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Rémi Mogenet

320px-Marcus_Porcius_Cato.jpgFlaubert critiquait, dans sa correspondance, l’idée que la République fût un absolu: pour lui elle ne l’était pas plus que la Monarchie – et n’était qu’une forme adaptée à son temps. Un temps nourri de tradition classique, dans laquelle la république était glorifiée. On se référait à Caton, à Pompée – aujourd’hui complètement oubliés. La France n’est plus marquée comme autrefois par la culture antique.

Les dirigeants semblent s’épuiser à réveiller sans arrêt le mot de république, dont le sens devient toujours plus diffus, et se confond toujours plus, dans le peuple, avec la France. La république apparaît souvent comme une manière de bénir cette dernière, de la dire juste et bonne. Mais quant à ce que le terme recoupe concrètement, qui s’en souvient?

Il ne se confond pas même avec la démocratie, puisque, pour l’unité de la République, il semble autorisé d’imposer à une partie du peuple une culture qu’il n’aurait pas spontanément. En effet, c’est l’argument donné pour justifier le caractère national des programmes d’enseignement. Mais je ne sais si cela a un sens. Car si la nation est une réalité, elle unit déjà les gens, et donc, si on laissait les familles libres de choisir leurs écoles, leurs professeurs, leurs programmes, la nation apparaîtrait d’elle-même dans la cohérence des choix; et la démocratie n’empêcherait pas du tout l’unité de la république.

Mais, au fond, on sait très bien que des différences se feraient jour, et qu’on serait contraint d’accepter, non une dissolution, comme on veut le faire croire, mais un régime fédéral. La cohérence ne pourrait pas exister au même degré. On sait bien que si en France la démocratie était pleinement opérative, la république d’origine romaine devrait faire place à une Confédération gauloise.

Ceux qui craignent ou feignent de craindre la dissolution sont souvent dans le simple cas concret de détester l’idée d’une confédération, parce que leur modèle est l’ancienne Rome, et qu’ils se rêvent à la tête d’un empire universel, non à celle d’un ensemble populaire, composite et vivant – d’une réalité ordinaire, délestée de ses fétiches glorieux.

Pourtant la politique gagnerait, contrairement à ce que certains prétendent, à être plus réaliste, à s’insérer dans le réel normal des vrais gens. Les problèmes de la France, et le mécontentement populaire, viennent de ce que, à Paris, on adopte la posture des civilisateurs galactiques, et qu’on oublie les effets sur le peuple de ces hautes mais irréalistes visées.

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