calédonie, le premier ministre Manuel Valls a adressé une ferme mise en garde aux éventuels «casseurs», appelant les organisateurs des manifestations du jour à prendre «leurs responsabilités». En effet, le bilan de la dernière manifestation, jeudi 28 avril, a fait état de 214 interpellations et 78 policiers blessés. Un jeune homme à Rennes a également perdu la vision d’un oeil. Samedi 30 avril, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a envoyé des consignes aux préfets sur les mesures à prendre pour éviter les débordements.

De son côté, la CGT a dénoncé la «répression», selon elle, des militants syndicaux, tandis que le Parti de Gauche demandait samedi «des comptes» à Bernard Cazeneuve dénonçant «l’escalade de la violence» policière. Quant au secrétaire général de FO, il a souligné, ce dimanche sur iTÉLÉ, la difficulté de contrôler «les casseurs» en marge des manifestations. «On ne peut pas protéger toute l’avenue, on protège la manifestation en tant que telle». Pour autant, «la police fait son travail», a-t-il estimé.

Syndicats peu représentatifs

Le 1er mai cette année prend une tournure spécifique avec l’avènement du mouvement Nuit debout, lancé au soir du 31 mars, jour de la plus grosse mobilisation contre la loi travail.

Dimanche, des responsables syndicaux ont prévu de se rendre place de la République. Jeudi soir, Philippe Martinez y est intervenu pour la première fois: «Les valeurs de la CGT sont compatibles avec Nuit debout», a-t-il clamé. Mais selon un sondage réalisé par l’institut Odoxa pour Le Parisien, paru samedi 30 avril, 72% des Français estiment que l’action des syndicats pour défendre les intérêts des salariés est inefficace. Sont-ils en phase avec les salariés? Seuls 16% des Français répondent «oui». Quant à Nuit debout, il n’est plebiscité que par 17% des Français.

Pour Agnès Verdier-Molinié, directrice de l’iFRAP, think tank libéral, «cette situation (de blocage pour la loi travail NDLR) démontre une représentation syndicale à bout de souffle (…) L’opinion publique sent confusément que nos syndicats sont plus les tenants de l’immobilisme et du statu quo. Dans toutes les réformes, ils défendent leurs rentes sectorielles et les font même jouer les unes contre les autres».

Le projet de loi travail sera examiné à l’Assemblée nationale à partir de mardi. 5000 amendements ont été déposés.

http://www.lefigaro.fr/