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Après le choix des Britanniques de sortir de l’Union européenne, le président français voudrait conclure un divorce rapide avec Londres.© © Pascal Rossignol / Reuters
«Son discours était limpide: il faut engager très vite la séquence politique avec le Royaume-Uni. Il faut agir et répondre, pas tergiverser et laisser le champ libre à la créativité des diplomates et des juristes des deux côtés de la Manche» expliquent les signataires du texte «Réinventons l’Europe» publié dimanche, reçus à l’Elysée. Dany Cohn-Bendit en était, tout comme l’ancien premier ministre belge Guy Verhofstadt: «Je l’ai trouvé pugnace, attentif, bien conscient du fait qu’il importe de se séparer avant de re-négocier quoi que ce soit. Il a eu aussi l’intelligence de convier Matteo Renzi pour ne pas se retrouver seul face à Merkel» explique l’ancien eurodéputé vert.
Problème: le président français a contre lui son bilan, et le tempérament de la chancelière allemande. «Depuis 2012, Hollande n’a jamais réussi à entraîner derrière lui ses pairs explique un diplomate. Il a parfois réussi à obtenir gain de cause, mais il n’exerce pas de leadership européen». L’idée élyséenne d’une relance de la coopération sécuritaire au sein de l’Union européenne prouve d’ailleurs surtout, selon ses détracteurs, que le locataire de l’Elysée «n’est pas en mesure d’obtenir quoi que ce soit de significatif sur le plan économique et social, qui sont les vrais enjeux vu que sur la menace terroriste, tout le monde est d’accord».
Le calendrier affaiblit François Hollande
Daniel Cohn-Bendit y ajoute l’élément personnel: «La nature d’Angela Merkel est d’attendre. Elle n’a agi différemment qu’en deux occasions majeures: la catastrophe japonaise de Fukushima en 2011 qui l’a vue préconiser l’abandon du nucléaire, et la crise migratoire qui l’a vue ouvrir fin 2015 les portes de l’Allemagne aux réfugiés, avant de les refermer. Or je la vois mal, cette fois, brusquer les britanniques». D’autant que, comme l’explique l’ancien ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders, les idées avancées par Paris sur une zone euro plus fédérale sont étudiées, mais loin d’être acceptées: «Il n’y a pas d’unanimité pour plus d’intégration en Europe» a précisé ce dernier au Monde.
La faiblesse du président français est en outre le calendrier, et son propre positionnement comme candidat non déclaré à sa succession. Durant l’automne – soit au moment où le Royaume-Uni devrait formaliser sa demande de retrait de l’UE – le débat politique français sera monopolisé par les primaires à droite des 20 et 27 novembre, lors de laquelle les candidats conservateurs le prendront à coup sûr pour cible. «La France de François Hollande n’est une référence pour personne» a déjà tonné hier le favori des sondages Alain Juppé dans un entretien également donné au Monde.
Difficile, enfin pour le président-candidat (il annoncera sa décision en décembre) de faire oublier la responsabilité de la gauche française dans un autre référendum qui a porté un coup à la construction communautaire: celui de mai 2005. L’un des leaders du «non» était alors Laurent Fabius, devenu chef de sa diplomatie en 2012…: «On ne sortira pas de la crise du Brexit sans avoir des idées fortes, et sans défendre l’idée que l’urgence d’une souveraineté européenne est la seule manière de surnager dans la mondialisation» poursuit Guy Verhofstadt. A bon entendeur…