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L’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura (au premier plan) et son conseiller pour les affaires humanitaires Jan Egeland, jeudi à Genève. MARTIAL TREZZINI
Pour les assiégés en Syrie, le salut viendra-t-il du ciel? Devant le blocage des convois d’aide, principalement par le régime de Bachar el-Assad, l’ONU menace de recourir à des largages aériens. «Si rien n’évolue d’ici le 1er juin, nous considérerons sérieusement cette option», a déclaré jeudi l’envoyé spécial de l’ONU Staffan de Mistura.
Mardi à Vienne, l’émissaire onusien avait reçu le mandat d’explorer cette piste de la part du groupe international de soutien à la Syrie. Cette instance, co-présidée par les Etats-Unis et la Russie, réunit toutes les puissances dans la résolution de la crise syrienne. Lors de la réunion, il y avait «une profonde insatisfaction, une impatience», a relaté Staffan de Mistura.
«La seule bonne nouvelle»
Le jeudi précédent un convoi humanitaire pour Daraya, le premier à recevoir le feu vert de Damas depuis quatre ans, avait été refoulé par les soldats syriens au motif qu’il transportait du lait pour bébés. L’armée avait ensuite bombardé les habitants de cette ville de la périphérie de Damas rassemblés pour attendre les camions des Nations unies et de la Croix-Rouge, faisant deux morts et plusieurs blessés.
La situation sur le front humanitaire ne s’est depuis pas améliorée. Mercredi, un convoi est parvenu pour la première fois depuis 2013 à Harasta, également dans les environs de Damas. «C’est la seule bonne nouvelle, a admis Jan Egeland, qui a présidé jeudi une nouvelle réunion sur l’accès humanitaire. Au mois de mai, nous avons pu aider moins de 5% des 900 000 personnes que nous avions prévu d’atteindre.» Malgré ses demandes répétées au gouvernement syrien, l’ONU n’a toujours pas pu accéder à cinq zones assiégées, dont Daraya, sur les 18 identifiées. Les rebelles ont aussi resserré leur étreinte sur les enclaves de Foua et Kefraya, deux bourgs chiites dans le nord du pays.
Le précédent de Deir-ez-Zor
Ces six dernières semaines, les avions du Programme alimentaire mondial (PAM) ont largué à 35 reprises des vivres sur la ville de Deir-ez-Zor, dans l’est du pays, encerclée par l’Etat islamique. Assez pour fournir des rations alimentaires pour 100 000 personnes. «Mais un seul convoi terrestre aurait permis d’atteindre le même résultat», concède Staffan de Mistura.
La menace d’un recours aux avions du PAM apparaît donc plus comme un moyen de pression. «Je doute que des largages se produisent dans les environs de Damas. C’est le centre du pouvoir de Bachar el-Assad. L’armée syrienne peut y abattre des avions ennemis. L’ONU ne pourra pas se passer du consentement du régime et ces opérations se heurteront aux mêmes obstacles que l’aide acheminée par camion», estime Valérie Szybala, directrice du Syria Institute, un think thank américain, et spécialiste des sièges en Syrie.
Prise d’une localité stratégique
Les forces loyalistes renforcent plutôt la pression sur la Ghouta orientale, les faubourgs de Damas qui lui échappent depuis le début du soulèvement armé. Elles y ont repris jeudi la localité stratégique de Deir al-Assafir. Les rebelles paient leurs luttes intestines. L’Armée de l’Islam, le principal groupe armé représenté aux négociations de Genève autrefois tout puissant dans la Ghouta, apparaît de plus en plus affaiblie.
Le cessez-le-feu en Syrie n’est plus respecté «qu’à moitié», reconnaît Staffan de Mistura. Les conditions ne sont donc pas réunies pour une reprise des négociations, qui doivent aboutir à une transition politique. Aucune date n’a encore été fixée pour un nouveau round à Genève. Le temps presse: le ramadan commence le 6 juin. «Si les gens sont prêts à combattre et se tuer pendant le ramadan, je ne vois aucune raison pour laquelle ils ne pourraient pas se parler», a dit l’émissaire de l’ONU.