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Par Hayat Gazzane

Depuis plusieurs jours, le gouvernement de Manuel Valls dénonce une «logique de blocage» face à sa loi travail.

Après avoir décidé de repousser «jusqu’à nouvel ordre» le vote sur les amendements, le premier ministre va, selon RTL, confirmer le passage en force ce matin devant le groupe socialiste à l’Assemblée.

Le gouvernement semble bien décidé à recourir à la méthode forte pour faire passer sa très contestée loi travail. Selon RTL, le premier ministre Manuel Valls devrait annoncer l’utilisation du 49-3 ce mardi matin devant le groupe socialiste à l’Assemblée. Avant cela, à 8h30, il discutera de ce choix avec les principaux dirigeants du parti lors du petit-déjeuner hebdomadaire de la majorité. Une heure plus tard, à Matignon, il recevra des députés socialistes, et notamment des «frondeurs», pour tenter la discussion de la dernière chance. Il manque en effet «30 à 40» voix pour obtenir une majorité sur ce texte, selon le président du groupe socialiste Bruno Le Roux. Mais d’après RTL, cette ultime discussion ne servira qu’à acter le blocage. Sauf surprise, à 11 heures, lors de la réunion du groupe socialiste, Manuel Valls viendra devant les députés et annoncera le recours au 49.3. L’utilisation de cet outil qui permet de faire adopter un texte sans vote, mais en engageant la responsabilité du gouvernement, devrait ensuite être validée lors du Conseil des ministres demain.

Christian Jacob, le président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, a déjà fait savoir qu’il déposerait une motion de censure:

« En cas de 49.3, nous déposerons une motion de censure », dit Christian Jacob

Les membres du gouvernement défendent, pour leur part, la manoeuvre. «Le gouvernement, sur la loi travail, a montré qu’il était capable de passer des accords, de proposer des compromis, de faire des avancées (…) Le premier ministre décidera mais il faut savoir voter les textes qui sont proposés», a indiqué la ministre de la Santé Marisol Touraine sur RTL ce matin. Sur Europe 1, le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Patrick Kanner, a défendu cette «arme constitutionnelle»:

Sur la et le 49.3 : « C’est une arme constitutionnelle, elle peut être utilisée » @PatrickKanner

Lundi soir déjà, le gouvernement avait décidé de repousser les votes sur les amendements «jusqu’à nouvel ordre». Un report décidé après les blocages dans les débats sur l’article 1 qui prévoit de créer une commission chargée de proposer une refondation de la partie législative du Code du travail. Voyant dans cette décision de suspendre les votes la confirmation d’un usage imminent du 49-3, plusieurs élus ont dénoncé un «simulacre».

La menace du 49-3 plane sur les discussions depuis leur début et ce alors que les députés ont en théorie jusqu’à jeudi soir pour débattre des quelque 5000 amendements, avant le vote solennel prévu le 17 mai. Vendredi dernier, Manuel Valls avait glissé qu’«il ne faut jamais renoncer à un moyen constitutionnel». Avant le pont de l’Ascension, certains au gouvernement jugeaient aussi «certain» un recours au 49-3, car «l’article 2, le plus gros problème, arrive d’entrée». Cet article, qui n’a pas été abordé lundi, et sur lequel le rapporteur a proposé un nouveau «compromis», vise à donner la primauté à l’accord d’entreprise en matière de temps de travail. Il concentre plus d’un tiers des amendements et beaucoup de critiques à gauche, au-delà des «frondeurs».

Le sénateur socialiste Luc Carvounas a déjà fait savoir que forcer au 49-3, utilisé trois fois pour la loi Macron en 2015, serait «un message dévastateur dans notre électorat». Pour le chef de file des «frondeurs», Christian Paul, c’est l’exécutif qui prend «la responsabilité d’une fracture durable» s’il ne bouge pas.

Interrogé sur l’usage du 49-3, le patron du Medef, Pierre Gattaz, a affirmé sur France 2 ne pas avoir de «conseils à donner au gouvernement. Je lui demande de revenir à l’esprit initial du texte pour créer des emplois. C’est à lui de prendre ses décisions». Pour rappel, le Medef doit décider prochainement d’un éventuel retrait de la négociation d’assurance chômage, une menace brandie à la mi-avril pour obtenir un projet de loi travail «profondément corrigé».

De leur côté, les syndicats sont déjà en ordre de bataille. La CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, Fidl et UNL appellent à une cinquième journée de mobilisation jeudi. S’y ajoutent Nuit Debout et une grève reconductible des routiers appelée par la CGT et FO, à partir du 16 mai. Dans Le Parisien ce mardi, le numéro un de FO, Jean-Claude Mailly, demande l’organisation d’un référendum sur cette loi travail. «Le 49-3 est un déni de démocratie, voilà pourquoi je réclame un référendum», a-t-il déclaré. Selon un sondage Odoxa publié vendredi, plus de sept Français sur dix (71%) trouveraient «choquant» que le gouvernement utilise l’arme du 49-3 pour faire adopter le projet de loi travail sans vote en engageant la responsabilité du gouvernement.

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